1. l'homme cosmopolite
Je suis de Tarse, ville qui n'est pas sans renom (Ac 21, 39).
Saul est né dans la capitale de la province romaine de Cilicie, dont les habitants obtenaient dès la naissance le droit de cité romain (cf. Ac 22, 25-28). Cette ville était située au pied de la majestueuse chaîne du Taurus, aux sommets enneigés et aux pics escarpés. Par cette riche cité commerçante transitaient en permanence des peuples aux langues étrangères et aux moeurs des plus variées. Saul savait que derrière cette imposante chaîne montagneuse vivaient des peuples barbares qui ne connaissaient ni l'espérance, ni Dieu. Tarse, Alexandrie et Athènes constituaient le triangle de la culture antique et chacune contribuait de façon particulière au bagage universel de la science, de la littérature ou de la philosophie.
Les « Portes de Cilicie » se trouvaient au carrefour des routes impériales de deux mondes, l'Orient et l'Occident. Saul vivait dans ce lieu de rencontre des deux cultures et possédait tant l'esprit déductif et conceptuel gréco-romain propre à l'Occident que la richesse de la tradition sémitique.
Saul parlait, pensait et écrivait en grec et en araméen de Palestine, de même qu'en hébreu, langue dans laquelle étaient écrites les Saintes Écritures. Il connaissait la philosophie et la littérature classique,il excellait en géographie, en navigation et en sport. Sa culture étendue avait gravé dans son âme un monde sans frontière qui contrastait avec les limites étroites de sa religion juive. Il cite des auteurs classiques (I Co 15,33; Tt 1,12; Ac 17,28) et connaît la philosophie populaire qu'est le stoïcisme. Il est au courant de la diatribe cynicostoïque et reflète certains aspects de la littérature religieuse hellénique.
2. Formation religieuse
On ne peut comprendre Saul qu'à travers le prisme de sa foi, fondement de sa vie entière, de ses traditions et ses croyances. C'est le noyau autour duquel toute son existence s'organise.
Hébreu, fils d'Hébreux
(Je suis) hébreu, fils d'hébreux, de la tribu de Benjamin (Ph 3, 5).
Saul est sincèrement fier d'être Israélite, d'être le dépositaire de la Promesse, de l' Alliance et de la sainte Loi qui sont les trois piliers de la religion des fils de Jacob. Il se vante d'appartenir à la tribu de Benjamin, dernier fils de Jacob, famille réputée guerrière et vaillante ( cf. Jg 3, 15s ; 5, 14 ; 20,46) mais réticente lorsqu'il s'agit de reconnaître ses erreurs (cf. Jg 19-20).
Pharisien zélé
J'ai vécu suivant le parti le plus strict de notre religion, en pharisien (Ac 26, 5).
Fils d'une famille pharisienne, il fut marqué par la piété. Circoncis dès le huitième jour (cf. Ph 3, 5) conformément à la Loi juive, il s'enorgueillissait de cette opération chirurgicale qui l'intégrait au peuple élu de Dieu (cf. Gn 17, 10-11 ). À cinq ans, il connaissait déjà par coeur le grand Hallel (cf. Ps 136) et le Shema (cf Dt 6,4-13). À huit ans, il récitait les Psaumes tout seul. À partir de sa Bar Mitsvahl , à treize ans, par laquelle il devint « fils du commandement », il dit la prière rituelle la tête couverte du tallit (châle rectangulaire à franges) et les tefillin (ou phylactères) enroulés au bras gauche pour réciter les dix-huit bénédictions. Il connaissait les treize articles de foi du credo du judaïsme. Il ne mangeait que les aliments kasher qui garantissaient la pureté et empêchaient la souillure. Le signe distinctif du véritable pharisien était sa foi en la résurrection des morts et le respect de ses pères. La maison paternelle était un sanctuaire du Très-Haut, consacré par la vie sainte, la pratique de la vertu et l'observance de tous les devoirs. Le tallit (sous-vêtement garni de franges aux quatre coins) distinguait l'Israélite pieux respectant les commandements divins stipulés par la Loi et les traditions. Il allait régulièrement à la synagogue et observait rigoureusement le repos sabbatique. Il payait la dîme et jeûnait conformément aux commandements de la Loi. Enfin, il croyait en l'Alliance du Sinaï, qui était la vraie voie du salut.
Disciple de Gamaliel
C'est aux pieds de Gamaliel que j'ai été formé à l'exacte observance de la Loi de nos pères (Ac 22,3).
Il était tout juste adolescent lorsque son père l'emmena à Jérusalem, ville couronnée par la beauté éblouissante du Temple d'Hérode, à l'harmonie parfaite, au marbre brillant et aux pierres imposantes qui constituaient l'édifice. Deux grands centres de théologie rivalisaient dans la capitale théocratique d'Israël: l'école de Shammaï, fanatiquement attachée à la lettre, représentait la ligne dure; celle dirigée par Hillel était plus souple et conciliante.
Rabbi Gamaliel, petit-fils de Hillel, avait hérité du respect dont jouissait son grand-père et tout le peuple le révérait pour sa prudence et son bon sens (cf. Ac 5, 34). Seuls des jeunes soigneusement choisis rentraient dans son école de formation afin d'apprendre à connaître et à observer la volonté divine, conformément aux traditions et à la sagesse de leurs ancêtres. Cet enseignement était un système de discipline que peu supportaient. Dans ce groupe élitiste on n'admettait pas tous, mais seulement ceux qui avaient réussi une propédeutique méticuleuse, tant théorique que validée par leur conduite sans faute, et le zèle envers la religion de leurs pères.
Saul fut l'un de ces quelques privilégiés à être admis dans l'école de Rabbi Gamaliel; il passa de longs moments aux pieds de celui-ci, scrutant les Écritures, interprétant les énigmes des prophètes et essayant de découvrir le mystère du Messie à venir qui libérerait Israël. Ce célèbre rabbi marqua profondément l'esprit et le coeur de Saul.
Ce fier fils de Benjamin ne fut pas un élève quelconque, ordinaire; il dépassait bon nombre de ses coreligionnaires (cf. Ga I, 14), les surpassant dans la stricte observance des moindres préceptes de la loi mosaïque.
3. Profession: tisseur de tentes
Il apprit dans l'atelier paternel le métier patient du fabricant de tentes en peaux de chèvres, difficiles à travailler (cf. Ac 18, 1-3). Dès sa plus tendre enfance il prit l'habitude de ne pas manger s'il n'avait pas travaillé. Il sut subvenir à ses propres besoins) et gagna sa vie de ses mains; il eut même des amis chers qui avaient le même métier : Aquilas et sa femme Priscille. C'est probablement avec eux qu'il confectionna un manteau auquel il fut particulièrement attaché jusqu'à la fin de sa vie (cf. 2 Tm 4, 13).
Sa tâche jamais facile d'assembler et de tisser les toiles grossières est comparable à sa mission: rechercher l'unité du Corps du Christ.
Les sept colonnes de Damas
1. Soudain...
Dans une guerre, comme dans tout combat, l'attaque par surprise est capitale. Si l'on arrive à surprendre l'ennemi dans un endroit et à un moment où il s'y attend le moins, on peut lui asséner un coup décisif. L'ambassadeur du Sanhédrin de Jérusalem s'est fixé un programme très serré, lui permettant de ne pas perdre de temps ni de s'écarter de son objectif. Il a soigneusement planifié chaque minute de son bref séjour dans la capitale du légendaire royaume araméen. C'est au moment où toute son attention se concentre sur son attaque, et où ses défenses sont au repos, qu'il est surpris :
Il approchait de Damas, quand soudain une lumière venue du ciel l'enveloppa de sa clarté (Ac 9,3).
Son programme s'écroule au moment et à l'endroit où il s'y attend le moins. Dieu a l'habitude d'agir à l'improviste, au moment inattendu, et Il casse les moules préétablis. Les principaux événements de l'histoire du Salut arrivent « soudain »1 : l'appel d'Abraham à Harân, non loin de Damas, ou celui de Moïse, « au-delà le désert »
2. « Soudain » on trouve la perle rare, « soudain » le Fils de l'homme revient au milieu de la nuit, comme l'éclair ou le voleur qui n'annoncent jamais leur venue. « Soudain » aussi fut le bruit venu du ciel le jour de la Pentecôte.
Saul se trouve en territoire païen, à savoir l'endroit le plus inadéquat pour que Dieu se manifeste, lorsqu'il est attaqué par surprise. Il n'est pas non plus en train de prier, n'a pas jeûné et encore moins offert de sacrifice. Des années plus tard, lui-même dira: Dieu, dont la puissance agissant en nous est' capable de faire bien au-delà, infiniment au-delà de tout ce que nous pouvons demander ou concevoir (Ep 3, 20).
2. lumière intense vers midi...
Saul raconte son expérience inoubliable :
Je faisais route et j'approchais de Damas quand, vers midi, une grande lumière venue du ciel et plus éclatante que le soleil rn 'enveloppa de son éclat (Ac 22, 6 ; 26, 13).
La référence au « midi » n'est pas un simple détail chronologique ; elle indique le moment où la lumière de la vérité brille le plus intensément dans la vie spirituelle de Saul. C'est lorsqu'il est le plus certain de marcher sur le chemin lumineux de la vérité qu'apparaît un nouveau tournant jamais imaginé.
En outre, cette lumière vient « du ciel », signifiant que l'initiative vient du Tout-Puissant. Ce n'est pas la créature qui saisit Dieu mais le Seigneur qui va à la rencontre de I'homme (cf. Ph 3, 12). Plus tard, Saul dira de façon apologétique: Ce n'est pas non plus d'un homme que j'ai reçu l'Évangile, mai-s par une révélation de Jésus Christ (Ga I, 12).
3. I1 tombe par terre...
En plein champ de bataille, le Seigneur lui assène un premier coup, décisif. Saul lui-même en rapporte les conséquences :
Je tombai sur le sol (Ac 22, 7).
Le choc est si fort et si surprenant que Saul perd l'équilibre et tombe à terre. Il ne sait même pas ce qui lui arrive.
En général les prédicateurs affirment que Saul tomba de cheval, mais le texte ne précise pas comment il voyageait. Dans cette scène, l'essentiel est implicite: ce pharisien ne peut plus s'appuyer sur ses certitudes d'avant. Ses appuis humains et ses certitudes disparaissent dans les sables mouvants du désert. Pour construire le nouveau Paul, il faut que l'ancien Saul s'érode. Les peintres montrent cette réalité avec justesse en représentant un homme qui ne tient plus les rênes de son existence, qui n'est plus capable de diriger sa vie selon le plan et le programme qu'il s'était fixé.
Tout le dialogue surviendra lorsque Saul gît à terre, privé de la justice que lui confèrent ses bonnes oeuvres.
Tant que l'homme chevauche sur ses certitudes et qu'il tient les rênes de son destin, il ne peut entrer dans une relation intime et personnelle avec le dessein divin. L'être humain doit se placer dans sa sphère de créature pour pouvoir dialoguer avec Dieu. Nous ne prenons notre perspective réelle qu'à partir de l'argile avec laquelle nous avons été façonnés. Pour que la connaissance du Dieu véritable soit féconde, il n'existe pas d'autre attitude que celle d'être prostré dans la glaise fragile de nos propres limites. Moïse a dû, lui aussi, enlever ses sandales pour approcher le mystère du buisson ardent qui ne se consumait pas.
4. le dialogue en hébreu
Saul entend immédiatement une voix qui parle sa propre langue. Elle est à la fois douce et forte. Elle ressemble à la parole des prophètes. La Parole elle-même parle :
« Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » (Ac 9, 4).
« Il est dur pour toi de regimber contre l'aiguillon. Inutile de résister. J'ai déjà mis ma main sur toi et tu ne peux m'échapper. Je suis plus fort que toi et je cours plus vite que toi. Je t'ai cerné. Mieux vaut déposer tes armes et te déclarer vaincu, car je t'ai appelé dès le sein maternel pour t'établir maître de mon peuple et lumière des nations. Tu as trop couru, Saul, mais je t'ai enfin rattrapé... Tu es déjà vaincu. »(…)
Lorsque la présence du Ressuscité ébranle les ciments de la foi de ses pères, cette voix s'adresse personnellement à Paul et confesse: « Je suis Jésus; je t'aime et je me suis livré pour toi, Saul. »
Jésus l'éclaire: « Parce que tu avais perdu la lutte contre moi, Saul, tu devais mourir. Mais je suis déjà mort pour toi sur la croix, afin que tu aies la vie. Je t'ai tellement aimé que je me suis livré à la mort à ta place. Mais je suis ressuscité et désormais c'est moi qui vivrai en toi. »
La rencontre avec Jésus, la Tête, implique également une rencontre avec tout son Corps :
« II existe un binôme indissoluble entre les miens et moi¬ même. Nous ne formons qu'un seul corps avec une multitude de fonctions, mais nous sommes animés d'un même Esprit. Je suis celui que tu persécutes. Tout ce que tu fais au plus petit d'entre les miens, c'est à moi que tu le fais, car en moi tout le corps reçoit unité et cohésion. Mes disciples m'appartiennent pas, mais plus que cela, ils sont aussi une partie de moi. Je vis en eux et eux vivent en moi, Saul. » Le disciple de Gamaliel comprend l'union entre Jésus, la Tête, et tout son Corps. Il sera le héraut de cette vérité, colon¬ne vertébrale de sa théologie. Saul croyait que Jésus était mort, mais il est vivant. Le Crucifié est ressuscité. Mais ce qui l'achève est de savoir qu'il a été aimé à un point tel que quel¬qu'un a donné sa vie pour lui. C'est alors qu'il dépose les armes.
5. Reddition totale: « Que dois-je faire, Seigneur
Saul reconnaît sa défaite et signe sa reddition inconditionnelle. II a lutté tant de fois et si longtemps contre les adeptes de la Voie qu'une fois saisi par Jésus Christ, il scelle sa capitulation par une question :
« Que dois-je faire, Seigneur ? » (Ac 22, 10).
Il a défendu héroïquement sa forteresse. Les murailles et leurs créneaux sont tombés pendant la bataille; une fois vaincu, il se rend et se met au service de celui qui « le fit tomber de cheval ». Celui qui savait tout, ce pharisien zélé qui se vantait de connaître et d'accomplir la volonté divine, accepte alors de ne rien savoir et de devoir recommencer sa course dès le début. Nous n'avons aucun pouvoir contre la vérité (2 Co 13, 8) pourrait être son meilleur commentaire sur tout ce combat.
La plénitude des temps donne une perspective différente aux promesses de salut et au messianisme. Les questions et les doutes remplacent désormais les certitudes dogmatiques du passé. Quel est le sens du Temple avec ses sacrifices ? La Loi du Sinaï est-elle encore valide ? Le Dieu d'Israël est-il aussi le Dieu des Grecs et des barbares ?
6. Aveugle
Il ne voyait rien (Ac 9, 8). Le phénomène dépasse les limites étroites de son entendement. La dose de révélation est si forte qu'il ne peut supporter une telle lumière. Soudain il voit le Ressuscité, et sa vie entière se réorganise autour de Sa passion et de Sa résurrection. Sa foi avait toujours reposé sur la Loi et sur l'ancienne Alliance mais un nouveau pôle, bien plus puissant, apparaît subitement et l'oblige à établir un système non plus basé sur la Promesse mais sur l'accomplissement des prophéties contenues dans l' Ancien Testament. La Promesse et la Descendance s'identifient à Jésus. Le mystérieux Serviteur de Dieu annoncé par Isaïe, c'est le Nazaréen.
Saul lui-même explique que l'excès de lumière entraîne aussi une cécité. Je ne voyais plus à cause de l'éclat de cette lumière (Ac 22, II ).
Lorsque quelqu'un se trouve face au soleil, il doit fermer les yeux. De même, Saul doit filtrer dans le temps l'expérience qu'il vient de vivre. Il est tellement ébloui par la lumière inaccessible de la route de Damas qu'il ne peut voir. La cécité de Saul est le symptôme habituel de celui qui a été éclairé par la lumière de la vérité divine. Il ne perçoit plus les choses et le monde comme avant, il a perdu ses certitudes dogmatiques et schématiques. Pour Saul, cet événement a une telle importance que des années après il se rappelle encore avoir été conduit par la main de ses compagnons (Ac 22, II). Celui qui menait la caravane par le désert mystérieux dut alors se faire conduire par la main d'autres qui lui firent la faveur de le guider. Ce pharisien orgueilleux qui avait la confiance des autorités religieuses suprêmes a perdu la boussole de sa vie.
7. Mission glorieuse, mais difficile
Saul veut connaître son nouveau destin. Jésus lui répond : « Relève-toi. Va à Damas. Là on te dira tout ce qu'il t'est prescrit de faire » (Ac 22, 10).
Il lui est demandé de rentrer dans Damas. Autrement dit, de faire ce qu'il avait prévu, mais différemment. Saul est en train d'apprendre qu'il ne suffit pas de faire ce que Dieu veut mais qu'il est nécessaire de changer ses motifs. Il doit entrer dans la même ville, mais dans une attitude différente de celle que son coeur lui dictait à l'origine.
Jésus ne lui dévoile pas son itinéraire complet, simplement son nouveau destin. Tout lui dévoiler aurait été une révélation excessive à laquelle il n'aurait pas pu résister. Mieux vaut suivre un processus lent où le temps mûrit et approfondit l'expérience. La formule « on te dira » est courante pour signifier « Dieu te révélera ». Le Seigneur aurait pu lui montrer directement chaque pas de sa vocation et de sa mission, mais Il préfère le chemin plus long de l'intermédiaire des hommes. C'est un disciple, Ananie, qui complétera le message du Seigneur : « Cet homme m'est un instrument de choix pour porter mon nom devant les nations païennes, les rois et les Israélites » (Ac 9, 15).
Ce disciple de Damas est chargé d'aller le trouver pour le remplir de l'Esprit Saint et l'incorporer à la mort et la résurrection de Jésus par le baptême. C'est grâce à Ananie que les écailles de l'ignorance tombent et que Saul perçoit le nouvel horizon de son existence. Dans sa défense face au roi Agrippa, il déclare qu'à Damas il fut nommé serviteur et témoin de ce qui lui avait été manifesté (cf. Ac 26, 16). Damas a changé la vie de ce pharisien fervent.
« Tu dois être témoin devant tous les hommes de ce que tu as vu et entendu » (Ac 22, 15).
Il est alors chargé d'une mission sans limite. Le cardinal Martini' déclare catégoriquement: « À celui qui s'était trompé en tout, tout lui est confié ». Sa mission est exprimée dans une mise-à-part pour Jésus uniquement: « Je t'ai établi lumière des nations, pour que tu portes le salut jusqu'aux extrémités de la terre » (Ac 13,47)2. Elle est glorieuse: « Cet homme m'est un instrument de choix ». Cependant, sa tâche n'est en rien facile: porter le nom de Jésus (Ac 9, 15). Le verbe porter implique supporter un lourd poids qui deviendra parfois presque insupportable (cf. Ac 15, 10). La course sera fatigante et demandera un effort permanent. Saul, saisi et vaincu par Jésus, passe trois jours sans voir, sans manger ni boire, pour symboliser la mort du gladiateur vaincu au stade. II doit attendre que l'Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus d'entre les morts (porté par Ananie) donne à son corps mortel la vie (cf. Rom 8, 11 ).
II. Point d'appui : saisis par le Christ
Dans sa guerre mortelle contre l'hérésie des Nazaréens, Saul, bien qu'ayant défendu tenacement son territoire, est assiégé et capturé de la façon la plus surprenante :
Ayant été saisi moi-même par le Christ Jésus (Ph 3, 12).
Avec la même fermeté que la main qui tient l'épée, Jésus a saisi Saul dans ses mains pour ne plus le relâcher. Si l'on représente presque toujours l'Apôtre des païens avec l'épée de la Parole à la main, il est tout aussi clair que Saul lui-même est une épée dans les mains de Jésus Christ. Sans prévenir et soudain, Jésus ressuscité vient à sa rencontre pour changer le cours de sa vie. Moment aussi inattendu que saisissant. Le persécuteur est persécuté et saisi par Celui qui ne l'abandonnera jamais.
De même que tout athlète a besoin d'un appui ferme pour commencer sa course, le point de départ de l'Apôtre repose sur sa rencontre personnelle avec Jésus ressuscité. Ce fut une expérience si inoubliable qu'elle sera la force motrice qui lui permettra de supporter la course d'obstacles, les prisons, la maladie, les naufrages, la faim et, plus pénible encore, la trahison de faux frères ou même l'abandon de ses amis, qui nient le connaître dans des circonstances compromettantes ( cf. 2 Co 6,9; 2 Tm 4, 16). ...l'Apôtre sait qu'il a été saisi par le Christ. Damas est si décisif que, quand quelqu'un remet en question son autorité apostolique, il répond avec un argument irréfutable :
N'ai-je donc pas vu Jésus, notre Seigneur ? (I Co 9, I).
Si certains doutent de son autorité pour annoncer Jésus parce qu'il n'appartient pas au groupe des Douze et encore moins aux archiapôtres (cf. 2 Co 12, II ), il faut que ses détracteurs sachent que sa lettre de créance apostolique fut un jour scellée en territoire araméen. Sans Damas pas de mission, car l'annonce de l'Évangile, au lieu d'être un témoignage, se transformerait en propagande ou en répétition de convictions intellectuelles, sans le feu de l'expérience qui fait fondre les idées froides de l'intelligence.
À la fin de sa vie, prisonnier à cause du Christ, il raconte son histoire et le souvenir ressort, encore frais et plein d'émo¬tion, de ce jour où Dieu le surprit et le prit dans ses mains comme une épée qu'Il ne lâchera jamais : Moi, naguère un blasphémateur; un persécuteur et un insulteur; il m 'a été fait miséricorde, et notre Seigneur m'a jugé assez fidèle pour m 'appeler à son service, parce que j'agissais par ignorance, étranger à la foi (I Tm I, 12-13).
III. Signal du départ
L' athlète ne commence pas à courir quand il veut. Il faut entendre le coup d'envoi de la course. L'appel et l'envoi constituent le point de départ de toute course apostolique.
1. l'appel
« L'appel » explicite, pour être un véritable évangélisateur, est comparable au coup d'envoi de toute course. Saul n'a jamais voulu être et n'a jamais pensé qu'il deviendrait apôtre du Christ Jésus, bien au contraire. Sans l'avoir mérité, il a été mis à part dès le sein maternel (cf. Ga I, 15). Il a écouté la voix de Jésus qui l'a appelé deux fois par son nom dans la langue de ses ancêtres. Il a la certitude d'avoir été choisi gratuitement pour cette mission. Lorsque les combats redoublent de violence et que l'horizon s'assombrit, la clarté resplendissante de ce midi à Damas parviendra toujours à dissiper les nuages les plus noirs. Lorsqu'il fait naufrage, que les siens le trahissent, dans la solitude de la prison ou pendant ses persécutions, cette voix le raffermira dans sa vocation.
2. l'envoi
Comment prêcher sans être d'abord envoyé ? (Rm 10,15).
L'apôtre est l'envoyé par excellence. Le terme « envoyé » implique un autre qui envoie, et dont l'autorité est évidemment supérieure à celle de l'envoyé, mais qui le revêt également de sa puissance, faisant de lui son ambassadeur (cf. 2 Co 5,20). La mission de Paul provient directement de Dieu, sans l'intermédiaire d'un homme (cf. Ga I, I), bien qu'il lui faille par la suite être reconnu par la communauté d'Antioche (cf. Ac 13, 1-3) et les apôtres de Jérusalem (cf. Ga 2, 7-9). Lorsqu'il affirme ultérieurement que personne ne peut prêcher sans être envoyé, il parle d'abord pour lui-même. Il ne pourrait exiger des autres ce que lui-même n'a pas accompli. Comme pour toute vocation prophétique, l'initiative ne vient pas de lui; c'est un appel de Dieu pour accomplir une tâche qui sera, la plupart du temps, ingrate et difficile.
IV. Un nouveau programme
Lorsque vient la plénitude des temps et que Saul l'accepte, tout ce qui est ancien disparaît. Ses intentions antérieures s'évaporent comme l'eau dans le désert aride. La religion de ses pères avait besoin d'une révision radicale à la lumière de Damas. Il élabore le nouveau programme de son existence dans la capitale païenne des Araméens. Aussi, lorsque par la suite il mentionne après trois ans ou au bout de quatorze ans (Ga 1, 18; 2, 1), prend-il comme référence son expérience de Damas. « Avant cet événement qui coupa sa vie en deux, tout était clair. Après, tout sera différent », commente le cardinal Martini où, comme l'affirme J. Jeremias : « La clé pour comprendre Paul, c'est Damas ». Ainsi, dans l'hymne de sa vie, chaque événement doit être lu avec la clé de ce qui est survenu sur la route de Damas.
v. Conclusion
Sa vie comporte deux parties: « Sans le Christ » et « Dans le Christ ». Notons que ce n'est pas « Sans le Christ » et « Avec le Christ », mais quelque chose de bien plus profond et décisif: « Dans le Christ » . Paul ne vit pas seulement avec Jésus mais en lui.
III
CINQ TRANSFORMATIONS ET UNE CONVERSION
Lorsque Jésus saisit Saul dans sa course, une métamorphose continue se déclenche dans l esprit et le cœur de ce fils de Benjamin. Les colonnes de sa foi s'effritent devant les murailles de Damas. Le pharisien de Tarse doit relire les Écritures à la lumière de cette clarté venue du ciel pour situer les nouveaux horizons qui se profilent dans sa vie. La plénitude des temps organise différemment les composantes de sa foi et transforme radicalement son cœur.
1. Cinq transformations
Cinq transformations sont les engrenages que comporte le nouveau système religieux de l'ancien persécuteur des chrétiens.
1. De la loi à la grâce
Devant l'expérience d'avoir été gratuitement saisi par l'amour de Dieu, le premier fondement qui commence à vaciller est celui de la sainte loi du Sinaï.
La loi
Dans la mentalité juive, le salut provient du principe suivant : Moïse écrit en effet de la justice née de la loi qu'en l'accomplissant l 'homme vivra par elle (Rm 10, 5).
L'interprétation est, dans ses grandes lignes, la suivante : Dieu a passé une alliance avec son peuple et lui a donné la loi, afin qu'en l'observant il puisse obtenir toutes les bénédictions terrestres et célestes. Ainsi, celui qui se présente devant Dieu les mains pleines de bonnes oeuvres mérite d'entrer dans la demeure céleste avec les patriarches et les justes du peuple de Dieu, mais celui qui n'a pas accompli la volonté divine est éternellement privé du bonheur. La loi est considérée comme la balance permettant de peser la conduite de chacun pour décider de son sort éternel. Tout dépend de l'homme et de ses efforts personnels. péché, saisissant l'occasion, par le moyen du précepte, produisit en moi toute espèce de convoitise. Lorsqu'il est interdit de voler ou de commettre l'adultère, le poison du péché s'active et suscite toutes sortes d'appétits contraires à la loi. Ainsi, au lieu d'aider à se maintenir dans la droiture, elle invitait à violer les préceptes. Aussi Saul conclut-il avec un certain pessimisme : La force du péché, c'est la loi (1 Co 15,56) car je n'ai connu le péché que par la loi (Rm 7, 7-13) puisque en l'absence de loi il n'y a pas de transgression (Rm 4, 15).
Plus encore, la loi était une tenaille qui emprisonnait l'homme des deux côtés: si quelqu'un croyait l'observer, il pouvait se sentir satisfait devant Dieu et supérieur aux autres hommes. En revanche, il se condamnait lui-même s'il n'y parvenait pas. Il se trouvait ainsi coincé sur les deux chemins qui le menaient au même précipice.
Tous ceux qui se réclament de la pratique de la loi encourent une malédiction (Ga 3, 10). Ce qui pour Saul était auparavant motif de fierté devient cause de malédiction et de mort car pour l'homme qui cherche à être son propre sauveur, la lettre (loi) tue (2 Co 3, 6). La loi, au lieu de le sauver, l'expose à la colère de Dieu puisque l'homme n'observe pas cette loi qui, finalement, le jugera. La loi était-elle donc mauvaise ? Non, mais son effet était temporaire puisqu'elle devait disparaître avec la plénitude des temps. Ce n'était qu'un pédagogue pour nous mener vers le Christ (cf. Ga 3, 24). Aussi cette loi perdit-elle toute valeur lorsque Dieu envoya son Fils né d'une femme afin de racheter les sujets de la loi (cf. Ga 4, 4-5).
La grâce
Si l'homme n'obtient pas le salut par la pratique de la loi, alors comment sera-il sauvé ? La grande découverte de Saul, c'est de comprendre que le salut est gratuit. Cette découverte n'est pas le fruit d'une réflexion, ni une vérité infuse qui s'est imposée à son intelligence, mais elle vient d'une expérience qui a modifié toute sa théologie :
Je poursuis ma course... ayant été saisi moi-même par le Christ-Jésus (Ph 3, 12).
Il courait en persécutant Jésus mais il fut saisi par Lui avant même de l'atteindre sur la route de Damas. Ce que ce pharisien juste ne pouvait obtenir par son effort personnel, Jésus le fit par Lui et en Lui. Saul comprend alors qu'il n'est donc pas question de l'homme qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde (Rm 9, 16).
Saul constate ainsi que le salut est grâce, donc don gratuit, et qu'il ne dépend pas des mérites de l'homme. Les portes du paradis sont scellées et personne ne peut y retourner de lui-même, ni construire une tour pour atteindre le ciel. Le chemin est inverse: Dieu a envoyé son Fils unique dans ce monde, spécialement pour les pécheurs, afin que là où le péché se multiplie, son amour miséricordieux surabonde. Cet acte d'amour gratuit et inconditionnel de Dieu s'inscrit dans le concept paulinien de la grâce. « À Damas, il prend conscience de la toute-puissance de la grâce. » Le cardinal Martini commente ce point: « (Pour Paul) il n'y a pas eu d'effort, de méditation, d'exercices spirituels, de longues prières ni de jeûnes. Tout lui fut donné, afin qu'il soit un signe du Dieu miséricordieux pour tous les peuples, car Son initiative précède toujours notre recherche » . Aussi sa parole acquiert-elle plus de valeur lorsqu'il affirme : C'est par grâce que vous êtes sauvés... par sa bonté pour nous dans le Christ-Jésus. Car c'est bien par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi (Ep 2, 5-8).
Opposition et choix
Si (le salut) est par la grâce, ce n'est plus en raison des oeuvres; autrement la grâce n'est plus grâce (Rm 11,6).
L'argument est très logique: si le salut est gratuit, il ne peut dépendre des mérites humains. Mais si, d'une manière ou d'une autre, il dépend de l'homme, on ne peut donc pas dire qu'il est gratuit. La grâce et les oeuvres s'excluent mutuellement. L'Évangile est la Bonne Nouvelle par excellence parce qu'il annonce la gratuité du salut. Si le salut avait un prix, on pourrait le qualifier « d'offre ou de bonne affaire » mais non de don gratuit, et il ne mériterait pas, alors, le titre de Bonne Nouvelle.
Si l'héritage appartient à ceux qui relèvent de la loi, la foi est sans objet, et la promesse sans valeur:.. Aussi dépend-il de la foi, afin d'être don gracieux, et qu'ainsi la promesse soit assurée à toute la descendance (Rm 4, 14-16). En outre, si l'homme parvenait à se sauver lui-même en pratiquant les oeuvres de la loi, la foi en la résurrection du Christ n'a aucune valeur et son sang ne servirait à rien (cf. Ga 2, 21). À l'inverse si l'homme est sauvé par la foi en Jésus, la loi perd toute valeur salvifique. Saul, comme tout homme, doit faire un choix unique et exclusif: le Christ-Jésus ou la loi. S'il opte pour la loi, il arrivera au ciel les mains pleines de ses bonnes oeuvres, mais ce sera sa justice personnelle; que quelqu'un meure pour lui ne sera donc pas nécessaire parce qu'il est lui-même son propre sauveur. S'il choisit la grâce, alors il ne pourra pas se glorifier de ses bonnes oeuvres. En d'autres termes, il doit choisir: soit rester le disciple du législateur du Sinaï, soit devenir le serviteur de Jésus de Nazareth. S'il s'ancre dans le Sinaï, il n'a pas droit de cité dans la Jérusalem Nouvelle. Ce sont deux systèmes antagonistes diamétralement opposés. Accepter l'un implique
nécessairement le rejet de l'autre. Le régime de la loi mène à la condamnation; le régime de la grâce, au salut.
On ne peut être marié aux deux. Il faut choisir: la loi ou le Christ ressuscité. Soit il continue sur la voie du ne prends pas, ne goûte pas, ne touche pas
(cf Col 2, 22), soit il décide de suivre le chemin de la grâce et abandonne sa propre justice qui vient de la loi (cf. Ph 3,9).
Saul était marié avec la loi. Il vivait avec elle, il l'aimait et la servait. Il mangeait, dormait avec elle et, tout au long du jour veillait à satisfaire ses prescriptions et ses désirs. Toujours il essaya de lui faire plaisir et chercha à engendrer des fils soumis au régime du Sinaï. Mais pour épouser le Christ-Jésus, il divorce de la loi et rompt avec celle qui fut son amour de jeunesse. Comme de lui-même il est incapable de mériter le salut, encore moins de l'obtenir, il quitte la pente raide du Sinaï et s'engage sur un chemin vierge qui repose uniquement sur une Promesse faite par Dieu. La preuve que la loi ne sauve pas : personne ne peut l'observer. La loi ne sauve pas, répète Saul à ceux qui ont mis leur confiance en elle, pour la simple raison que personne ne peut l'observer dans son intégralité. Tel fut le message qu'il entendit lui-même d'Etienne (cf. Ac 7,53), telle fut aussi la conclusion de l'Assemblée de Jérusalem, à laquelle il était présent (cf. Ac 15, 10). Lui-même le répète ultérieurement à ceux qui tentent d'imposer la loi aux autres (cf. Rm 4,1-25), et il insiste très clairement sur ce point dans son discours aux Juifs d'Antioche de Pisidie (cf. Ac 13, 38).
Transgresser un précepte était considéré comme violer la loi entière. Essayer de se sauver en observant la suite interminable des préceptes de la loi équivalait à balayer toutes les feuilles des arbres dans un parc où un vent violent soufflait en sens contraire. Aussi l'Apôtre conclut-il avec conviction : Que la loi ne puisse justifier personne devant Dieu, c'est l'évidence, puisque le juste vivra par la foi (Ga 3, Il).
Conclusion
L'Apôtre a compris qu'il n'y a qu'un seul Évangile et déclare anathème celui qui proclame tout autre message de salut en dehors du Christ (cf. Ga 1,6-9). Son annonce de l'E¬vangile va se centrer précisément sur le don gratuit du salut (cf. Ep 2,4-9 ; Ac 20,24). Par la mort et la résurrection de Jésus, seul médiateur entre Dieu et les hommes ( cf. I Tm 2, 5), tout autre moyen qui promet le pardon des péchés est inutile, voire contraire. Il avertit ainsi ceux qui recherchent le salut par la loi :
Si la justice vient de la loi, c'est donc que le Christ est mort pour rien (Ga 2, 21 ).
Son image de Dieu a changé: le Seigneur n'est pas derrière une caisse enregistreuse, additionnant et retranchant pour rémunérer chacun selon ses oeuvres, mais il est un Père débordant d'amour et de miséricorde qui accomplit la promesse d'héritage qu'il a faite à l'homme, par un don libre et gratuit. Il ne s'agit donc pas d'un Dieu débiteur qui doit rétribuer les bonnes oeuvres mais d'un Dieu donneur et généreux, qui accorde gratuitement le salut. Aussi conclut-il, non par un argument doctrinal mais par un fait :
Ayant donc reçu notre justification de la foi, nous sommes en paix avec Dieu (Rm 5, I).
2. De la circoncision à la foi
La circoncision
Dieu a donné un commandement à son serviteur Abraham quant à sa descendance :Que tous vos mâles soient circoncis (Gn 17, 10). La circoncision était considérée comme le sacrement d'ini¬tiation par lequel l'homme s'intégrait au peuple élu et avait droit à toutes ses promesses. C'était le signe de l'Alliance de Dieu avec tous les siens et elle garantissait les bénédictions messianiques. C'était la condition nécessaire pour pouvoir célébrer la Pâque, faire partie du peuple de l'Alliance et entrer en Terre Promise. Ce rite était si important qu'il surpassait le rigoureux repos sabbatique (cf. Jn 7,23). Les circoncis s'estimaient supérieurs aux incirconcis, qu'ils qualifiaient systématiquement de pécheurs puisqu'il leur manquait ce signe qui les identifiait aux fils d'Abraham, d'Isaac et de Jacob (cf. Rm 3, 1-2; Ga 2, 15). Saul de Tarse, pharisien fervent, tirait son orgueil de la chair en déclarant qu'il avait été circoncis le huitième jour après sa naissance, conformément à la plus rigoureuse tradition de ses pères (cf. Ph 3,4). Il relativisait toutefois l'importance de ce signe, suivant l'opinion des prophètes réformistes, en affirmant que la circoncision du cœur était plus importante (cf. Rm 2, 28-29 ; 3, 19). Il ira encore plus loin par la suite en déclarant que les véritables circoncis sont ceux qui offrent le culte selon l'Esprit de Dieu (cf. Ph 3, 3).
Le pharisien converti réagit contre la tentation de considérer les signes comme absolus. L'élection, le temple et même le serpent de bronze avaient fini par supplanter la relation avec Dieu. Aussi l' Apôtre refuse-t-il que la circoncision concurrence la suprématie de l'unique Pontife entre Dieu et les hommes. La révélation antérieure n'était que l'ombre des réalités à venir qui débutèrent avec la Pâque de Jésus.
La foi: croire en Dieu et à son unique plan de salut
La relation avec Dieu ne repose pas sur les signes extérieurs; elle se fait moyennant la foi. La foi ne repose pas essentiellement sur une croyance en quelque chose, mais en Quelqu'un. C'est une relation avec une personne, basée sur la confiance. Il s'agit d'un acte par lequel « l'homme s'en remet à Dieu comme à l'unique source de salut ».
Paul affirme donc: Je sais en qui j'ai mis ma foi (2 Tm I, 12). Cette foi vient d'une promesse faite par Dieu, qui est digne de confiance parce que toujours fidèle. Pour Paul, la foi est sécurité et confiance; elle naît lorsqu'on accueille la prédication des témoins de l'Évangile, lorsqu'on croît en la Bonne Nouvelle de la Promesse en confessant que Jésus est Seigneur (cf. Rm 10, 9) et qu'on est marqué du sceau de l'Esprit Saint (cf. Ep 1, 13) par le baptême (cf. Rm 6,4). Pour l'Apôtre, la foi exige de vivre conformément à ce que l'on croit, elle implique d'être conforme à sa vocation de sainteté. Celui qui est sauvé manifeste sa foi en proclamant que Jésus est l'unique Sauveur et le seul Seigneur de tout son être. Cela suppose de passer du monde des ténèbres à celui de la lumière admirable, d'abandonner ses fausses idoles pour se tourner vers le Dieu véritable (cf. ColI, 12-13 ; 1 Th 1, 9). Enfin, il faut mourir au péché et vivre pour Dieu dans le Christ-Jésus (cf. Rm 6, 10-11 ), car autrement cette foi se réduirait à une simple idéologie.
L'épître aux Romains constitue le traité paulinien le plus complet sur la justification de la foi. Elle n'est pas seulement géniale en termes de contenu théologique, elle l'est aussi pour son schéma pédagogique. Dans les cinq premiers chapitres, il démontre que la justification ne se fait que par Jésus Christ, sans les oeuvres de la loi. Puis, à partir du chapitre huit, il montre comment vit une personne qui a accepté le salut. Ces deux parties sont reliées par le chapitre six, qui traite du baptême comme moyen d'incorporation à la mort et la résurrection du Christ-Jésus, et par le chapitre sept qui nous déclare morts à la loi pour devenir possession de Dieu.
Le choix
L'Apôtre est très clair et intransigeant à ce sujet; il n'accepte aucun compromis de la part de ceux qui essayent de concilier le régime de la circoncision avec la vie nouvelle dans le Christ-Jésus. D'un côté, celui qui est circoncis doit continuer à respecter toutes les pratiques de la loi que, de fait, il ne peut observer, tombant ainsi dans la condamnation (cf. Ga 3, 2 ; 5, lO ; 6, 13). De l'autre côté, s'il n'y a qu'un seul Évangile, à savoir un seul moyen de salut, la circoncision ne sauve pas. Aussi ceux qui ont mis leur foi dans la circoncision ont-ils rompu avec le Christ. C'est moi, Paul, qui vous le dis: si vous vous faites circoncire, le Christ ne vous servira de rien (Ga 5, 2). La circoncision n'est pas seulement relativisée, elle est ridiculisée par Paul lorsqu'il se réfère à ce sacrement comme à une mutilation : Qu'ils aillent donc jusqu'à la mutilation', ceux qui bouleversent vos âmes! (Ga 5, 12) dit-il à ceux qui essayent d'imposer la circoncision à ceux qui se sont convertis au christianisme.
La preuve: Abraham justifié par la foi avant d'être circoncis
Lorsque Dieu fit sa promesse à Abraham, le patriarche répondit par un acte de foi et une confiance intrépide en Celui qui l'appelait. La foi d'Abraham lui fut comptée comme justice (Rm 4, 9 = Gn 15, 6). La circoncision suivit comme sceau de la justice née de la foi. Aussi Saul conclut-illogiquement : si la foi a justifié Abraham, la circoncision ne l'a pas justifié. Les fils d' Abraham sont donc ceux qui lui ressemblent par leur foi et non par la circoncision (cf. Rm 4,9-12 ; Ga 3,6-29). Alors, si la circoncision ne sauve pas, quel est le moyen de salut ? Grâce à son expérience de Damas, Saul conclut rapidement que le seul Sauveur est Jésus, mort et ressuscité (cf. Rm 4,24-25). Lui-même fut sauvé lorsqu'il entendit la Parole dans sa propre langue. Cette Parole engendra la foi par laquelle il crut en Celui qui lui parlait et lui remit sa vie entière, dans une confiance totale.
Mais il doit consolider sa position par un texte inspiré. Scrutant l'Écriture, il découvre le grand principe biblique :
Le juste vivra par sa fidélité (Ha 2, 4).
Il conclut donc sans ambiguïté : Vous êtes tous fils de Dieu, par la foi dans le Christ Jésus (Ga 3, 26).
Conclusion
Ceux qui croient en Jésus ont rompu avec le régime de la loi. Dans le Christ, ils n'ont pas besoin du signe extérieur de la circoncision, puisque la foi leur suffit. Dieu sauve en Jésus, moyennant la foi (cf. Ac 15, Il ; Ga 2, 16). Autrement dit, la justice gratuite de Dieu, nous la faisons nôtre par la foi (cf. Ga 2, 16 ; Rom 3,22 ; 5,2).
3. De l'Israël de la chair à l'Israël de Dieu
Israël, le peuple élu de Dieu Pas un peuple qu'il ait ainsi traité (Ps 147, 20).
Les Israélites avaient nettement conscience d'être un peuple à part. Si le fait d'avoir été choisis les différenciait des autres peuples, l' Alliance avec leur Dieu les rendait uniques sur terre. Ils savaient que par la descendance d'Abraham toutes les nations seraient bénies (cf. On 12,3). Dieu ne remit sa loi à personne d'autre et n'appela « mon peuple » aucun autre peuple. Israël était une nation consacrée et le bien propre de son Dieu (cf. Ex 19,3-8), c'est pourquoi il restait à part ou différent des autres peuples (cf. Esd 9, 1-2; 10, II; Ne 9,2). Dans la mentalité juive, les non-Juifs vivaient loin des promesses, sans espérance ni Dieu, exclus de la cité d'Israël et étrangers aux alliances ( cf. Ep 2, 12). Les Juifs méprisaient les étrangers car ils n'appartenaient pas au peuple élu.
Paul reconnaît que les sept bénédictions appartiennent aux Israélites: l'adoption filiale, la gloire, les alliances, la législation, le culte, les promesses et les patriarches (cf Rm 9, 4-5). Quant à lui, son orgueil repose sur ses prérogatives raciales. Il se proclame de la lignée d'Israël, peuple appelé à être la lumière des nations (cf. Is 42,6 ; 49, 6). Saul n'était pas un prosélyte qui avait été intégré au peuple d'Abraham : dans ses veines coulait le sang d'Isaac, de Jacob et de Benjamin.
Le peuple de Dieu: le plan universel du salut
Le fils zélé d'Abraham reçoit la révélation suivante: Dieu veut que tous les hommes soient sauvés pour former un peuple nouveau : Il n y a plus ni Juif ni Grec, il n y a plus ni esclave ni homme libre, il n y a plus ni homme ni femme ; car tous vous ne faites qu'un dans le Christ-Jésus. Mais si vous appartenez au Christ, vous êtes donc la descendance d'Abraham, héritiers selon la promesse (Ga 3,28-29). Il y a un nouvel Israël, que Paul appelle l'Israël de Dieu (cf. Ga 6, 16), et auquel appartiennent les Juifs comme les païens, les hommes comme les femmes, les savants comme les ignorants, tous ceux qui croient en Jésus. Le mur qui séparait les peuples est tombé, et Dieu a formé un seul peuple (cf. Ep 2, 14). Ainsi donc la chair ne compte plus, mais la foi qui opère par la charité. Les fils d 'Abraham ne sont pas ses descendants par le sang mais ceux qui obéissent à la Parole de Dieu (cf. Ga 3,7).
Le choix
Saul de Tarse doit choisir: continuer de croire en de longues généalogies selon la chair ou croire au don de la foi qui l'agrège au nouveau peuple de Dieu.
La preuve: les deux fils d'Abraham
Abraham eut deux fils, l'un de la servante, l'autre de la femme libre (Ga 4, 22).
Avec l'érudition classique d'un spécialiste de l'herméneu¬tique, il étaye sa thèse par un argument biblique irréfutable. Abraham eut deux fils: Ismaël, né du propre vouloir de l'homme et incarnant la loi, était le fils de l'esclave Agar. Il devint aussi esclave. Son autre fils, Isaac, naquit de la Promesse et hérita des bénédictions. Il ne suffisait toutefois pas d'avoir le Patriarche d'Israël pour père, il fallait aussi naître de la Promesse de Dieu. Aussi conclut-il : Tous les descendants d'Israël ne sont pas Israël (Rm 9,6).
Le drame, c'est que les fils du père de la foi ne sont pas tous fils de la Promesse. On peut descendre d'Abraham et vivre sous le joug de l'esclavage. La pire insulte pour un descendant d'Abraham est d'être appelé « fils de l'esclave » : tu descends de notre père Abraham mais tu n'hériteras pas des bénédictions, car tu es le fils d'Agar, l'esclave, et tu es destiné à être esclave. C'est pourquoi le paladin de la liberté affirme résolument: Nous ne sommes pas enfants d'une servante, mais de la femme libre (Ga 4,3).
Les promesses ont été adressées à Abraham et à sa descendance. L'Écriture ne dit pas: « et aux descendants »,
Comme s'il s'agissait de plusieurs; elle n'en désigne qu'un : et à ta descendance, c'est-à-dire le Christ (Ga 3, 16). Saul sait que la Promesse fut faite à la descendance d'Abraham, qui est une, et non à ses descendants. Cette descendance est le Christ-Jésus. C'est pourquoi on peut en Lui, et uniquement en Lui, accéder à cette Promesse.
Conclusion
Le pharisien de Tarse vécut une expérience semblable à celle d'Abraham lorsque, non loin d'Harân, en plein territoire païen, Dieu vint à la rencontre de cet Israélite qui pensait qu'il ne pouvait se manifester que sur la terre de ses ancêtres. Saul comprend que le Seigneur ne se limite pas aux frontières étroites d'une nation, encore moins aux quatre murs d'un temple. Il fut incorporé à la mort et à la résurrection du Christ ¬Jésus en région païenne, par le baptême reçu d'Ananie. Il ne suffisait pas d'être fils d'Abraham selon la chair car le peuple de Dieu, dispersé dans le monde entier, se compose de ceux qui naissent de sa Promesse et non du sang ou de la chair.
Vous êtes tous fils de Dieu, par la foi, dans le Christ Jésus (Ga 3, 26).
Il n'y a qu'un peuple élu, l'Israël de Dieu, auquel appartiennent ceux qui croient en Jésus Christ. Ce ne sont pas les enfants de la chair qui sont enfants de Dieu, seuls comptent les enfants de la promesse (Rm 9, 8). Saul a changé. Sa gloire repose désormais sur le don de la foi qui l'intègre au véritable Israël de Dieu (cf. Ga 3,25-29). En devenant disciple de Jésus, il ne cesse pas d'être hébreu mais atteint la plénitude des fils du Patriarche. Son passeport certifie qu'il est citoyen des cieux (cf. Ph 3, 20) et concitoyen des saints (cf. Ep 2, 19). Bien que, comme tout Israélite, il ne puisse oublier Jérusalem, il sait que sa patrie définitive est en haut (cf. Ga 4, 26).
4. Du persécuteur et insulteur à l' Apôtre infatigable
Le persécuteur
Son pharisaïsme zélé l'avait poussé à prendre des mesures concrètes, comme lui-même le raconte : Vous avez entendu parler de la persécution effrénée que je menais contre l'Église de Dieu et des ravages que je lui causais, et de mes progrès dans le judaïsme, où je surpassais bien des compatriotes de mon âge, en partisan acharné des traditions de mes pères (Ga 1, 13-14). Il ne pouvait supporter que les adeptes de la Voie propagent leur doctrine pernicieuse qui souillait la pureté de la religion d'Israël. Son arme préférée, celle qu'il maniait le mieux, était les arguments des Écritures, d'où il tirait notamment: Un pendu est une malédiction de Dieu (Dt 21,23). Dans son fanatisme pour anéantir ce fléau, il alla jusqu'à ignorer son célèbre maître Gamaliel qui lui conseillait de laisser les disciples en paix car s'il s'agissait d'une idée de l'homme elle se détruirait d'elle-même. Si cependant c'était une oeuvre divine, rien ni personne ne l'emporterait sur elle (cf. Ac 5,35-39). Pour Saul, nulle trêve. Il devait en finir avec elle car l'ivraie ne devait pas pousser avec le blé.
L'Apôtre
Mais Celui qui, dès le sein maternel, m'a mis à part et appelé par sa grâce, daigna révéler en moi son Fils pour que je l'annonce parmi les païens (Ga 1,15-16).
Un jour cependant la vie de ce pharisien fanatique s'illumine. Sur le chemin de Damas apparaît la lumière resplendissante de la vérité de l'Évangile et il se rend inconditionnellement, reconnaissant que les décrets de Dieu sont insondables et ses voies incompréhensibles (cf. Rm II,33). Il lui est toutefois impossible de rester indifférent. Il ne suffit pas d'arrêter simplement de persécuter les chrétiens. Il ne suffit pas non plus d'en faire partie. Il faut aussi devenir un héraut et un témoin de ce qu'il a vu. Lui qui était le pire fléau de la foi devient désormais son défenseur et son interprète. Je rends grâce à celui qui m 'a donné la force, le Christ-Jésus, notre Seigneur; qui m'a jugé assez fidèle pour m 'appeler à son service, moi naguère un blasphémateur; un persécuteur; un insulteur (1 Tm 1, 12-13). Il ne s'agit donc pas d'arrêter sa course de persécuteur mais de courir en sens inverse. Sa vie doit être combat et souffrance, mais pour une autre passion: annoncer l'Évangile de la grâce (cf. Ac 20, 24). Dès qu'il connaît la vérité, il commence à la proclamer aux quatre coins de la terre. Serviteur du Christ-Jésus, apôtre par vocation, mis à part pour annoncer l'Évangile de Dieu (Rm 1,1). Cette conscience d'être apôtre lui fait encourir mille dangers et vaincre toutes les difficultés. Il sait que Dieu a mis sa confiance en lui. Le ministère de l'apostolat lui a été confié bien qu'il soit un avorton (cf. I Co 15,8).
Le choix
Accepter cette nouvelle mission implique de renoncer à son ancienne position théologique. Il devra payer le prix pour passer du persécuteur au persécuté, étant toujours menacé et en perpétuel danger de mort.
La preuve
Ne suis-je pas libre ? Ne suis-je pas apôtre ? N'ai-je donc pas vu Jésus, notre Seigneur ? N'êtes-vous pas mon oeuvre dans le Seigneur ? Si pour d'autres je ne suis pas apôtre, pour vous du moins je le suis; car c'est vous qui êtes le sceau de mon apostolat. (1 Co 9,1-2). Si quelqu'un doute de l'authenticité de son apostolat, cet ambassadeur du Christ avance des preuves. Tout d'abord, il a vu le Seigneur Jésus. Et les communautés qu'il a lui-même fondées sont le sceau qui garantit son ministère. Il ne s'agit pas d'arguments mais bien de faits.
Conclusion
Oui, malheur à moi si je n'annonçais pas l'Évangile ! (1 Co 9, 16).
Jeremias interprète l'attitude de Paul de la manière suivante: « le ministère est une nécessité qui m'incombe, autrement dit: Dieu m 'y oblige }. Une mission incontournable a été confiée à Paul, qui l'accepte de lui-même.
5. De pharisien irréprochable à pécheur pardonné
Pharisien irrépréhensible
Quant à la loi, un pharisien; quant au zèle, un persécuteur de l'Église , quant à la justice que peut donner la loi, un homme irréprochable (Ph 3, 5-6).
Saul s'accrochait à chacun des six cents treize préceptes de la loi juive. Il parvenait à observer rigoureusement la loi. Pour lui le problème était ailleurs: il pensait avoir droit au salut grâce à ses propres mérites. Il cherchait le salut par le chemin long et interminable de l'observation des oeuvres de justice qui ne parviennent jamais à libérer l'homme. Le pharisien était alors devenu synonyme de l'homme qui s'accordait lui-même son propre salut et qui, par l'observance de la loi, s'es¬timait parfait devant Dieu et les hommes. Saul, comme le pharisien de l'Évangile, se croyait capable de négocier avec Dieu et ainsi d'obtenir les plus grands intérêts sur son investissement dans les bonnes oeuvres. Il était en droit d'exiger une récompense pour ses efforts car il avait acquis les mérites suffisants pour cela. Personne, pas même Dieu, ne pouvait lui reprocher un manquement quelconque à la loi ni à la morale prescrite sur les froides tables de pierre.
Pécheur pardonné
Il fut saisi par Jésus le Galiléen lorsqu'il suivait cette voie et la lumière de Damas mit à terre tous ses mérites. Il reçut donc le baptême pour le pardon des péchés. L'un des signes absolus d'une rencontre authentique avec le Juste, c'est que la personne fait l'expérience de l'amour et de la sainteté de Dieu. Devant cette merveille il découvre simultanément son péché et la nécessité d'être pardonné. L'Esprit du Christ ressuscité convainc (n'accuse pas) du péché, afin que le pécheur puisse s'approcher du trône de la grâce et recevoir le secours approprié.
Il admet ultérieurement qu'il n'est pas un pécheur parmi d'autres mais bien le plus grand de tous : Elle est sûre, cette parole et digne d'une entière créance : le Christ-Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs, dont je suis, moi, le premier (1 Tm 1,15). Ce qui opprime Paul c'est d'avoir blasphémé contre l'Oint du Seigneur, s'opposant ainsi au plan divin. Son péché le plus grave: avoir cherché à se sauver par sa propre justice en observant les commandements de la loi. Il change cependant du tout au tout en affirmant :
Où le péché s'est multiplié, la grâce a surabondé (Rm 5,20).
Aussi n'y a-t-il plus aucune condamnation qui pèse contre lui, ni contre ceux qui sont dans le Christ Jésus (cf. Rm 8, 1).
L’ENTRAINEMENT DE L’ATHLÈTE
I. Camp d'entraînement: le désert d'Arabie
L'expérience de Damas fut si forte et la transformation si radicale qu'elles ébranlèrent les ciments de sa foi et firent vaciller la colonne vertébrale de sa vie. Saul doit donc marquer un temps d'arrêt pour assimiler chaque élément et le situer dans une nouvelle perspective. Aussitôt, sans consulter la chair et le sang, sans monter à Jérusalem trouver les apôtres mes prédécesseurs, je m'en allai en Arabie (Ga 1, 16-17). La tâche apostolique, comme toute grande mission, est précédée d'une intimité profonde avec soi-même où l'on rencontre de manière subtile - mais bien réelle - la présence même de Dieu. Avant de parler de Dieu, il l'a écouté dans la solitude du désert. Le véritable apôtre de Jésus ne peut se forger que dans l'aridité de ce milieu. Voilà donc pourquoi la première étape de la vie de Saul se déroule dans cette région stérile de l'empire des Nabatéens. Avant d'entreprendre sa course apostolique il s'investit dans trois années de noviciat, assimilant la Parole de Dieu pour l'harmoniser avec son expérience et ses connaissances bibliques. Certaines valeurs anciennes acquièrent une plus¬-value, d'autres trouvent leur vraie perspective, d'autres encore disparaissent.
I. Préparation physique et régime alimentaire
Dans la préparation physique il est important d'accorder beaucoup d'attention à l'alimentation. Tout athlète suit un régime alimentaire approprié, car sa condition physique en dépend considérablement. Ce régime exige de manger certaines choses, mais aussi de se priver des aliments nuisibles.
1. Nourriture: la prière
Si la force d'un athlète repose sur son régime alimentaire, la source d'énergie d'un apôtre, c'est la prière (cf. Ep 6, 17-18 ; Co14, 2-3) qui le relie à la puissance salvifique. Rempli de la puissance du Très-Haut, il est un bien meilleur instrument pour établir son Règne de justice, de paix et de joie dans l'Esprit Saint. La prière et l'apostolat constituent un binôme indissoluble. Prétendre évangéliser sans une solide vie de prière revient à combattre, non pas contre la chair et le sang, mais contre les puissances et la domination du monde des ténèbres. Il ne s'agit toutefois pas de la prière en tant que telle mais de la façon dont on prie. Comme tout Pharisien pieux, Saul priait trois fois par jour. Après Damas, il ne se concentre plus sur le temps passé à prier mais sur la manière de prier. Son argumentation comporte trois points.
La prière de confiance
L'esprit de fils adoptif nous fait nous écrier: Abba ! Père ! (Rm 8,15). Par la médiation de Jésus-Christ dans l'Esprit Saint il s'adresse à Dieu en tant que Père. Sa relation avec Dieu se trouve donc radicalement changée, puisque l'Esprit Saint lui donne la confiance d'un fils envers son père (cf. Ga 4, 6).
La prière dans l'Esprit
Nous ne savons prier comme il faut; mais l'Esprit lui¬ même intercède pour nous en des gémissements ineffables (cf Rm 8,26) pour nous mettre en relation avec Dieu. Seul l'Esprit de Dieu, qui sonde les profondeurs de Dieu (cf 1 Co 2, 10), nous met en contact intime et personnel avec Lui.
L'agonie de la prière
Je vous le demande, luttez avec moi dans les prières... (Rm 15,30).
En vertu de son expérience mystique, celui qui a été ravi jusqu'au troisième ciel compare la prière à une lutte ou, mieux, à une agonie. À chaque fois que la créature se place devant son Créateur, la petitesse devant la Grandeur, la rencontre est disproportionnée. Thomas d'Aquin réaffirme que la prière est une « lutte de l'homme contre Dieu » .
Paul acquiert une nouvelle façon de prier qui nous incite à nous demander si déjà nous prions ou si nous avons une nouvelle manière de rentrer en contact avec Dieu. Le plus important n'est pas le temps passé à prier mais la qualité de la communication avec un père très aimant. Il faut toutefois admettre que le temps consacré à la prière est directement proportionnel aux fois où l’on parvient à ce contact avec Dieu. Les grands événements de la vie de Paul et les révélations qu'il a eues surviennent pendant qu'il prie: c'est en train de prier qu'Ananie trouve ce lion féroce qui menaçait d'extermi¬ner les chrétiens (cf. Ac 9, II). Lorsqu'il prie à Corinthe, timidement et en tremblant, Dieu vient le réconforter en lui disant de ne pas avoir peur ( cf. Ac 18, 9-11 ). C'est en priant qu'il a la vision du Macédonien, ce qui élargit les frontières de son ministère (cf. Ac 16, 9-10). À Philippes il est délivré des chaînes de la prison grâce à la prière de louange (cf. Ac 16, 25-40). Ses lettres sont remplies de louanges et d'hymnes à la gloire de Dieu, surtout l'Épître aux Romains. Aussi Paul recommande-t-il aux siens: « (Soyez) assidus à la prière » (Rm 12, 12), « priez sans cesse » (1 Th 5, 17), « que la prière vous tienne vigilants, dans l'action de grâce » (Col 4, 2).
2. Privation: le péché
Tout athlète se prive de tout (1 Co 9, 25).Si le sportif se nourrit très soigneusement, il doit également renoncer aux aliments qui lui sont nuisibles. L'apôtre, pour sa part, doit s'abstenir du péché pour pouvoir courir avec légèreté. Nous devons rejeter tout fardeau et le péché qui nous assiège et courir avec constance l'épreuve... (He 12, 1).
Le pire ennemi de l'évangélisateur est son péché. De même que tout péché regretté et pardonné peut être un grand témoignage pour tous les autres, vivre en état de péché peut discréditer son ministère. Pécher gravement serait comme essayer de courir en portant une pierre de 100 kg, ou encore cheminer sa vie entière avec un caillou dans la chaussure.
3. Soins physiques
Paul est conscient que son corps doit être suffisamment préparé et apte pour accomplir la mission qui lui incombe. Les grands événements de la vie de Paul et les révélations qu'il a eues surviennent pendant qu'il prie: c'est en train de prier qu'Ananie trouve ce lion féroce qui menaçait d'extermi¬ner les chrétiens (cf. Ac 9, II). Lorsqu'il prie à Corinthe, timidement et en tremblant, Dieu vient le réconforter en lui disant de ne pas avoir peur ( cf. Ac 18, 9-11 ). C'est en priant qu'il a la vision du Macédonien, ce qui élargit les frontières de son ministère (cf. Ac 16, 9-10). À Philippes il est délivré des chaînes de la prison grâce à la prière de louange (cf. Ac 16, 25-40). Ses lettres sont remplies de louanges et d'hymnes à la gloire de Dieu, surtout l'Épître aux Romains. Aussi Paul recommande-t-il aux siens: « (Soyez) assidus à la prière » (Rm 12, 12), « priez sans cesse » (1 Th 5, 17), « que la prière vous tienne vigilants, dans l'action de grâce » (Col 4, 2).
2. Privation: le péché
Tout athlète se prive de tout (1 Co 9, 25). Si le sportif se nourrit très soigneusement, il doit également renoncer aux aliments qui lui sont nuisibles. L'apôtre, pour sa part, doit s'abstenir du péché pour pouvoir courir avec légèreté. Nous devons rejeter tout fardeau et le péché qui nous assiège et courir avec constance l'épreuve... (He 12, 1).
Le pire ennemi de l'évangélisateur est son péché. De même que tout péché regretté et pardonné peut être un grand témoignage pour tous les autres, vivre en état de péché peut discréditer son ministère. Pécher gravement serait comme essayer de courir en portant une pierre de 100 kg, ou encore cheminer sa vie entière avec un caillou dans la chaussure.
3. Soins physiques
Paul est conscient que son corps doit être suffisamment préparé et apte pour accomplir la mission qui lui incombe. En tout cela nous sommes les grands vainqueurs... (Rm 8,37). Malgré les souffrances et les échecs, il se sait le grand vainqueur ( cf Rom 8, 37) qui prend sans cesse part au triomphe du Christ (cf. 2 Co 2, 14) et que rien ni personne ne pourra jamais séparer de l'amour de Dieu manifesté dans le Christ-Jésus (cf. Rrn 8,38-39). La devise et le cri de guerre de ce soldat du Christ, devant les tribulations ou les difficultés diverses, se résument ainsi: Je puis tout en Celui qui me rend fort (Ph 4, 13). Vaincre les problèmes n'est pas la seule manière de triompher: La foi nous certifie que Dieu écrit droit sur les lignes tordues. Aussi Paul déclare-t-il : Avec ceux qui l'aiment, Dieu collabore en tout pour leur bien (Rrn 8, 28).
La mentalité de vainqueur est l'une des caractéristiques de ceux qui triomphent.
I Conclusion
Il faut donc se préparer à tous points de vue pour accomplir la mission. Celle-ci est si grande et si importante qu'elle exige une préparation à tous les aspects de la vie humaine : physique et culturel, maturité psychologique, dimensions pas-torale et spirituelle.
V
LES QUATRE ENTRAINEURS DE PAUL
Pour se préparer à la course, Paul de Tarse eut quatre entraîneurs qui le façonnèrent pour en faire un athlète.
1. Rabbi Gamaliel
Je suis juif né à Tarse en Cilicie, j'ai cependant été élevé ici dans cette ville, et c'est aux pieds de Gamaliel que j'ai été formé à l'exacte observance de la loi de nos pères (Ac 22, 3). L'un des burins qui contribuèrent le plus à façonner l'esprit et la mentalité de Saul fut Rabbi Gamaliel, qui jouissait d'une excellente réputation parmi le peuple d'Israël (cf. Ac 5, 34). Petit-fils du célèbre Hillel, c'est son enseignement qui modela l'âme du jeune Saul de Tarse, par la méditation et la prière avec les saints Manuscrits.
Rabbi Gamaliel fit beaucoup pour le pharisien de Tarse en ce sens qu'il lui inculqua une connaissance profonde des Écritures. Saul cite l'Ancien Testament plus de deux cents fois dans ses épîtres. Il ne peut parler, encore moins enseigner ou prêcher sans se référer à la loi, aux Textes et aux Prophètes. Chaque citation qu'il fait de l'Écriture garde l'empreinte du rabbin juif avec lequel il passa tant de temps à déchiffrer les énigmes des prophètes et les conseils des sages d'Israël. Rabbi Gamaliel laissa une marque indélébile dans l'âme de ce pharisien loyal. Son amour et son respect pour la Torah, pour les Neviim et les Ketouvim furent si grands qu'on écrivit de lui: « Avec la mort de Gamaliel vint au moins la vénération des Écritures » . Sans l'apport de ce rabbin, Saul serait toujours demeuré un amateur de l'athlétisme apostolique. Son maître donna une forme scripturaire à sa pensée et, mieux encore, lui inculqua l'amour et le respect des saints Parchemins. L'Écriture sacrée eut une telle importance pour Paul que sa dernière volonté, avant de mourir, fut de demander à Timothée de lui apporter au plus vite les Manuscrits contenant la Parole de Dieu (cf. 2 Tm 4, 13).
II. Le disciple Ananie
Il y avait à Damas un disciple du nom d'Ananie. Le Seigneur l'appela dans une vision: « Ananie ! » - « Me voici, Seigneur », répondit-il (Ac 9, 10). Ananie était un homme dévot selon la loi et jouissant du bon témoignage de tous les juifs (Ac 22, 12). Quatre-vingt-dix-neuf pour cent des fois où Dieu l'appela, il répondit : « Me voici, Seigneur ». Hélas, il a du mal à céder sur un certain point, car il possède une base de données très à jour, bien étudiée pour fournir une conclusion fiable. Conscient que ce fléau des chrétiens se rapprochait de Damas, il priait Dieu d'intervenir par un miracle et d'anéantir cette terrible menace. C'est à ce moment précis qu'il a la vision du Seigneur l'appelant par son nom: « Ananie ». Il répond comme d'habitude: « Me voici, Seigneur. Demande¬ moi ce que Tu veux... » Il s'agit d'une tâche très délicate : Pars, va dans fa rue Droite et demande, dans fa maison de Judas, un nommé Sauf de Tarse (Ac 9, Il). On lui demande précisément ce un pour cent qu'il n'est pas disposé à céder. Et, avant même que le Seigneur ait fini de lui indiquer son plan, le disciple l'interrompt, car il connaît tout ce que les saints chrétiens disent au sujet de ce Saul de Tarse. Alors, tel un journaliste, il résume le problème en une phrase informative: « Seigneur, j'ai entendu beaucoup de monde parler de cet homme et dire tout le mal qu'il a fait à tes saints à Jérusalem... Tu peux me demander ce que Tu veux, Seigneur; mais je connais parfaitement l'individu, et il ne m'inspire pas confiance. Imagine-Toi que les nouvelles de tous ses agissements en Judée sont parvenues jusqu'ici même... Ce que Tu me demandes n'est ni opportun ni logique. »
Ananie informe le Seigneur des dernières nouvelles fraîchement reçues. Avec bien des détails il raconte la mort d'Etienne, les menaces et les blasphèmes, les lettres de pouvoir et comment, d'un moment à l'autre, ce lion rugissant envahira la ville pour arrêter les adeptes de « la Voie ». Il ignore toutefois les événements survenus à la dernière minute, qui comporte elle aussi soixante secondes, et que Dieu peut surprendre à tout moment puisque c'est « soudain » qu'Il agit généralement. « Pars » lui ordonne simplement le Seigneur. « Je n'ai pa le temps de t'informer de ce qui vient de se passer aux abord de la ville. » Ananie a plus de mal à céder ce un pour cent que te quatre-vingt-dix-neuf pour cent restants. Malgré ses réticences, il part accomplir sa mission. Il met du temps à trouve la rue principale de la ville et respire profondément aval d'entrer dans la maison du fameux Judas. Lorsqu'il découvre ce persécuteur tant craint, il se met derrière lui et, avant même de le saluer, lui précise qu'il n'est pas venu de sa propre intiative mais sur ordre exprès du Seigneur: « Saul, celui ql m'envoie, c'est le Seigneur » (cf Ac 9, 17). Avec une certaine réserve il lui impose les mains, d'aus, loin qu'il le peut, et d'une voix tremblante lui ordonne « Recouvre la vue et sois rempli de l'Esprit Saint ». Ille bal tise ensuite et se retire immédiatement après.
La mission d' Ananie envers Saul se résume en trois points :
- Retrouver la vue: il est l'instrument par lequel cet homme soumis aux ténèbres de l'ignorance du plan de Di~ recouvre la vue. Il ne guérit donc pas uniquement une céc té physique mais fait tomber le voile qui pesait sur l'intelligence de Saul afin que celui-ci reconnaisse Jésus comme Messie annoncé par les prophètes.
Celui qui était aveugle a désormais pour mission de conduire à la lumière ceux qui vivent dans l'ombre de la mort.
- Être rempli de l'Esprit Saint: le pharisien de Tarse reçoit le Don des dons par l'intermédiaire de ce disciple du Seigneur. Si Ananie n'avait pas obéi à cet ordre, Saul n'aurait pas reçu l'Esprit de fils adoptif et la force nécessaire pour annoncer avec puissance le Nom de Jésus jusqu'aux confins de la terre.
A partir de ce moment l'Esprit sera sa force, son inspiration et le moteur de son apostolat.
- Être baptisé:
- Ananie est l'instrument par lequel Saul est incorporé au mystère de la mort et de la résurrection du Christ-Jésus. L'expérience charismatique du chemin de Damas doit être scellée par le sacrement du baptême. Sa rencontre personnelle avec Jésus ressuscité est confirmée par la communauté chrétienne représentée par Ananie, qui admet officiellement Saul dans le groupe de ceux qui devront se sauver et qui intègre'1t la communauté de Jésus, à savoir l'Eglise. Ce moment fut si intense qu'à chaque fois que le futur Paul parlera du baptême il se référera toujours à son expérience personnelle dans la maison de Judas, par le ministère d' Ananie. Personne ne contribua autant et en si peu de temps que ce fidèle disciple du Seigneur, lorsqu'il obéit en offrant la seule chose qu'il n'était pas disposé à donner. Il coopéra peut-être plus à l'histoire du salut avec ce un pour cent qu'avec les quatre-vingt-dix-neuf pour cent qu'il avait déjà offerts. Si Ananie n'avait pas livré aux mains de Dieu la seule chose qu'il se réservait, l' Apôtre des païens n'existerait pas aujourd'hui.
III Son ami Joseph Barnabé
Le troisième entraîneur de Saul fut son fidèle ami Joseph, surnommé Barnabé (fils d'encouragement), lévite, originaire de l'île de Chypre, à l'esprit ouvert et conciliant. Barnabé se distinguait pour être premier en tout. Personne ne sait qui fut le deuxième homme à marcher sur le continent américain il y a cinq cents ans. Les statues et la gloire sont toutes pour Christophe Colomb. Faire ce que d'autres ont déjà réalisé n'a pas la même valeur. Celui qu'il faut admirer, c'est le premier à tenter quelque chose. Barnabé appartient à cette race d'hommes qui se risquent sur des chemins vierges.
1. le premier à donner ses biens aux apôtres
La communauté des disciples de Jésus vivait condamnée à mort. Leurs biens étaient confisqués, ils étaient fouettés et perdaient leur travail. Jetés en prison, ils étaient condamnés à mort après un jugement inique. Leur avenir était plus qu'in¬certain. Être chrétien dans ces circonstances équivalait à faire partie d'une espèce en voie de disparition. Leurs économies étaient précaires. Bien qu'ils aient mis en commun le peu qui leur appartenait, ils avaient peu à partager: ni compte bancaire, ni placement fixe à long terme au nom de la communauté car personne n'était sûr du lendemain. (Barnabé) possédait un champ; il le vendit, apporta l'ar¬gent et le déposa aux pieds des apôtres (Ac 4,37). Dans cette situation Joseph Barnabé croit jusqu'au bout et accomplit un geste inouï qui s'oppose à toute logique humaine. Il vend son champ, son seul et unique bien, et remet la totalité de l'argent aux apôtres... Du point de vue humain, c'est vraiment trop risqué. L'attitude d'Ananie et de Saphire pourrait sembler plus sensée: ils gardent la moitié de la somme en cas de besoin ou pour leur vieux jours, proches (cf Ac 5, 1-11 ). Mais la foi de Barnabé est sans demi-mesure. Puisqu'il risque déjà sa vie en croyant au Crucifié, pourquoi craindre de mettre en péril les choses matérielles ? Acapulco a la réputation, bien méritée, d'être l'une des plus belles baies au monde. Sur une falaise appelée "La Quebrada", des plongeurs intrépides sautent dans le vide à plus de soixante mètres de hauteur, en calculant l'heure de leur saut, afin que leur chute coïncide avec la marée montante, pour ne pas s'écraser sur les rochers. Des centaines de personnes viennent jour et nuit admirer ceux qui défient la mort avec une exactitude chrono métrique. Cependant, aucune de ces personnes ne mérite autant la gloire que le premier qui a découvert la technique et a risqué ce saut dangereux. Au fur et à mesure que passent les siècles, la liste s'allon¬ge des moines et des ascètes qui se sont lancés dans le vide de la pauvreté, renonçant à la sécurité que procurent les biens matériels; mais tous viennent après Barnabé, le lévite, qui décida de s'en remettre aux mains providentielles de Dieu et de la communauté.
2. le premier qui croit à la conversion de Saul
Le pharisien aguerri commence à prêcher immédiatement après sa conversion. Les volcans entrent en activité sans demander d'autorisation et entraînent des changements imprévus. Avec la même détermination que lorsqu'il persécutait les disciples du Galiléen, Saul annonce désormais Jésus comme le Fils de Dieu, provoquant un grand désordre: N'est¬ce pas là celui qui s'acharnait sur l'Eglise de Dieu ? (cf Ac 9,21). Mais lui, au lieu de s'affaiblir, gagne en force et proclame avec plus d'ardeur que Jésus est le Christ annoncé par les prophètes (cf Ac 9,22). Cela suscite une grande colère chez ses anciens coreligionnaires, qui cherchent à le tuer. Comme il sait que sa vie est au service de l'Evangile, il veut la préserver pour la mission qui lui a été confiée et s'échappe de nuit, en descendant dans une corbeille le long des murailles de la ville. Condamné à mort, cherchant un peu de paix et de calme, il décide de monter à Jérusalem trouver les témoins les plus autorisés de Jésus, et sans aucun doute les plus radicaux en ce qui concerne l'amour absolu envers Dieu et leurs frères. Il a besoin de protection et de soutien en ces temps difficiles. La déception est cependant traumatisante, car la communauté qui devait l'accueillir lui tourne le dos. Saul essayait de se joindre aux disciples mais tous en avaient peu1; ne croyant pas qu'il fût vraiment disciple (Ac 9, 26).
Saul essaie de s'intégrer à l'Eglise sainte. En vain. Les saints disciples le soupçonnent d'être un espion et le bruit court qu'il s'est infiltré dans les rangs de la communauté pour connaître les noms, les adresses et les cachettes de chacun. Ainsi, à chaque fois qu'il se présente à une assemblée, celle-ci se dissout. Personne ne le reçoit chez lui. Tous l'évitent, refusent de le saluer et le laissent seul. Il se trouve dans une grotte de plus en plus étroite et sans issue. La communauté chrétienne le rejette et la synagogue ne peut pas le reprendre puisqu'il a reçu le baptême chrétien. La sainte Église de Dieu refuse son visa d'entrée sur son territoire; il vit donc dans la solitude la plus incompréhensible. Luc décrit terriblement la situation: Tous en avaient peur.
Telle est donc la première grande crise de Saul qui, dans ses nuits sans sommeil, s'interroge: « Voilà donc les saints chrétiens ? Et où est l'amour de leur Maître? Cela vaut-il la peine d'en faire partie ? Ne ferais-je pas mieux d'aller de mon côté ? » Son seul soutien est l' éclat resplendissant de cette lumière intense sur le chemin de Damas, qui ne répond certes pas à toutes ses questions mais qui, en revanche, lui donne la motivation suffisante pour continuer la route, malgré les portes qui se ferment et les chemins qui se rétrécissent. Il commence à peine sa lune de miel à Damas qu'il doit passer par le douloureux feu purificateur, dont les flammes épurent les motivations. Il fait ainsi l'expérience de la pauvreté la plus radicale, car ses certitudes humaines s'effondrent et ses rêves s'évanouissent. Lorsque personne ne le croit et que tous lui tournent le dos, une seule main se tend. Barnabé est le premier et le seul qui croit à l'authenticité de Saul. Il lui rend visite, parle en privé avec lui la nuit et lui redonne courage, lui assurant qu'un jour sonnera l'heure de l'apostolat. Saul n'est rattaché au corps du Christ que par un seul lien qui le relie à la sève de vie: son fidèle ami Joseph Barnabé. Alors Barnabé le prit avec lui, l'amena aux apôtres et leur raconta comment, sur le chemin, Saul avait vu le Seigneur qui lui avait parlé, et avec quelle assurance il prêchait à Damas au nom de Jésus (Ac 9, 27). Le Chypriote, malgré les réticences de Saul', convoque alors une assemblée extraordinaire présidée par les apôtres et s'y rend, accompagné de Saul. Comme le nouveau converti porte les stigmates du doute et n'est pas digne de confiance, Barnabé parlera donc pour lui. Risquant de perdre son prestige et de tomber du piédestal où l'avait placé la communauté, il parle en faveur de l'ancien pharisien persécuteur. Il compromet son autorité pour son ami, met la main au feu pour Saul.
La défense de Barnabé repose sur deux évidences qu'il présente comme critères indubitables de vérité. D'abord, le Seigneur Jésus lui est réellement apparu sur la route de Damas. Ce n'était pas un mirage dû à la chaleur du désert. Ensuite, l'ancien persécuteur a déjà commencé à prêcher, risquant jusqu'à sa propre vie. Il conclut donc qu'il ne s'agit pas d'une duperie ni d'une stratégie de traître. Celui qui a risqué sa vie a largement éprouvé la valeur pour laquelle il est prêt à mourir. La Parole ne dit pas si Barnabé réussit à convaincre l'as¬semblée. Il semblerait que non. Mais celui qui est sûr d'avoir un véritable ami, c'est Saul de Tarse. Il lui suffit qu'un seul croit en lui. Il lui suffit de sentir l'acceptation et la confiance sans limite d'une personne pour compenser les doutes et supporter le rejet de tous les autres. La certitude d'un amour inconditionnel est le pilier qui soutient toute la structure d'une personnalité qui ne s'érode pas avec le vent de la persécution, les tourmentes de la calomnie ou le rejet d'une foule anonyme. Saul voit ainsi se présenter une petite opportunité, certes transitoire, de prêcher dans la cité de David. Mais en raison de son passé de pharisien pieux, beaucoup s'intéressent à lui. Ses anciens coreligionnaires s'estiment grandement offensés puisque le capitaine de leur équipe les a trahis, passant au camp adverse. Survient donc une grande persécution contre Saul (comme à Damas) et contre tous les disciples de Jésus.
L'attitude agressive et parfois imprudente de Saul attise le conflit, car l'adversité, au lieu de le décourager, le renforce et le fait lutter encore plus implacablement contre l'ennemi. C'est un cercle vicieux et mortel. Saul défie les Juifs, qui réagissent plus vivement, ce qui le pousse à répondre encore plus vigoureusement. Cette situation risque de déboucher sur une guerre totale. La conversion de Saul, au lieu d’augmenter la persécution, augmente la crise. Les Nazaréens étaient jusqu'alors tolérés mais, menés par le pharisien aguerri de Tarse, ils deviennent un feu dangereux que seul un autre feu peut éteindre. Alors, en conciliabule secret entrecoupé de nombreuses prières, les « frères » se résolvent à éloigner Saul, comme mesure de distanciation. Les esprits pourront ainsi se calmer et les eaux reprendre leur cours normal. Mieux vaut en sacrifier un que vivre tous en difficulté. Profitant de ce que les Juifs veulent le tuer, la communauté prétend le protéger, non pas dans son sein mais en l'envoyant le plus loin possible. Sans lui demander son avis, ils décident pour lui et le séparent de la communauté en lui offrant un voyage tous frais payés... mais son billet est un aller simple. Il retournera donc à Tarse, en Cilicie... et lorsqu'il le faudra ou qu'un poste sera vacant dans la communauté, ils le feront revenir...
Luc est très expressif lorsqu'il écrit: ils le firent partir pour Tarse (cf Ac 9,30), laissant entendre que Saul n'a pas le choix. Contraint par cette décision ecclésiale, il accepte l'obligation. Mieux encore, pour s'assurer qu'il embarque vraiment, ils l'ac¬compagnentjusqu'au port de Césarée. Dès que le navire disparaît à l'horizon, le problème à son bord, ce même auteur qui avait raconté la montée de la persécution note avec une fine ironie : Cependant les Églises jouissaient de la paix dans toute la Judée, la Galilée et la Samarie (Ac 9,31). On peut enfin respirer librement sans avoir l'âme pendue à un fil. Finis les risques de tachycardie et les poussées d'adré¬naline puisque la cause du conflit a disparu. Saul est rejeté par le corps du Christ, et ce rejet est avalisé par les autorités de Jérusalem. Personne d'autre que lui ne peut mieux exprimer cette tragédie lorsqu'il reconnaît tristement: « je suis un avorton » qui ne peut rester dans ce corps et est donc privé de la protection et de la communion des autres (cf. 1 Co 15, 8-9). Certes, il avait déjà pris la décision de se retirer au désert, mais l'exil est très différent. Éloigné par la communauté elle-même, il doit passer environ cinq ans dans la solitude et le silence, à l'abri dans l'atelier paternel. Tout en assemblant les peaux, il se demande pourquoi il a été arraché du tissu du corps du Christ et vit comme un membre abortif qui n'a pas été toléré par les autres membres... Il lui reste un seul souvenir, que le temps et l'espace menacent d'atténuer: ce lévite de Chypre qui crut inconditionnellement en lui.
3. Le premier à découvrir le Saul prédicateur
L'Evangile a dépassé les frontières étroites de la Judée, la Parole a gagné la Phénicie, Chypre et Antioche. Mais la Bonne Nouvelle n'était proclamée qu'aux juifs, jusqu'à ce que quelques Chypriotes et Cyrénéens franchissent les bar-rières raciales et annoncent Jésus aux païens également, qui la reçurent avec joie; nombreux furent ceux qui embrassèrent la foi (cf. Ac Il, 19-21). Lorsque l'Eglise-mère de Jérusalem apprend ce grand pas prophétique, elle cherche un lien qui ne trahisse pas le message évangélique. Elle choisit Joseph Barnabé, car il allie la culture de la diaspora et le juif de cœur, mais aussi parce que c'est un homme de bien, rempli de l'Esprit Saint et de foi (Ac 11,24). En outre, il n'a pas à prendre de précautions particulières : il s'est affranchi des opinions et libéré de ses biens. (Barnabé) partit chercher Saul à Tarse. L'ayant trouvé, il l'amena à Antioche (Ac II, 25-26). Barnabé quitte immédiatement la capitale mais, avant d'ar¬river à destination, monte jusqu'aux pieds de la chaîne du Taurus pour chercher, dans la rue des artisans, la maison d'un tisseur de tentes réputé. Il y retrouve son ami, celui pour lequel il a un jour mis la main au feu. Barnabé vient avec un seul objectif: inviter Saul à coopérer pour diriger et organiser l'Eglise d'Antioche. Le Chypriote est certain que derrière ce caractère impulsif se cache un diamant brut qu'il doit tailler. Il croit en ce que personne ne croit. Ce Saul qui provoque tant de problèmes, suscite tant de jalousies, est un vase de choix et sera la lumière des païens. L'heure a sonné pour Saul. Il se risque à être mal compris parce qu'il s'associe à quelqu'un de suspect, sans s'arrêter aux torts passés. Appeler Saul pour travailler dans la communauté représente un grand risque. Si Saul échoue, la renommée de Barnabé baissera considérablement dans la hiérarchie de l'Eglise. Par ce geste prophétique, Barnabé montre clairement et charitablement son désaccord avec ceux qui ont expulsé le tisseur de tentes de la Tente de la communauté. Aujourd'hui tous les chrétiens reconnaissent l'autorité de l'Apôtre des gentils. De grandes cathédrales (à Londres) et des villes importantes (Sao Paulo) portent son nom. Sa statue, aussi grande que celle de Pierre, garde l'entrée du Vatican. Mais le premier, et à ce moment le seul qui croit en lui est son ami Joseph Barnabé.
Toute une année durant ils vécurent ensemble (Ac 11, 26).
Saul passe un an sous le marteau et le burin de Barnabé qui le pousse, l'encourage et le corrige afin que sa prédication ne manifeste pas seulement la vérité mais qu'elle soit aussi capable de convertir. Peu de temps après l'Esprit choisit ces deux grands amis pour une course de fond : Tandis qu'ils célébraient le culte du Seigneur et jeûnaient, l'Esprit Saint dit: « Mettez-moi donc à part Barnabé et Saul en vue de l'oeuvre à laquelle je les ai appelés » (Ac 13,2). Le chef d'équipe, c'est Barnabé, dont l'expérience, la maturité et la prudence sont une garantie. A ses côtés marche un jeune, plein de fougue et de joie, dynamite capable de bâtir ou de détruire l'oeuvre entière. Jamais deux personnalités aussi différentes n 'avaient été associées pour un seul et unique objectif. Si la plus belle amitié de l' Ancien Testament est celle qui lia David, de la tribu de Juda, à Jonathan le Benjaminite, dans le Nouveau Testament c'est celle qui unit Barnabé le Chypriote et Saul, de la tribu de Benjamin. Détail éloquent que la scène de ce vaillant prédicateur lapidé à Iconium, laissé à terre pour mort, mais que son ami Barnabé relève et porte dans la ville pour soigner ses blessures (Ac 14, 19-20). Leurs vies se sont unies à Jérusalem, ils travaillèrent ensemble à Antioche, et c'est unis qu'ils franchirent les frontières avec une seule obsession: faire connaître, aimer et suivre Jésus de Nazareth.
Saul ne doit tant à personne d'autre qu'à son ami Barnabé.
IV. l'Esprit Saint
Tous ceux qu'anime l'Esprit de Dieu sont fils de Dieu (Rm 14, 8). Le véritable entraîneur et guide de l'apôtre est l'Esprit Saint lui-même. (Saul et Silas) parcoururent la Phrygie et le territoire galate, le Saint-Esprit les ayant empêchés d'annoncer la Parole en Asie. Parvenus aux confins de la Mysie, ils tentèrent d'entrer en Bithynie, mais l'Esprit de Jésus ne le leur permit pas (Ac 16, 6- 7). Sans l'Esprit Saint, point de mission (cf. Ac 13,2-3). C'est lui le protagoniste de l' évangélisation et de l' instauration du Royaume de Dieu. L'Apôtre n'aurait pas traversé les frontières de l'Europe si l'Esprit ne le lui avait révélé (cf. Ac 16, 9-10). L'Esprit le prévient aussi des difficultés à venir et le raffermit devant l'épreuve. L'Esprit Saint m'avertit que, de ville en ville, chaînes et tribulations m’attendent (Ac 20, 22-23).
Ce même entraîneur le choisit pour une tâche spéciale (cf. Ac 13, 2). Ille rend capable de signes et de prodiges (cf. Rm 15, 19) pour le ministère de l'Esprit (cf. 2 Co 3, 8) et pour annoncer l'Evangile non seulement en puissance mais aussi dans l'action de l'Esprit Saint (cf. I Th 1,5). C'est l'Esprit qui, par son oeuvre merveilleuse, imprime l'image de Jésus dans la vie de l'apôtre (cf. 2 Co 3, 18). Un entraîneur ne travaille pas seulement l'aspect physique: il fortifie, accompagne et soutient aussi l'athlète.
De même l’Esprit du Christ raffermit ce prédicateur infatigable lorsqu'il atteint la limite de ses forces à Corinthe : Sois sans crainte. Continue de parler; ne te tais pas. Car Je suis avec toi, et personne ne mettra sur toi la main pour te faire du mal, parce que J'ai à moi un peuple nombreux dans cette ville (Ac 18, 9-10).
V. Conclusion
Paul n'est pas un autodidacte ni un parasite mais bien le membre d'un corps, qui a besoin des autres membres. Tout comme dans le corps l'oeil a besoin du pied et le pied de la main, le maître des païens a besoin des autres membres du corps du Christ pour accomplir sa mission d'Apôtre des gentils. Derrière ce titre glorieux figurent tous ceux qui collaborèrent pour le former, le rendre apte à accomplir sa mission et le soutenir dans sa tâche. Sans ces aides, jamais la figure de ce géant de l'Eglise n'aurait pu être façonnée.
VI
LES REGLES DE LA COURSE
I. Annoncer l'unique Évangile et être évangile (Kérygme)
1. l'unique Évangile ou l'anathème. Si quelqu'un vous annonce un évangile différent de celui que vous avez reçu, qu'il soit anathème! (Ga 1, 9). Paul précise très clairement que l'on ne peut annoncer un évangile différent de celui qu'il a lui-même reçu, à savoir : Christ est mort pour nos péchés ( cf. 1 Co 15, 3), le salut est grâce (cf. Ac 20, 24), et il n'y a qu'un seul médiateur entre Dieu et les hommes (cf. 1 Tm 2,5). La Bonne Nouvelle, c'est la personne du Christ-Jésus. Cet Évangile est unique et pas même un ange venu du ciel n'est autorisé à le changer. Quiconque se risquerait à l'altérer mérite la pire malédiction qui soit: l'anathème (cf. Ga 1, 8-9). Il ne s'agit toutefois pas de tomber dans une vision réductrice de l'Évangile en le considérant uniquement comme un contenu. C'est aussi une action: instaurer le Règne de Dieu dans ce monde en oeuvrant afin que tout ait le Christ pour tête (cf. Ep 1, 10). Paul VI dirait: « instaurer la civilisation de l'amour » où la justice et la liberté, la paix et le développement intégral de la personne et des peuples concourent au bien de la communauté humaine.
2. Être bonne nouvelle
Vous savez vous-mêmes de quelle façon... je n'ai cessé de me comporter avec vous, servant le Seigneur en toute humilité, dans les larmes. . . Argent, 0r ; vêtements, je n'en ai convoité de personne (Ac 20, 18-19; 33). Pour être évangélisateur, il ne suffit pas de proclamer un message ni de témoigner de la mort et de la résurrection du Christ-Jésus uniquement. Il faut en même temps témoigner par sa propre vie, et donc croire ce que l'on annonce et vivre ce que l'on croit. Sinon, on court le terrible risque d'avoir annoncé à d'autres et d'être soi-même disqualifié avant de parvenir au but (cf. I Co 9,27). Si l'évangélisateur n'est pas lui-même évangile, bonne nouvelle pour le monde, son message perd toute crédibilité; s'il ne vit pas ce qu'il proclame, personne ne croira ce qu'il dit. Paul va jusqu'à dire: Montrez-vous mes imitateurs, comme je le suis moi-même du Christ (cf. I Co I I, I ), car la grâce de Dieu à mon égard n'a pas été stérile (I Co 15, 10), de sorte que ce n'est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi (Ga 2, 20).
II,. Avec la puissance de l'Esprit (Charisme)
La transformation des cœurs (cf. Ac 16, 14) et la nouvelle créature sont les oeuvres créatrices de Dieu par l'annonce de la Parole, qui a le pouvoir d'édifier le Royaume de Dieu. C'est ainsi que Paul donne aux Thessaloniciens, dès sa première épître, sa méthode d'évangélisation : Notre Évangile ne s'est pas présenté à vous en paroles seulement, mais en puissance, dans l'action de l'Esprit Saint, en surabondance (cf. I Th I, 5). Cette action de l'Esprit apparaît dans la parresia et la dynamis :
1. Parresia : force pour prêcher
(Paul) prêchait avec assurance au nom du Seigneur (cf. Ac 9,28). La « parresia » est la capacité de conviction de l'Esprit, qui permet à l'évangélisateur de prêcher avec assurance, courage et liberté, en s'appuyant sur la puissance intrinsèque de la Parolel. Paul prêchait ainsi2 et il en parle également dans ses épîtres3,
2. Dynamis : puissance agissante
La « dynamis » est la puissance salvifique de Dieu. Je ne rougis pas de l'Évangile : il est une force de Dieu pour le salut de tout homme qui croit (Rm 1, 16). Les signes de puissance ne sont pas facultatifs mais impératifs, car ils témoignent de Jésus vivant, sauvant et libérant son peuple. Les prodiges et les miracles, les guérisons et la délivrance sont des signes tellement transcendants qu'ils distinguent le véritable apôtre (cf. 2 Co 12, 12)4. Les charismes rentrent dans le cadre de l'évangélisation. C'est ainsi que la Parole acquiert toute sa force. Paul est un charismatique qui parle en langues, guérit les paralytiques et ressuscite les morts. Il a la parole de sagesse et le don de la foi. Même ses mouchoirs guérissent les malades (cf. Ac 19, 12). Il a surtout le charisme propre aux meneurs, à savoir le discernement pour annoncer le dessein de Dieu aux autres (cf. Ac 20,27). Tous ses charismes s'intègrent dans sa mission évangélisatrice. Hors de ce contexte, les charismes sont mal interprétés et déformés. Mais Paul n'a pas que des charismes. Il a également certains ministères: il est prophète et docteur (cf. Ac 13, I ), et exerce surtout le ministère qu'il place avant tous les autres : être apôtre (cf. I Co 12,28).
III,. Communion du Père avec le Fils dans l'Esprit Saint (Communauté)
La grâce du Seigneur Jésus Christ, l'amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit soient avec vous tous ! (2 Co 13, 13). Par communion il faut comprendre l'amour et l'union qui existent entre le Père et le Fils dans l'Esprit Saint, qui se projette dans le corps du Christ, la communauté chrétienne. La communion qui vient de Dieu se traduit par le fait que les croyants n'ont qu'un seul cœur et qu'une seule âme (Ac 4, 32). Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, par tous et en tous (Ep 4, 5-6). Tous sont animés par un seul et même Esprit (1 Co 12, 13).
La communion s'effectue avec deux axes :
1. Communion avec Céphas. Paul a été appelé à l'apostolat d'une manière anormale, et il dut souffrir ce stigmate toute sa vie durant. Dès le début, il est rejeté et laissé en dehors de la Tente de la communauté. Mais une fois réintégré à Antioche, et au commencement de ses voyages apostoliques surtout, il doit trouver une solution afin que son apostolat contribue à l'unité de l'Église et ne crée pas une structure en marge de celle définie par son Fondateur. Résoudre ce problème n'est pas facile, car les apôtres continuent de se méfier de l'ancien persécuteur en prétextant que si quiconque, affirmant avoir des visions et des révélations, s'autoproclame apôtre, cela suscitera une grande discorde entre les Églises. Paul doit donc procéder avec prudence en restant toujours perméable à l'Esprit. Aussi, en bon fabricant de tentes, décide-t-il de chercher les fils capables d'unir le corps du Christ, et non ceux qui peuvent le déchirer. Si Jésus a détruit le mur qui séparait les peuples, Paul ne peut être un obstacle menaçant l'unité apostolique. Il entreprend un voyage spécial de quinze jours à Jérusalem pour rendre visite à Céphas (cf. Ga 1, 18). Cela ne suffit peut-être pas car il doit, par la suite, revenir sous la coupole de la communauté : Au bout de quatorze ans, je montai de nouveau à Jérusalem et je leur exposai l'Évangile que je prêche parmi les païens, de peur de courir ou d'avoir couru pour rien (Ga 2,1-2). Malgré sa rencontre personnelle avec Jésus (cf. Ac 9, 3-9), bien qu'il ait reçu une mission céleste pour être la lumière des païens (Ac 13, 47), qu'il se permette même de s'opposer à Céphas à Antioche (cf. Ga 2, 11 ), qu'il voyage dans le monde entier (cf. 2 Co 11, 26), qu'il accomplisse des miracles (cf. 2 Co 12, 12) et ressuscite les morts (cf. Ac 20,7-12), peu importe qu'il ait été ravi jusqu'au troisième ciel (cf. 2 Co 12, 2) et qu'il bénéficie de révélations spéciales (cf. 2 Co 12, 1) ou encore qu'il porte en son corps les marques du Christ (cf. Ga 6, 17), qu'il écrive des lettres inspirées par l'Esprit Saint, même s'il a passé sa vie à annoncer Jésus, se dépensant plus que quiconque (cf. 1 Co 15, 10)... malgré tout cela, il monte à Jérusalem pour se soumettre à l'examen d'une assemblée synodale qui n'est pas plus apte que lui, culturellement , afin d'entendre s'il se trouve ou non sur la bonne voie, s'il doit continuer ou faire marche arrière...
Peut-être Pierre n'était-il pas aussi intelligent et cultivé que lui. En outre, l'équipe de Paul était bien mieux préparée que celle de Céphas... Cependant, il reconnaît et accepte l'ordre établi par Jésus lui-même et admet que rejeter les apôtres serait synonyme d'avoir couru pour rien (Ga 2,2). Au lieu de partir sur un chemin indépendant ou d'abandonner la communauté chrétienne, il rejoint humblement les archiapôtres de Jérusalem. Le fait que Paul reconnaisse le rôle de Pierre en l'appelant « Céphas »,la pierre que Jésus a choisie pour bâtir son Église, est très significatif. Jacques, Céphas et Jean nous tendirent la main, à moi et à Barnabé, en signe de communion (Ga 2, 9). Se donner la main signifie se mettre au service les uns des autres, chacun avec son charisme et son ministère, pour le bien de toute l'Église. Le résultat, c'est la communion :
2. Communauté avec les siens
Paul est né à la vie nouvelle comme un membre abortif, et il souffre dans sa chair d'être séparé du corps. Ses cinq années d'exil ont laissé une cicatrice profonde. Mais une fois le retour amorcé, grâce à son ami Barnabé, il s'intègre à la communauté d'Antioche, d'où il vient et où il retournera toujours. Lorsque son ministère devient itinérant, sa communauté se transforme également. Parmi ses frères les plus fidèles se distinguent Timothée, Tite, Luc et Silas. Cette communauté est bien le signe marquant l'instauration du Royaume, car l'amour de Dieu, répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint, y apparaît de manière tangible. « Apôtre indépendant » est un terme antinomique.
IV Conclusion
La course apostolique comporte des règles aussi sensées que rigoureuses. Celui qui ne les respecte pas est disqualifié (cf. I Co 9,27) et jamais n'arrive au but ni ne reçoit la récompense. Il y a toutefois pire que d'être éliminé. En effet, celui qui ne court pas conformément aux règles du jeu devient un ennemi de l'Évangile (cf. Rm II, 28).
VII
PROFIL DE L’ATHLETE
I IDENTITE
La première condition pour réussir dans la vie est de savoir clairement qui on est. Tant que le profil de la personnalité reste obscur, l’être ne peut construire solidement sa vie, encore moins accomplir de mission apostolique. La véritable sagesse repose sur l'essence de la personne. Paul réalise l'album photo de son identité par les dix-neuf fois où il parle de lui-même : Il part de ses racines sociales et religieuses: né dans une ville illustre, sa grande fierté est toutefois de pouvoir être considéré comme descendant d'Abraham, outre son appartenance héréditaire à la famille pharisienne. Il accepte ses limites en reconnaissant être de chair, vendu au pouvoir du péché, bien que la grâce de Dieu n'ait pas été vaine à son égard; au contraire, elle a surabondé. Il affirme surtout être un véritable apôtre. Bien que, d'un côté, il se considère indigne de ce nom (parce qu'il a persécuté l'Égli¬se), il admet cependant faire honneur à son ministère (parce qu'il a travaillé plus que tous les autres). Sans s'estimer inférieur aux « archiapôtres », il n'en tire pas non plus d'orgueil puisqu'il termine en disant: Lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort. Bien qu'ayant été élevé au troisième ciel, il est aussi le plus grand de tous les pécheurs. Il sait qu'il a reçu une vocation particulière: il a été mis à part dès le sein maternel pour annoncer l'Évangile (cf. Ga I, 15; I Co I, 17), gratuitement (cf. 2 Co 11,7), aux païens (cf. Ga I, 16), aux pauvres (cf. Ga 2, 10) et là où il n'avait pas encore été annoncé (cf. Rm 15,20). Conscient de ses qualités et de ses charismes, notamment une intelligence particulière ( cf. 2 Co 6, 6 ; 8, 7 ; II, 6), il reconnaît aussi que sa présence physique laisse fort à désirer par rapport aux modèles grecs de culture physique (cf. 2 Co 10, 10). Enfin, il résume sa vie en intégrant deux aspects :
C'est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis (I Co 15, 10).
Lorsque l'on porte atteinte à son identité avec l'arme de l'adulation ou du mépris, Paul garde le même équilibre quant à son essence :
- En 58, à Césarée maritime, l'avocat Tertullus, présentant Paul avec mépris, assure au gouverneur Félix: « Cet homme, nous l'avons constaté, est une peste ». La peste était la pire épidémie de l'antiquité; elle décimait des peuples entiers et rien ne pouvait l'enrayer. C'était à peu près ce que le SIDA est pour nous. L'Apôtre était considéré comme le SIDA de la société. Immédiatement après, ce même avocat flatte toutefois Paul en affirmant qu'il est un meneur du parti des Nazaréens (cf Ac 24, 5). En réalité, Paul n'est ni un pestiféré ni un meneur.
- À Malte, lorsque Paul est mordu par une vipère, les indigènes le soupçonnent d'être un assassin en fuite et s'at¬tendent à le voir mourir sous leurs yeux à cause du venin. Comme rien ne se passe, ils changent totalement de comportement et déclarent que c'est un dieu (cf. Ac 28,3-6). Paul sait qu'il n'est ni l'un ni l'autre.
- À Iconium les chefs le maltraitent et le maudissent, mais il échappe au déluge de pierres lancées par la foule en colère et se réfugie en Lycaonie avec Barnabé (cf. Ac 14, 5-6). Après la guérison d'un paralytique, les gens commencent à crier que les dieux eux-mêmes sont descendus sur terre. Même les prêtres amènent des taureaux ornés de guirlandes pour leur offrir un sacrifice. Paul ne supporte pas qu' on le prenne pour un dieu et refuse ouvertement ce titre, déchirant ses vêtements en signe de désaccord total, car il ne veut pas prendre une place qui n ' est pas la sienne (cf. Ac 15, 5-15). Paul sait qui il est, mais le plus important et le plus salutaire est qu'il se contente d'être ce qu'il est en avouant : J'ai appris à me suffire en toute occasion (Ph 4, Il )1. On ne peut pas bâtir une vie saine tant qu'on ne s'accepte pas soi-même. Gardant cet objectif à l'esprit il recommande de ne pas se surestimer plus qu'il ne faut, afin de ne pas échouer (cf. Rm 12,3) mais n'accepte pas non plus le mépris des autres afin de ne pas éprouver de complexes (cf. Tt 2, 15). De cet équilibre dépend une personnalité mûre.
II. Vision du plan de Dieu
Paul a autorité pour transmettre la volonté de Dieu aux autres, parce qu'elle lui a été révélée : Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité (I Tm 2,4). L'Apôtre agira toujours selon ce principe qui dépasse toute frontière, raciale, temporelle et géographique. La vision entraîne l'action et inversement. Paul n'a pas tout compris clairement dès le départ et il n'a pas tout réussi dès le début. Damas l'a mené directement à l'apostolat mais celui-ci, à son tour, élargit ses perspectives afin que son travail soit toujours plus fécond. Au fur et à mesure qu'il évangélise, son expérience s'approfondit et les horizons de sa vie s'élargissent.
Paul de Tarse est l'un de ces génies ayant découvert que le plan de Dieu n'a pas de frontières. Il est en outre capable de l'annoncer aux autres et de leur communiquer son enthousiasme, afin qu'ils collaborent à l'édification du Royaume de Dieu: ... Je vous ai annoncé toute la volonté de Dieu (Ac 20,27).
III. Un seul objectif: un soleil à cinq rayons
Ce qui fait qu'un homme forge l'histoire est qu'il a un objectif précis et que toute son énergie tend vers ce but. Sans cette dimension, il reste à la merci des vents changeants des doctrines et des nouveautés. Si l'athlète parvient à se concentrer totalement il se trouve déjà dans l'antichambre du succès. Le problème de la culture occidentale est que nos intérêts sont très dispersés, et c'est ce qui nous rend si médiocres. Nous ne sommes pas spécialisés dans un point précis qui nous identifie au concert de l'histoire. Pour laisser une trace de notre passage dans ce monde nous voulons jouer de tous les instruments de la symphonie, au lieu de nous concentrer sur l'un d'entre eux. Le canard sait nager, marcher et voler, mais il reste médiocre dans chacune de ces trois activités. Il ne volera jamais avec la puissance de l'aigle ou la majesté du condor. La maladresse de sa démarche contraste avec l'élégance de la gazelle ou la rapidité du léopard. Il ne nage pas non plus aussi gracieusement que le dauphin. Beaucoup désirent être des canards, jouant de tous les instruments de l'or¬chestre mais incapables d'être le soliste du concert.
La vision permet de toujours garder l'objectif en tête sans s'écarter ni à droite ni à gauche. L'équilibriste qui marche sur la corde raide ne regarde pas où il marche parce qu'il pourrait tomber. Son regard doit être fixé sur la fin du parcours. La vision nous recentre sur les valeurs que nous recherchons. L'auteur de l'Épître aux Hébreux nous révèle ainsi son secret pour parvenir au but : Nous devons courir avec constance. . . fixant nos yeu.x sur Jésus (He 12, 1-2).
Vingt ans après sa conversion (an 57-58), Paul définit parfaitement l'orientation de sa vie en une phrase lapidaire qui ne laisse pas de place au doute : Le Christ ne m'a pas envoyé baptise1; mais annoncer l'ɬvangile (1 Co 1, 17). Phrase tellement déterminante qu'elle devient l'impératif catégorique de Paul; ainsi il s'écrie : Oui, malheur à moi si je n'annonçais pas l'Évangile ! (1 Co 9, 16). Nous pourrions représenter le message paulinien par un soleil avec cinq rayons qui partent du centre unique.
1. Au centre: l'Évangile de la grâce
En étudiant à la loupe l'expérience de Paul, on voit qu'elle est concentrée sur l'Évangile de Jésus, qu'il va jusqu'à appeler mon Évangile (cf Rm 2, 16 ; 16, 25) ou notre Évangile (cf 1 Th 1, 5) parce qu'il l'a assimilé et s'identifie à sa mission. Son activité centrale est d'annoncer Jésus et la Bonne Nouvelle (cf. Ac 17, 18 ; Ga 1, 16 ; Ac 14, 7). II résume lui même toute son activité apostolique lorsqu'il confesse aux anciens d'Ephèse : ... Le ministère que j'ai reçu du Seigneur Jésus (c'est de) rendre témoignage à l'Évangile de la grâce de Dieu (Ac 20, 24).
2. Les cinq rayons
Le cœur du message de Paul est l'Évangile de la grâce. De ce centre partent cinq rayons, à savoir les cinq manières dont l'Apôtre se réfère au seul et unique Évangile :
- L'Evangile du salut (cf. Ep 1, 13) : l'Annonce comporte en elle-même la puissance de Dieu engendrant le salut de quiconque croit (cf. Rm 1,16). C'est la Bonne Nouvelle que nous avons été sauvés par la mort et la résurrection de Jésus.
- L'Évangile de la paix (cf. Ep 6, 15) : nous vivions brouillés avec Dieu à cause du péché et condamnés à la mort éternelle. Mais maintenant nous sommes en paix avec Dieu. Grâce au sang du Christ-Jésus, la cédule de nos dettes, qui nous était contraire, a été effacée (cf. Co12, 14) et nous ne sommes plus débiteurs envers Dieu. Christ est notre paix (cf. Ep 2, 14).
- L'Évangile de Dieu (cf. Rrn 1, 1 ), de la gloire de Dieu (cf. 1 Tm 1, II) ou encore de la gloire du Christ (cf. 2 Co 4,4) : Dieu prend l'initiative d'annoncer cette Bonne Nouvelle: voici venir les temps où sa victoire sur la loi, sur le péché et sur la mort sera manifestée. La gloire de Dieu est sa manifestation salvifique. L'Évangile de la gloire annonce donc que l'homme est délivré du mal, et c'est pour cela que le Nom de Dieu est glorifié. La glorification du Nom de Jésus, Nom qui est au-dessus de tout nom, s'accomplit par son obéissance jusqu'à la mort, et à la mort sur une croix (cf. Ph 2, 8).
- Évangile des incirconcis (cf. Ga 2, 7)2 : c'est la Bonne Nouvelle qu'il n'est pas nécessaire d'être circoncis ni d'observer toute la loi juive pour être chrétien à part entière et appartenir au peuple de Dieu.
- Évangile de la Promesse (cf. Ac 13, 32) : le salut ne s'achète ni ne se mérite; il est l'accomplissement d'une alliance que Dieu a faite avec ses amis en donnant sa Parole fidèle.
L'Évangile de Paul est unique, il n'y en a pas d'autre, mais ses différentes nuances permettent d'obtenir une vision plus globale de ce que signifie « l'Évangile de la grâce» .
IV. Moteur: ma vie, c'est le Christ
Il faut être motivé pour réaliser quelque chose de transcendant. Certains appellent cette motivation mystique ou spiritualité. Telles sont les valeurs qui confèrent l'énergie et l'orientation de l'action. Elles s'expriment parfois par un Slogan ou un logotype. Ce qui est certain, c'est que plus cette mystique est explicite, plus elle est motivante.
De même que chaque pays possède son drapeau où les couleurs et les emblèmes synthétisent l'esprit, l'histoire et les idéaux de ce peuple, de même Paul court avec un étendard qu'il a synthétisé en un slogan : Pour moi, la vie, c'est le Christ (Ph 1,21). La personne de Jésus de Nazareth a séduit Paul de manière telle qu'elle recouvre tout son être, avec ses espérances et ses aspirations, son cœur, son intelligence et sa volonté. Tout le passé et tout l'avenir de l'Apôtre gravitent autour de Jésus. L'axe de rotation de son existence est ce soleil de justice qu'est le Christ de Dieu. C'est son unique point d'attraction et ce qui donne un sens à toute sa vie, même à ses souffrances. Paul de Tarse est fasciné par la figure messianique de Jésus de Nazareth qui lui est apparu sur le chemin de Damas. Il est totalement amoureux de Celui qu'il avait auparavant combattu à mort. Mais le Jésus qui a séduit Paul est le Jésus de la Croix, aussi déclare-t-il résolument: Je n'ai rien voulu savoir parmi vous, sinon Jésus Christ, et Jésus Christ crucifié (cf 1 Co 2,2), scandale pour les Juifs et folie pour les païens, mais pour ceux qui sont appelés, il est puissance de Dieu et sagesse de Dieu (1 Co 23-24). C'est pourquoi il ne se glorifie de rien sinon dans la croix de notre Seigneur Jésus Christ (cf Ga 6, 14). Ce qui fascine Paul, c'est qu'une personne (et quelle personne !) s'est livrée à la mort pour lui, ou mieux, à sa place : Il m'a aimé et s'est livré pour moi (Ga 2, 20).
Il ne peut résister à un si grand amour et répond sans réserve ni condition. Des années auparavant il avait déclaré une guerre à mort dans laquelle le vaincu devait mourir. Lorsque l'orgueilleux pharisien gît à terre, vaincu, il reçoit la révélation que Jésus est mort sur la croix à sa place, pour que lui même ait la vie. Aussi déclare-t-il :
Ce n'est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi (Ga 2,20). Paul de Tarse a fondu sa vie dans celle de Jésus de Nazareth. Pour exprimer cette nouvelle réalité il invente, comme tout amoureux, un nouveau langage'. II crée ainsi des mots qui n'existaient pas en grec, et plus particulièrement ces mots apposés du préfixe « avec » ( « syn » en grec) : La vie « dans le Christ » signifie que nous souffrons avec lui (cf. Rm 8, 17) et que nous sommes crucifiés avec lui (cf. Ga 2, 19). Nous participons à sa pâque, morts avec lui (cf. 2 Tm 2, 11) et ensevelis avec lui (cf. Rm 6,4) mais, grâce à sa victoire sur la mort, nous avons aussi été ressuscités avec lui (cf. Ep 2, 6) et siégeons aux cieux avec lui (cf. Ep 2, 6). Nous sommes glorifiés avec lui (cf. Rm 8, 17) et revivons avec lui (cf. Co12, 13). La vie se résume à être un même être avec lui (cf. Rm 6, 5), c'est-à-dire vivants avec lui (cf. 2 Tm 2, 11) en tant que cohéritiers (cf. Rm 8, 17). Dans ce même esprit il recommande aux Romains : Revêtez-vous du Seigneur Jésus Christ (Rm 13, 14). Il exhorte les Philippiens d'avoir entre eux les mêmes sentiments qui sont dans le Christ-Jésus (Ph 2, 5), les Corinthiens d'être la bonne odeur du Christ (2 Co 2, 15) et pousse les Ephésiens à constituer cet homme parfait qui réalise la plénitude du Christ (Ep 4, 13). Aux Colossiens il résume sa pensée en concluant : Que le Christ soit tout en tous (Col 3, Il).
V. Persévérance
L'une des qualités essentielles de tout sportif est sa capacité de résistance tant durant les entraînements pénibles qu'à l'heure de la compétition. Pas question de faiblir ni d'aban¬donner en plein milieu du combat. Celui qui ne respecte pas cette condition ne peut même pas envisager de devenir un athlète, car la ténacité est à l'athlète ce que l'eau est au poisson. La persévérance est le prix à payer pour obtenir la récompense des vainqueurs. L'inconstance, fille de la loi du moindre effort, est l'une des pires plaies de notre société hédoniste. Nous vivons à une époque où tout est automatique. Il suffit d'appuyer sur un bouton pour ouvrir les portes, envoyer des messages à l'autre bout du monde et donner des ordres à un ordinateur. La vie est cependant différente, car elle comporte un processus lent qui exige patience et constance. Paul est persévérant dans sa tâche. Il ne s'écarte ni à droite ni à gauche, car il possède une valeur absolue qui se trouve au-dessus des difficultés et des obstacles : Pourvu que je mène à bonne fin ma course (Ac 20,24).
Il conclut donc :
Quel que soit le point déjà atteint, marchons toujours dans la même ligne (Ph 3, 16). Pour atteindre ses objectifs, rien ne l'arrête, comme lorsqu'il organise la collecte en faveur de la communauté de Jérusalem, bien qu'il risque d'être mal compris ou rejeté (cf. I Co 16, 1-4). Il monte à Jérusalem, même s'il sait que sa vie est en danger (cf. Ac 21, 11-13).
VI. Conclusion
Paul, athlète du Christ, remplit les cinq conditions du profil des vainqueurs: il sait qui il est et pourquoi il est venu dans ce monde. Il a un seul objectif dans sa course (annoncer l'ɬvangile de la grâce), possède la vision organique de la réalité et une bannière qui lui donne courage. Il paie aussi le prix de la persévérance.
- VIII -
LE KERYGME DE PAUL
L'Évangile de Paul n'est autre que l'Évangile unique de Notre Seigneur Jésus Christ. Paul en a pris connaissance par trois sources qui se complètent et qui ont chacune une valeur en elle-même.
I Trois sources d'information
1. Les Écritures
L'Écriture, apprise aux pieds de Gamaliel et méditée dans la synagogue, est la terre fertile où Dieu a semé le Message du salut.
La connaissance de la Bible et de l'histoire du salut furent des éléments essentiels pour connaître le plan du salut. (Le mystère de Dieu) enveloppé de silence aux siècles éternels est aujourd'hui manifesté par des Écritures qui le prédisent (Rm 16, 25-26).
2. Révélation directe de Dieu
L'Évangile que j'ai annoncé n'est pas à mesure humaine : ce n'est pas non plus d'un homme que je l'ai reçu ou appris, mais par une révélation de Jésus Christ (Ga 1,11-12).
« L'Écriture seule ne suffit pas, car sans l'Esprit Saint elle serait lettre qui tue » (Thomas d' Aquin). À Damas, puis sous diverses formes, Dieu lui révèle le mystère salvifique en Jésus de Nazareth, le Fils de Dieu : Celui qui, dès le sein maternel, m'a mis à part et appelé par sa grâce daigna révéler en moi son Fils (Ga 1, 15).
3. La tradition apostolique
Je vous ai transmis en premier lieu ce que j'avais moi-même reçu ... (1 Co 15,3). Paul fut instruit par le disciple Ananie et par l'apôtre Barnabé. La Révélation et ses connaissances bibliques se rejoignirent et enrichirent ces quinze jours passés avec Céphas à Jérusalem (cf. Ga 1, 18). Beaucoup d'autres personnes contribuèrent également à approfondir sa connaissance du dépôt de la foi (cf. 1 Co 11,2).
II. Six thèmes enchaînés
Avec ces trois ingrédients, Paul formule son kérygme (message) composé de six points fondamentaux :
1. l'amour de Dieu
Pour Paul, l'économie du salut provient de l'amour de Dieu. Aussi affirme-t-il : Dieu notre Père nous a aimés et nous a donné, par grâce, consolation éternelle et heureuse espérance (2 Th 2, 16). Dieu nous aime « dans le Bien-Aimé », à savoir du même amour dont Il aime son Fils unique, Jésus. « L'homme est la seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle-même », car il a été créé à son image et à sa ressemblance'.... Sa grâce dont Il nous a gratifiés dans le Bien-Aimé (Ep I, 6).
Le salut provient de l'amour de Dieu, qui veut que tous les hommes soient sauvés: Dieu est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont Il nous a aimés, alors que nous étions morts par suite de nos fautes... (Ep 2, 4-5). Son amour dépasse tout ce que nous pouvons concevoir. Dieu lui-même nous donne la preuve de son amour, puisque Jésus Christ est mort pour nous alors que nous étions encore pécheurs (cf. Rm 5,8). Une nouvelle alliance, éternelle, a été scellée et désormais rien ni personne ne peut nous séparer de l'amour de Dieu manifesté dans le Christ-Jésus. Même pas la mort, ni aucune créature terrestre ou céleste.
2. Le péché de l'homme
À l'amour de Dieu Paul oppose un élément qu'il décrit durement, avec des teintes très sombres: Juifs et Grecs, tous sont soumis au péché (cf. Rm 3, 9).
Ainsi, il n 'y a pas de juste, pas un seul (cf. Rm 3, 10). Et si par la faute d'un seul, la multitude est morte (cf. Rm 5, 15), tous ont donc péché et sont privés de la gloire de Dieu (cf. Rm 3,23), car le salaire du péché, c'est la mort (cf. Rm 6,23). Cependant, le pire châtiment du pécheur consiste à être « abandonné par Dieu ». C'est un tel drame qu'il le répète trois fois dans son épître aux Romains (cf. Rm 1, 24 ; 26 ; 28). Cela signifie être livré à ses propres ressources, sans l'aide ni la protection divine, dans la lutte contre le mal, le péché et la mort. Paul lui-même a traversé le sombre tunnel du péché. J. Jeremias écrit: « A Damas, il prend conscience de l'ef¬froyable nature du péché. Il avait déjà une notion de la sainteté de Dieu et cependant, il refusait d'admettre son péché, car il s'estimait irréprochable envers la loi. Mais il se heurte de plein fouet à son blasphème, et pas contre n'importe qui, mais contre le Messie ». Il a lutté contre le plan divin et a tenté de détruire l'Église de Dieu, comme l'avait prévenu son sage maître Gamaliel. Cela le conduit à la terrible expérience de découvrir son péché et de se confesser comme le plus grand pécheur qui ait jamais existé.
Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu (Rm 3,23).
Bien que l'avenir soit sombre puisque tous, Juifs comme Grecs, sont sans excuses devant la colère de Dieu (cf. Rm I, 18 ; 3, 20), il y a là un rayon de lumière qui indique le chemin. Avant la disgrâce universelle il y avait un insondable dessein de Dieu, qui a enfermé tous les hommes dans la désobéissance pour faire à tous miséricorde (cf Rm II, 32).
3. La proposition de salut
Les fausses voies du salut
L'homme cherchait comme à tâtons (Ac 17,27) à retourner au paradis perdu. Il chercha tout d'abord en observant les commandements de la loi, mais personne ne peut se justifier devant Dieu par ses propres oeuvres, pour la simple raison que personne ne peut observer la loi dans son intégralité. Celui qui transgresse un précepte viole la loi entière. Aussi la loi ne justifie-t-elle personne (cf. Rm 3,20). En outre, si la loi permettait d'être justifié, envoyer un sauveur n'aurait pas été nécessaire, et le Christ-Jésus serait mort pour rien (cf. Ga 2, 21 ). Tous ceux qui cherchent la justice dans la loi ont donc rompu avec le Christ (cf. Ga 5,4). L'argument de Paul est très simple: si l'homme avait été capable de se sauver de lui-même, il n'aurait pas eu besoin du Christ-Jésus. Admettre un autre moyen de salut humain implique de renoncer à la solution que Dieu offre par son Fils unique. Ainsi, le Christ ne sert à rien pour ceux qui cherchent leur salut par leurs propres moyens. Mais ce qui était impossible par la loi et la circoncision, ou par tout autre moyen de salut, Dieu l'a rendu possible en envoyant son Fils aux pécheurs, afin qu'ils soient sauvés par la grâce.
Le médiateur unique: Jésus Christ
Le message fondamental est le suivant: Dieu veut que tous les hommes soient sauvés (I Tm 2,4), et Il a conçu un dessein par le biais de son Fils Jésus Christ, pour que, par son sang, la rédemption et le pardon des pécheurs soient accordés. II est toutefois clairement établi qu'il n'y a pas plusieurs moyens de salut, parmi lesquels l'homme choisirait selon son goût ou ses préférences. Paul précise très fermement : Unique est le médiateur entre Dieu et les hommes: le Christ-Jésus ( I Tm 2, 5)
La Bonne Nouvelle consiste à annoncer que ce salut est grâce, car il provient de la promesse faite par Dieu et ne dépend pas des oeuvres de la loi : Quiconque croit est justifié par Jésus Christ de toutes les choses dont vous ne pouviez être justifiés par le loi de Moise, (Ac 13, 39). Il faut donc choisir, car si le salut est gratuit, il ne s'obtient pas par les oeuvres :Mais si (le salut) c'est par la grâce, ce n'est plus en raison des oeuvres " autrement la grâce n'est plus grâce (Rm 11,6) Si le salut s'obtenait par les oeuvres ou les mérites humains, il ne serait pas grâce. Et comme il est grâce, l'homme n'a pas de quoi se glorifier, du moins pas au regard de Dieu (cf. Ep 2, 9 ; Rm 4, 2).
Comment se réalise le salut ?
- Par la fidélité et la miséricorde de Dieu- Le salut est avant tout l'accomplissement d'une Promesse divine. Dieu a pris l'initiative de sauver l'homme. Il s'y est donc engagé en promettant à Abraham (cf. He 6, 13) de lui donner un descendant, le Christ (cf. Ga 3, 16), et Il réitère par la suite son alliance avec David (cf. Ac 13, 23). Dieu est donc obligé de respecter sa parole. Lorsque vint la plénitude des temps, Dieu, fidèle à sa parole, suivant sa promesse, a suscité pour Israël Jésus (Ac 13, 23) et, par sa résurrection, la promesse faite à nos pères, Dieu l'a accomplie en notre faveur à nous (Ac 13,33). Ainsi, par la foi en Jésus Christ, nous sommes sauvés et devenons enfants et héritiers (cf. Ga 3,28-29), car nous avons reçu le don gratuit de l'Esprit de la Promesse qui est l'Esprit Saint lui-même (cf. Ga 3,14 ; Ep 1,13). Dieu s'est engagé lui ¬même et, par fidélité envers sa parole donnée, réalise le salut de l'homme entier et de tous les hommes. Le salut n'est donc rien d'autre que l'accomplissement de la Promesse de Dieu. Pas question, cependant, de prétendre au fatalisme, car le salut est le fruit de l'amour divin. L'amour inconditionnel de Dieu dans l' Ancien Testament (Hessed) est appelé « grâce » dans le Nouveau. Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont Il nous a aimés, alors que nous étions morts par suite de nos fautes, nous a fait revivre avec le Christ! C'est par grâce que vous êtes sauvés! - Avec lui Il nous a ressuscités et fait asseoir aux cieux, dans le Christ-Jésus (Ep 2, 4-6).
Son amour de Père, miséricordieux et compatissant, engendre le salut de tous les hommes.
C'est bien par grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi. Ce salut ne vient pas des oeuvres, il est un don de Dieu (Ep 2,8).
- Par la Pâque de Jésus
Quand vint la plénitude des temps, Dieu envoya son fils, né d'une femme, né sujet de la loi, afin de racheter les sujets de la loi (Ga 4, 4-5). Tout comme le peuple d'Israël a été délivré de l'esclavage en cette nuit de pâque lors de laquelle Dieu visita son peuple, la nouvelle Pâque réalise la libération totale de l'humanité. Cette Pâque s'identifie à la personne de Jésus de Nazareth. Il est notre Pâque (cf. 1 Co 5,7). Jésus notre Seigneur fut livré pour nos fautes et ressuscité pour notre justification (Rm 4, 25).
. Par sa mort
Le père Salvador Carrillo affirme que le texte fondamental expliquant le salut est le suivant : Mais maintenant, sans la loi, la justice de Dieu s'est manifestée, attestée par la loi et les prophètes, justice de Dieu par la foi en Jésus Christ, à l'adresse de tous ceux qui croient (..). Car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu ,. et ils sont justifiés gratuitement par la faveur de sa grâce en vertu de la rédemption accomplie dans le Christ-Jésus : Dieu l'a exposé, instrument de propitiation par son propre sang (..). Car nous estimons que l'homme est justifié par la foi sans la pratique de la loi (Rm 3, 21-28). Ce même père commente magistralement ce texte : Maintenant: il s'agit du présent messianique et eschatologique. Sans la loi signifie en marge de la loi, sans avoir besoin de la loi. Le mode passif sont justifiés met l'ac¬cent sur l'aspect passif du salut (pour ce qui est de l'homme). Les expressions gratuitement et par sa grâce mettent l'accent sur la gratuité du salut. Le salut n'est pas une récompense pour les mérites humains mais tout est don de la grâce et de la bienveillance divines2. Paul récuse donc l'idée que l'on mérite ou obtient la justification. Au contraire, c'est la justice qui nous possède : Vous avez été asservis à la justice (Rm 6, 18)3. Ce passage est si sublime que Luther en tomba amoureux et en fit son étendard et son bouclier. Jésus Christ, notre propitiatoire, a été immolé comme notre Pâque (cf. I Co 5, 7). Le propitiatoire (ilasteryon) était la plaque d'or sur laquelle était offert le sacrifice d'expiation pour les péchés. Il portait ce nom parce que l'homme, grâce à l'acte perpétré dessus, se rendait propice à Dieu, tous ses péchés ayant été pardonnés. Jésus lui-même devient notre propitiatoire car ce qui se réalise en lui assure le pardon des péchés. En conséquence, Paul certifie qu'il n'y a donc plus de condamnation pour ceux qui sont dans le Christ-Jésus (cf. Rm 8, I), car la cédule de nos dettes, qui nous était contraire, a été effacée (cf. Co12, 14) puisque le Christ, notre Pâque, a été immolé, et par son sang nous n'avons pas seulement été « lavés » mais aussi sanctifiés et justifiés par le nom du Seigneur Jésus Christ et par l'Esprit de notre Dieu (I Co 6, Il). Celui qui n'avait pas connu le péché, Dieu l'a fait péché pour nous (cf. 2 Co 5, 21) ; Il devint lui-même malédiction pour nous (cf. Ga 3, 13) afin de nous racheter de cette malédiction de la loi. Par un mystère il s'identifie au péché afin qu'en mourant sur la croix, le péché qu'il porte sur ses épaules meure aussi... Paul exprime ainsi en une phrase incisive le centre de notre foi :
Le Christ est mort pour nos péchés (1 Co 15,3).
Non seulement il meurt pour nous, mais à notre place et pour chacun de nous en particulier : Il s'est livré pour moi (Ga 2,20).
II s'est fait obéissant jusqu'à la mort, et à la mort sur une croix (cf. Ph 2, 8). Si, par la désobéissance du premier Adam, tous sont morts, combien plus .par l'obéissance d'un seul, par la grâce d'un seul homme, nous sommes constitués justes et recevons le don du salut par son sang.. Par sa résurrection
Tout ne s'achève toutefois pas sur la croix ou dans le tombeau du Calvaire. La Pâque du Christ forme pour Paul un binôme indivisible. Si sa mort fut si glorieuse, sa résurrection le sera pareillement. II montre tout d'abord ce qui est différent dans la résurrection de Jésus : Dieu l'a ressuscité des morts et il ne doit plus retourner à la corruption (Ac 13,34). Pour Paul, la résurrection est le début de la nouvelle création, à tel point qu'il s'écrie : Si le Christ n'est pas ressuscité, vide alors est notre mes¬sage, vide aussi votre foi (..). Nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes (1 Co 15, 14; 19).
Le dernier Adam a été fait esprit vivifiant (1 Co 15,45).
Grâce à la victoire du Christ sur la mort nous pouvons nous écrier : Où est-elle, ô mort, ta victoire ? (1 Co 15, 55).
Rien ni personne ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu manifesté dans le Christ-Jésus (Rm 8, 38-39). L'oeuvre du salut est avant tout l'oeuvre de l'amour miséricordieux de Dieu qui sauve gratuitement I 'homme. Ce concept n'est pas un concept protestant ni une idée de Luther. C'est l'Évangile de Paul, et quiconque se risque à le réduire est condamné à l'anathème, avec toutes les conséquences que cela comporte, à savoir: être séparé de l'amour du Christ: Si quelqu'un vous annonce un évangile différent de celui que vous avez reçu, qu'il soit anathème! (cfGa 1,9)1.
4. Foi et conversion
Dieu propose à l'homme le don gratuit du salut; l'homme l'accepte et le fait sien par la foi et sa conversion, actes qui rendent ce don présent et agissant. La réponse humaine à la proposition divine. L'homme, devant ce don gratuit, répond par deux actes : croire en Dieu et se détourner des fausses idoles qui supplantent Dieu. Aussi Paul annonce-t-il toujours deux choses; se repentir envers Dieu et croire en Jésus, notre Seigneur (Ac 20,21). Dieu sauve par Jésus Christ mais nous, nous adoptons ce salut par la foi.
Le juste vivra par la foi (Rm 1, 17).
Voilà donc le grand principe paulinien. Le salut se réalise grâce au sang de Jésus Christ et se fait nôtre par la foi, qui n'est pas tant de croire en quelque chose mais en Quelqu'un : en Dieu et en son envoyé, le Christ-Jésus. En effet, dans le Christ-Jésus, ni circoncision ni incirconcision ne comptent, mais seulement la foi opérant par la charité (Ga 5,6).Vous êtes tous fils de Dieu, par la foi dans le Christ-Jésus (Ga 3, 26). Paul définit magistralement ce principe lorsque le geôlier de Philippes lui pose la question la plus importante de toute vie humaine: « Que me faut-il faire pour être sauvé ? » Le prisonnier de l'Évangile lui répond alors : Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé, toi et les tiens (Ac 16,31).
À un autre moment, et davantage sur le mode de la réflexion, Paul écrit la formule ci-après, calibrant chaque détail de ce que nous devons faire devant le don gratuit du salut, obtenu par la mort et la résurrection du Christ-Jésus : Si tes lèvres confessent que Jésus est Seigneu1; et si ton cœur croit que Dieu l'a ressuscité des morts, tu seras sauvé. Car la foi du cœur obtient la justice, et la confession des lèvres, le salut (Rm 10, 9-10). Naturellement, il ne donne pas là une recette mais décrit ce qu'est la foi, tant au plus profond de l'homme (symbolisé par le cœur) que dans ce qu'il a de plus extérieur (représenté par les paroles qui sortent de la bouche). Dans son discours à Antioche il provoque les juifs de la synagogue : L'entière justification que vous n'avez pas pu obtenir par la loi de Moise, c'est par lui que quiconque croit l'obtient (Ac 13,38-39).
« Le kérygme, excluant tout autre moyen de salut, montre que celui-ci ne peut s'obtenir que par la foi en Jésus Christ. »
L'unique sauveur, c'est Jésus. La foi est le moyen par lequel le salut obtenu par Jésus il y a deux mille ans devient nôtre. Mais le lien par lequel nous nous approprions les fruits de la mort et de la résurrection du Christ-Jésus, c'est le baptême par lequel nous revêtons le Christ (cf. Ga 3,27 ; Co12, 12). Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous vivions, nous aussi, dans une vie nouvelle (Rm 6,4). Ainsi Dieu, dans sa providence et sa miséricorde, offre à l'homme ce sacrement qui l'incorpore à la pâque rédemptrice du Christ-Jésus. Comment alors concilier la grâce du salut et la foi ? Paul résume très simplement :
C'est bien par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi (Ep 2, 8).
Mais pas uniquement la foi, parce qu'alors elle deviendrait la « bonne oeuvre » de l'homme (Luther, qui luttait tant contre le mérite salvifique des bonnes oeuvres, est précisément tombé, comme il le raconte souvent, dans ce qu'il critiquait). Sur ce point le commentaire de Bultmann concernant la foi est plus précis: « elle naît de l'écoute de la Parole et n'est pas une oeuvre mais une manière de vivre ». Aussi le salut ne s'ob¬tient-il pas uniquement par la grâce, il faut aussi que l'homme accepte ce don du salut.
La foi opère par la charité, sinon ce n'est pas la foi (cf. Ga 5, 6). Paul, après avoir décrit ce merveilleux mystère de notre salut gratuit grâce à la mort et la résurrection du Christ-Jésus, dans les cinq premiers chapitres de son Épître aux Romains, montre dans sa seconde partie comment vit une personne qui a véritablement été sauvée par Jésus Christ. L'équation pourrait être la suivante: grâce + foi = salut + oeuvres qui manifestent le salut. Conséquences du salut: innocents, fils, héritiers
- Innocents: Dans le jugement où nous allions payer de notre mort à cause de notre péché, Jésus meurt pour nous (à notre place) ; en ressuscitant, il nous ressuscite avec lui. Dieu le Père prononce alors le jugement de l'homme condamné à cause de son péché et méritant la mort : parce qu'il a été racheté par le sang de son Fils, l'homme est déclaré innocent ! Il n y a donc plus maintenant de condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus, parce que (Jésus) a effacé la cédule de nos dettes, qui nous était contraire (Rm 8, 1 ; Co12, 14).
- Fils: Nous devenons aussi ses enfants, grâce à l'esprit de fils adoptif. Nous participons de l'esprit de filiation de Jésus et pouvons, à juste titre, nous dire enfants de Dieu, car nous le sommes (cf. Rm 8, 14).
Et la preuve que vous êtes des fils, c ' est que Dieu a envoyé dans nos coeurs l'Esprit de son fils qui crie: Abba, Père! Aussi n'es-tu plus esclave, mais fils (Ga 4,6-7).
- Héritiers: Puisque nous sommes enfants nous héritons automatiquement de toutes les bénédictions messianiques.
Enfants, et donc héritiers ," héritiers de Dieu, et cohéritiers du Christ (Rm 8, 17). En tant qu'enfants, nous avions part à l'héritage, lequel se divisait entre le premier-né et tous les autres enfants. Deux tiers de la fortune revenaient au premier-né, et le reste était réparti entre les autres frères, les femmes étant exclues. Dans ces circonstances, l'héritage du Royaume serait tout d'abord revenu à Jésus Christ, le premier-né d'une multitude de frères (Rm 8, 29), et le reste aurait été divisé entre les autres frères, qui auraient eu chacun une très petite part. Mais il n'en va pas ainsi, car non seulement nous sommes héritiers de Dieu, mais aussi « cohéritiers du Christ-Jésus » ; l'héritage du premier-né nous revient donc également. En outre, il n'est plus réservé aux hommes uniquement: dans le Christ-Jésus il n'y a plus ni hommes ni femmes, car tous nous ne faisons qu'un dans le Christ-Jésus (cf. Ga 3,28). L'Esprit Saint de la Promesse constitue les arrhes de notre héritage (Ep I, 13-14).
L 'héritage n'est pas quelque chose, mais bien quelqu'un, l'Esprit Saint lui-même qui nous a marqués de son sceau (2 Co 1,22). La vie dans l'Esprit: comment vit le sauvé
Si le juste vit par la foi, sa vie doit avoir les caractéristiques suivantes :
- Il est mort au péché et vivant à Dieu dans le Christ-Jésus (cf. Rm 6, Il). Délivré du péché, il tourne le dos aux idoles qui supplantent Dic.
- Il se montre digne de l'Évangile du Christ (cf. Ph 1,27), étant revêtu du Seigneur Jésus (cf. Rm 13, 14). Plus que cela, il pourra un jour arriver à dire: Ce n'est plus moi qui vis, mais c'est le Christ qui vit en moi (Ga 2, 20).
- Il a l'attitude de « plus que vainqueur », grâce à l'amour de Dieu (cf. Rm 8,37), avec l'espérance que tout est possible avec la force du Christ (cf. Ph 4, 13). Aussi se réjouit-il toujours dans le Seigneur (cf. Ph 4, 4) puisque tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu (cf. Rm 8,28).
- Il est une créature nouvelle (cf. 2 Co 5, 17). Tout ce qui est vieux a disparu et sa vie, et à cause de cela sa vie comme sa mort appartiennent au Seigneur (cf. Rm 14, 8). Il est libéré du fardeau de toute condamnation qui pesait sur sa conscience, car il est désormais en paix avec Dieu (cf. Rm 8, I).
- Il chemine dans l'Esprit, sans être débiteur de la chair, mais en vivant le salut dans l'espérance (cf. Rm 8,12 ; 24).
- Il possède la liberté des enfants de Dieu, car le Christ nous a délivrés, afin que nous soyons libres (cf. Ga 5, I ; 6). Aussi la règle ultime de son comportement est la voix de sa propre conscience (cf. Rm 14, 5), sans toutefois prendre comme prétexte la liberté glorieuse des enfants de Dieu pour satisfaire les désirs de la chair (cf. Ga 5, 13) ni tomber dans le libertinage, car les oeuvres de la chair s'opposent aux oeuvres de l'Esprit (cf. Ga 5, 17)
- Tout cela ne peut toutefois se vivre de manière isolée ou individuelle. Il faut rester dans l'unité de l'Esprit, dans un seul corps et en un seul esprit, avec une seule foi et un seul baptême, un seul Dieu et un seul Seigneur, revêtu de l'amour et de la paix qui sont le lien de toute perfection (cf. Ep 4, 5-6 ; Col 3, 14).
Ces signes montrent l'authenticité de la foi. Sans eux, la foi se réduirait à une idéologie ou à une formule magique.
5. L'Esprit Saint, sceau de garantie
Ceux qui ont cru en l'Évangile du salut, Dieu les marque du sceau de l'Esprit Saint de la promesse (cf. Ep 1, 13), qui n'est rien d'autre que l'amour de Dieu répandu dans nos cœurs (cf. Rm 5, 5). Il ne nous est pas donné un esprit d'es-clave pour retomber dans la crainte mais un Esprit de fils adoptif pour pouvoir prononcer quatre mots et surtout pour en vivre le contenu :
- Abba - Père: Nous avons reçu un Esprit de fils adoptif qui nous permet de nous adresser à Dieu comme notre papa (cf. Rm 8, 15). La preuve que vous êtes des fils, c'est que Dieu a envoyé dans nos coeurs l'Esprit de son Fils qui crie: Abba ! (Ga 4,6) afin d'être délivré de la crainte.
- Kyrios - Seigneur: Nul ne peut dire: « Jésus est Seigneur » si ce n'est avec l'Esprit de Dieu (cf. 1 Co 12, 3). C'est ce même Esprit qui nous rend capables d'annoncer que Jésus est le Seigneur du ciel et de la terre, et surtout de vivre dans sa seigneurie.
- Soma- Corps: l'Esprit nous conduit aussi à reconnaître que nous formons un seul corps dans le Christ-Jésus, en tant que membres les uns des autres (cf. Rrn 12,5). C'est grâce à l'Esprit du Christ ressuscité que nous vivons l'unité du corps, où existent divers charismes et ministères, et que nous sommes unis par un seul et même Esprit.
- Maranatha - Viens, Seigneur: L'Esprit nous pousse à espérer et à préparer le retour de notre Seigneur Jésus Christ dans la gloire (cf. 1 Co 16,22). Le regard fixé sur les choses d'en-haut (cf. Col 3, 2), nous oeuvrons pour l'édification du Royaume de Dieu sur la terre, tout en priant pour que Jésus revienne, rempli de la puissance de Dieu, pour accomplir l'reuvre du salut.
Le rôle de l'Esprit, qui rend présent le salut du Christ, est si déterminant que Paul conclut : Qui n'a pas l'Esprit du Christ ne lui appartient pas (Rom 8, 9).
6. La communauté où se vit le salut
L'Esprit nous pousse toujours à reproduire entre nous l'unité de la Trinité : La grâce du Seigneur Jésus Christ, l'amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit soient avec vous tous (2 Co 13, 13). Le salut ne se réduit pas à un ticket permettant d'entrer dans un paradis lointain; il est communion avec la vie de Dieu qui demande de vivre dans ce monde le Royaume de Dieu, Règne de justice, paix et joie dans l'Esprit Saint (cf. Rm 14, 17). Nous sommes le Corps du Christ (cf. 1 Co 12, 27), dont les fondements sont les apôtres et les prophètes (cf. Ep 2, 20), avec un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, par tous et en tous (cf. Ep 4, 5-6). La communauté chrétienne est le milieu dans lequel nous vivons et montrons au monde que l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint, avec divers dons et ministères, en vue de la construction du Corps du Christ, au terme de laquelle nous devons parveni1; tous ensemble, à ne faire plus qu'un dans la foi et la connaissance du Fils de Dieu, et à constituer cet homme parfait, dans la force de l'âge, qui réalise la plénitude du Christ (Ep 4, 12-13).
III. Conclusion
Le kérygme de Paul est la base et le fondement de la Vie Nouvelle dans le Christ-Jésus. Il est tellement simple qu'il semble simpliste. Paul n'en rougit pas : Je ne rougis pas de l'Évangile : il est une force de Dieu pour le salut de tout homme qui croit (Rm 1, 16). Les éléments de ce kérygme sont disséminés tout au long de ses écrits, mais nous en trouvons la synthèse dans son discours à Antioche de Pisidie (cf. Ac 13,16-41).
- IX -
PARCOURS ET STRATEGIE
Je cours, moi, non à l'aventure (1 Co 9, 26).
L'athlète planifie à l'avance chaque étape de sa course afin de répartir ses forces sur toute la durée du parcours. Pour gagner, il définit son objectif et sa stratégie avant le début de chaque combat. Sans cette préparation il risque toujours d'échouer. S'il gaspille toute son énergie et qu'il ne lui reste plus assez de forces pour la dernière ligne droite, il s'est dépensé en vain. Certains coureurs automobiles poussent tant leur voiture qu'ils grillent le moteur. Question de stratégie. Pourvu que je mène à bonne fin ma course (Ac 20, 24). Paul est parfaitement conscient qu' il faut non seulement prendre un bon départ (cf. Ga 5,7), mais aussi être le premier à toucher au but pour recevoir la récompense. Aussi conseille ¬t-il à ses amis non seulement de courir, mais de courir de manière à remporter le prix (cf 1 Co 9,24). Il existe donc une formule pour gagner: c'est la stratégie. Paul court conformément à un programme qu'il a médité, étudié, et dont le but est de remporter le prix. Son expérience, échecs compris, lui a enseigné la meilleure manière de coopérer au plan du salut. Bien déterminer les principes d'action contribue à la victoire, tant sur un champ de bataille que dans le stade. Ainsi, avant un match de foot, on arrête une tactique pour placer chacun à son poste, définir son rôle et sa relation avec tous les autres. Le match est perdu si l'on ne procède pas ainsi. Toute stratégie repose sur le principe suivant: il ne s'agit pas de courir plus que le ballon, mais de faire courir le ballon pour qu'il rentre dans la zone de points. Il en va de même pour le bon évangélisateur: ce n'est pas celui qui court et s'épuise en parcourant tout le champ de Dieu pour y porter le Message, mais celui qui a conçu un stratagème, afin que ce soit la Parole qui courre jusqu'aux confins de la terre (cf. 2 Te 3, 1 ; Rm 10, 18).
Paul compte quatre étapes successives et progressives dans sa course :
I. le marathon: il prêchait sans relâche
Le marathon s'identifie parfaitement à la longue et inces¬sante tâche apostolique de l'athlète du Christ. Lorsque Paul présente son apologie devant les Corinthiens, il insiste sur ses multiples voyages pour annoncer la Parole de Dieu (cf. Ac 13,2 ; 15,40 ; 18, 18). Ils sont ministres du Christ ? (Je vais dire une folie !) Moi, plus qu'eux. Bien plus par les travaux... Voyages sans nombre... (2 Co 11, 23s).
1. Quand
Lorsque le persécuteur des chrétiens rencontra le Christ vivant, aussitôt il se mit à prêcher Jésus dans les synagogues (Ac 9, 20) car l'amour du Christ le pressait (cf. 2 Co 5, 14). Ayant reçu l'Esprit Saint et ayant été baptisé, « immédiatement » il commença à évangéliser à Damas, y risquant sa vie. Sa tête fut mise à prix, et les portes de la ville étaient gardées jour et nuit pour l'empêcher d'échapper, mais il s'enfuit dans une corbeille descendue le long de la muraille de la ville (cf. 2 Co II, 13). Non pas parce que sa vie était plus importante que l'annonce de l'Évangile, mais parce qu'il fallait la garder pour pouvoir propager le Message. II veut vivre pour évangéliser. Le signe indiquant une conversion, c'est que « tout de suite après » la personne commence à témoigner de son expérience du salut. Elle ne peut s'empêcher de parler de ce qu'elle a vu ou entendu (cf. Ac 4,20). Le nouveau converti prêche jour et nuit (cf. Ac 20, 31), à temps et à contretemps (cf. 2 Tm 4,2). Dans ce premier temps de son apostolat, sa vie ressemble à un marathon sans relâche, dont le but est de répandre la nouvelle de la victoire du Christ-Jésus sur l'armée de l'injus¬tice et du péché. Paul veut que tout le monde connaisse la richesse insondable de la grâce salvifique.
2. Comment
Il communique le Message de diverses manières: il parle aux foules (cf. Ac 14, II) et aux individus en particulier (cf. Ac 13, 6- 7). Il écrit des lettres ou envoie des délégués spéciaux (cf. Ep 6,22 ; ColI, 7) et va jusqu'à se rendre en personne chez les gens. Il parle la langue de ses interlocuteurs (cf. Ac 21, 40) et tire parti des signes des temps (cf. Ac 17, 22). Mais il prie surtout pour les convertis, se souvenant de chacun dans ses prières (cf. Rm 16, 1-16; I Co 1,4).
3.0ù
Paul cherche toujours une porte, même petite, pour annoncer la Bonne Nouvelle. Et dès qu'il trouve une opportunité il la saisit, comme dans l'aréopage d'Athènes lorsqu'il découvre un autel dédié à un dieu inconnu. Nous pouvons également trouver d'autres « aréopages » où il prêche aussi : un vaisseau (cf. Ac 27, 21s), la synagogue (cf. Ac 13,14) ou la place (cf. Ac 17, 17) lui tiennent lieu de chaire pour annoncer la Bonne Nouvelle que Dieu veut que tous les hommes soient sauvés. Il annonce particulièrement la Parole dans les huit grandes capitales: Damas, celle des Araméens (cf. Ac 9, 27), Jérusalem, la capitale religieuse ( cf. Ac 15, 2 ; 20, 22), Antioche, la capitale commerciale ( cf. Ac 14, 26), Athènes, celle de la culture (cf. Ac 17, 15), Corinthe, celle du péché (cf. Ac 18, 1 ), Ephèse, celle de la beauté ( cf. Ac 19), Rome, la capitale politique (cf. Ac 23, Il) et Tarsis, celle des confins de la terre ( cf. Rm 15, 24).
4. A qui
Il porte la Parole aux Juifs et aux païens (cf. Ac 20,21), aux rois et aux princes (cf. Ac 26, 19-23). En privé (cf. Ac 18,7-8 ; 20,20) ou dans les prisons militaires (cf. Ac 21, 34), devant le Sanhédrin (cf. Ac 22, 30-23, 10) ou le procureur Félix (cf. Ac 24, 10-21), dans la maison de César (cf. Ph 4, 22) ou devant le roi Agrippa ( cf. Ac 26, 1-29), il proclame le salut universel et gratuit de Dieu. Il annonce la Parole à un geôlier (cf. Ac 16, 29-34), aux hommes (cf. Ac 19, 1- 7) et aux femmes ( cf. Ac 16, 13). Sa préférence alla toujours aux pauvres (cf. Ga 2, 10). Les seuls auxquels il n'a pas prêché sont les enfants. Son marathon a pour caractéristique de franchir les frontières que les autres n'ont pas franchies (cf. Rm 15, 20 ; 2 Co 10, 16). D'après les calculs, il parcourut plus de quinze mille kilomètres par les voies impériales ou en traversant la « mare nostrum ». Paul ne se limite pas à évangéliser. Il a aussi une mentalité d'évangélisateur qui lui permet de ne jamais perdre une occasion de trouver et proclamer un message évangélique en toutes circonstances. Bien vite cependant le marathon de Paul se transforme en course d'obstacles, en raison des milliers de problèmes auxquels il est confronté à chaque pas. Le signe distinctif du véritable apôtre de Jésus de Nazareth n'est pas son éloquence ou sa sagesse, mais bien de souffrir à cause de l'Évangile. Paul montre cette lettre de créance : Les preuves de mon apostolat ont éclaté au milieu de vous par une patience à toute épreuve... (2 Co 12,12).
Voyons maintenant les souffrances de l'apôtre et la manière de souffrir pour l'Évangile.
1. Les souffrances de l'apôtre
Pour être apôtre, il faut perdre quelque chose à cause de l'Évangile: du temps, de l'argent, la santé, le prestige et toutes sortes de confort. Paul décrit les obstacles qu'il a rencontrés :
- Attaques personnelles: il subit injures, outrages et blasphèmes (cf. 2 Co 12, 10 ; Ac 13, 45). Il fut accusé de vouloir dominer, d'ambition et d'inconstance dans ses plans (cf. 2 Co 1, 15s)l. Alexandre le fondeur lui fit beaucoup de mal (cf. 2 Tm 4, 14). Il souffrit profondément lorsqu'il perdit son meilleur ami Barnabé, à cause de Jean surnommé Marc (cf. Ac 15,39-40). Problèmes à cause de sa prédication: ses frères qui croyaient en la circoncision l'attaquèrent avec une rage telle qu'il alla jusqu'à les traiter de chiens (Ph 3, 2)1. À Ephèse il combattit contre les bêtes (1 Co 15, 32) et en l' an 62 il se dit délivré de la gueule du lion (2 Tm 4, 17) pour nous donner une petite idée de ce qu' il avait pu vivre. Il s'affronta constamment avec les juifs dans presque tous les lieux (cf. 2 Co Il,26), à l'exception de Rome où on l'écouta avec respect (cf. Ac 28, 22). Il fut aussi attaqué et épié par les judéo-chrétiens (cf. Ac 15, 1 ) et même par les autorités apostoliques qui ne croyaient pas à sa conversion (cf. Ac 9, 26-30). II eut de grandes difficultés avec les faux apôtres (cf. 2 Co Il, 13). II dut supporter l'ignominie et la calomnie (cf. 2 Co 6, 8). La prédication de la Croix fut la croix de sa prédication (cf.Ga5,11).
- Problèmes civils à Philippes de Macédoine, où il fut considéré comme un facteur de troubles (cf. Ac 16, 20) qui tenait tout le monde en échec, s'opposant aux décrets de l'empereur en affirmant qu'il y avait un autre roi (cf. Ac 17, 7).
- Crises psychologiques: tribulations accompagnées de crainte, de peur et de timidité ( cf. 2 Co 7, 5 ; 1 Co 2, 3 ). Il finit par croire que les problèmes devenaient insurrnontables et perdit même l'espérance par moments (cf. 2 Co 1,8-9). Il fit l'expérience de l'angoisse (cf. 2 Co 12,10) et de l'ignominie du Crucifié (cf. 1 Co 1,18-20). Un jour, alors qu'il se défendait devant le tribunal, Festus l'interrompit pour lui crier: Tu es fou, Paul! (Ac 26,24).
- Attaques physiques: il fut lapidé et fouetté à maintes reprises (cf. Ac 16, 22 ; 2 Co 11, 24-25).
-Échecs pastoraux: notamment le grand échec à Athènes (cf. Ac 17, 32). Phygèle, Hermogène et Démas l'abandonnèrent (cf. 2 Tm 1, 15 ; 4, 10).
- Sa vocation apostolique fut mise en cause: son ministère, bien que largement connu, fut sérieusement remis en question et même ignoré. On douta de son authentici¬té, et il fut traité d'imposteur qui n'avait pas le droit de se dire apôtre (cf. 2 Co 6, 8-9).
- Dans ses voyages fréquents il dut affronter tous les climats: froid et nudité, tempêtes, trois naufrages, la fatigue inhérente et les assauts des brigands, les crues des rivières, les dangers de la ville et du désert, la faim et la soif (cf. 2 Co 11, 25-29).
-Danger de mort chaque jour et à toute heure (cf. 1 Co 15,30-31 ; 2 Co 11,23) : à Damas (cf. Ac 9, 23), complot pour l'assassiner à Jérusalem (cf. Ac 21, 27). Ensuite, pendant son transfert à Césarée (cf. Ac 25, 2-3) et à Jérusalem, où la foule en colère demanda au tribun : Ôtez de la terre un pareil individu! Il n'est pas digne de vivre! (Ac 22, 22).
- Une grande tristesse et une douleur incessante en son cœur à cause de ses frères juifs qui ne reconnaissent pas Jésus comme le Messie (cf. Rm 9, 1-3).
-L'écharde dans la chair (cf. 2 Co 12,7), sans être précisée davantage, afin qu'elle puisse s'identifier à la plus grande faiblesse ou carence que nous avons tous.
- Problème majeur: la principale préoccupation de l'apôtre n'était rien de tout ce que nous venons d'énu¬mérer mais bien le souci de toutes les Églises (2 Co 11, 28). Veiller à son unité, à sa formation et à son développement jusqu'à ce qu'elle devienne semblable au Christ (cf. Ep 4, 13).
- Sa pire souffrance: cependant, sa pire souffrance fut la trahison des faux frères (cf. Ga 2, 4 ; 2 Co Il, 26) : ceux avec qui il avait mangé et célébré la fraction du pain, ceux qu'il avait choisis et soutenus mais qui ensuite lui tendirent des pièges par-derrière, qui l'espionnèrent pour restreindre sa liberté (cf. Ga 2, 4) ou sortir ses phrases hors de leur contexte et l'accuser ensuite par d'odieuses calomnies (cf. Rm 3,8 ; 5,20 ; Ga 3,22).
2. La patience: une science pour savoir souffrir
La vie de Paul est une course d'obstacles permanente. Il vit cette première condition de l'apôtre: souffrir à cause de l'Évangile. Toutefois, ce n'est pas la douleur en elle-même qui confère à l'apostolat son authenticité, mais bien la manière dont elle est affrontée. L'équation n'est donc pas : je souffre, donc je suis apôtre. La clé se trouve dans la manière dont on supporte la souffrance. Lorsqu'il parle de la constance dans la souffrance (2 Co 6,4 ; Rm 5, 3), cela n'a rien à voir avec la résignation passive face aux situations impondérables de la vie mais se réfère davantage à la « science de savoir souffrir ». Paul nous livre son secret pour apprendre à souffrir, en nous replaçant dans trois villes :
- Damas: le prix d'une grande mission
Toute vocation coûte. Dès Damas, Paul comprend qu'il devra porter un poids énorme (cf. Ac 9, 15-16). Aussi rien ne le surprend: au contraire, il attend que la promesse du Seigneur s'accomplisse. Si l'on souffre en sachant que l'on est en train de payer le prix d'une très grande mission, la perspective change totalement.
- Philippes : la puissance de la louange communautaire Emprisonné avec son compagnon Silas dans le cachot le plus sombre et le plus profond de la ville, pieds et mains enchaînés, ayant été fouettés injustement, ils chantent hymnes et psaumes de louange en pleine nuit. La puissance de la louange ou, plus précisément, de la louange communautaire, est le détonateur qui provoque un tremblement de terre; leurs chaînes se rompent et toutes les portes de la prison s'ouvrent (cf. Ac 16,25-28). Souffrir en chantant des psaumes de louange en communauté : 1e change pas seulement la manière de souffrir mais déclenche aussi la puissance salvifique, car Dieu habite les louanges de son peuple (cf. Ps 22,4).
- La Jérusalem nouvelle: dimension d'éternité
Vision eschatologique. Il découvre que les souffrances du temps présent ne sont pas à comparer à la gloire qui doit se révéler par la suite (cf. Rm 8, 18). Pour un marin, il n 'y a pas de parole plus réconfortante que celle qu'il entend, après plusieurs jours de tempête et de menaces de mort constantes, criée du haut du grand mât: « terre en vue! » À cet instant toute fatigue et tout souvenir des dangers encourus disparaissent. L'exclamation de Paul devant chaque difficulté est: « ciel en vue !!! Je suis près d'obte¬nir la couronne de la justice, et rien ne peut se comparer au surcroît de gloire qui m'attend... » (cf. 2 Co 4, 17). Il est intéressant de noter qu'il écrivit la « lettre de la joie » (Épître aux Philippiens) dans la prison d'Ephèse, au milieu des bêtes, parce qu'il avait la vision de l'éternité. Cette perspective est comme le phare indiquant aux navigateurs qu'ils sont tout près du dernier port.
III. Une course de relais: l'équipe des apôtres
À un moment la maladie empêcha Paul de prêcher dans la ville de Bithynie (cf Ac 16,7). Cloué dans son lit de douleur, I eut l'occasion de méditer sur le fait que la propagation de la Bonne Nouvelle ne pouvait dépendre de sa santé précaire, du temps ou de sa personne, mais qu' elle devait courir indépendamment de tout cela. La course solitaire de Paul se transforme donc en une course de relais pour transmettre le Message à d'autres, afin qu'eux-mêmes le retransmettent à leur tour. Il constitue une équipe d'assistants et les forme pour qu'ils continuent la course. Epaphras porte ainsi la lumière de l'Évan¬gile à Colosse. D'autres ont des missions spéciales, tels Tychique à Ephèse (cf. Ep 6, 21 ), Eraste à Corinthe, Timothée à Thessalonique (cf. 1 Te 3, 1-3), Tite en Dalmatie (cf. 2 Tm 4, 10) et en Crète (cf. Tt 1,5). Remarquons, à juste titre, que ce héraut de l'Évangile reconnaît avoir pu prêcher la Parole à Ephèse parce qu'Apollos le représentait à Corinthe (cf. Ac 19, I). Parallèlement, certains membres de son équipe collaborèrent pour écrire au moins huit de ses treize épîtres. Sans ces assistants, toutes ces lettres que nous attribuons à l'apôtre Paul n'existeraient peut-être pas.
1. Vision: l' évangélisateur forme des évangélisateurs
Paul a compris une vérité fondamentale: l'évangélisateur n'est pas celui qui prêche, mais celui qui forme des évangélisateurs. Lui-même ne parvenant pas à porter la lumière du Christ dans le monde entier, il forme d'autres personnes afin que le Message parvienne jusqu'aux confins de la terre. Il communique cette vision pour que les autres fassent de même. Évangéliser ne se réduit pas à une activité, c'est aussi le fruit d'une vision. La pierre de touche qui distingue un apôtre est sa capacité à former des personnes qui, à leur tour, en forment d'autres.
2. Préférence: former une équipe
La préférence de Paul, comme celle de Jésus, fut de former une équipe d'apôtres de la Parole chargés de continuer sa mission: répandre la Bonne Nouvelle dans le monde entier. Cette tâche passe donc avant toute autre. Paul qui, au début, faisait partie du groupe évangélisateur de Barnabé, constitue désormais sa propre équipe :
- Silas, également appelé Sylvain, avec lequel il écrivit plusieurs de ses lettres (cf. 1 Te 1, 1 ; 2 Te 1, 1), fut le compagnon infatigable de ses voyages et de ses souffrances (cf. Ac 15,22 ; 15,32 ; 17, 14; 18,5).
- Aquilas et Priscille, couple originaire du Pont, qui consacra sa vie à annoncer la Bonne Nouvelle et la risqua même pour lui, tint une place particulière dans le coeur sur de l'Apôtre, jusqu'à la fin (cf. Ac 18, 2 ; 18 ; 26 ; Rm 16, 3 ; 1 Co 16, 19 ; 2 Tm 4, 19).
- Aristarque, Macédonien de Thessalonique, compagnon des tribulations et des prisons, et Jésus, surnommé Justus, consolation pendant sa captivité à Rome, furent les seuls juifs qui collaborèrent avec lui à l'édification du Royaume (cf. Phm 24, Col 4, 10-11 ).
- Démas, qui se détourna pour les richesses du monde et abandonna la course (cf. 2 Tm 4, 10). Paul, cette fois, travaille en profondeur. Il établit la priorité de sa vie. Comme il a compris qu'il ne peut continuer à courir seul, il se consacre à la formation de l'équipe d'athlètes qui continueront sa course. Il n'évangélisera donc plus et préfère former des évangélisateurs. Il investit tout son temps pour ses collaborateurs les plus proches, avec qui il partagera les secrets et les expériences du monde fascinant de l'apostolat. Il les instruit et leur répète que le meilleur de tous les évangélisateurs n'est pas supérieur à l'équipe prise dans son ensemble. Ce choix implique des renoncements. Après avoir prêché à Lystres, on ne le voit plus jamais s'adresser aux foules. Ce n'est que par cet investissement que l'on peut semer pour l'avenir, afin que la semence de la Parole grandisse et se propage dans le monde entier (cf. Ac 14, 11-18). Son équipe de collaborateurs se composait de quelque soixante-douze éléments. Il sut associer des personnes aux dons et charismes divers, mais unis pour une même mission. Son propre ministère était le facteur d'union de cette équipe. Quelle stratégie avait cet Apôtre pour attirer des gens qui soient capables de quitter leur pays, leur culture et leur langue pour défier les dangers, la pauvreté et les prisons ? Quel fut le secret de Paul pour que jeunes comme adultes revêtent la chemise de l'évangélisateur et aillent jusqu'à risquer leur vie pour lui ? La réponse pourrait s'orienter dans la direction suivante :
- II leur transmit lui-même l'Évangile et servit d'instrument pour leur communiquer la Vie Nouvelle en Jésus Christ. Aussi étaient-ils débiteurs envers l'Apôtre (cf. Phm 19).
- II les motivait et témoignait, leur répétant les paroles du Seigneur Jésus: Il y a plus de bonheur à donner qu'à recevoir (Ac 20, 35).
- II leur confiait des missions spéciales. II était convaincu que la puissance de la Parole agissant en lui serait aussi efficace chez les autres et par eux (cf. Ac 20, 32).
- II priait pour les siens nuit et jour (cf. 2 Tm 1, 3).
- II leur écrivait des lettres personnelles (cf. 1-2 Tm, Tt et Phm).
3. Programme de formation: douze images
Son programme de formation repose essentiellement sur l'aspect pratique de l'évangélisation: c'est uniquement en prêchant que l'on apprend à évangéliser. Son objectif était avant tout de former l'esprit évangélisateur ses adorateurs, dont le cœur palpiterait de zèle pour l'évangélisation, la passion d'évangéliser et l'obsession de l'Évangile.
Il définit le profil de l'apôtre par douze métiers ou fonctions :
1. - Un père et mère qui, par l'Évangile, engendre des enfants dans le Christ-Jésus (cf. 1 Co 4, 15 ; Ph 2, 22), avec la souffrance de celui qui met au monde (cf. Ga 4, 19 ;
1 Th 2, II ), et qui entoure ses enfants de soins ( cf. 1 Th 2, 7).
2. - Un pasteur qui veille à l'intégrité de son troupeau et les prévient des futurs dangers (cf. Ac 20,28 ; 1 Co 9,7 ; Ep 4,11).
3. - Un ambassadeur qui a tout pouvoir et autorité afin de représenter et agir dans le Nom de Jésus (cf. 2 Co 5,20 ; Ep 6,20).
4. - Un cultivateur qui travaille la terre sainte appartenant à Dieu (cf. 2 Tm 2,6).
5. - Un soldat qui ne s'encombre pas d'autres affaires car il n'a qu'un intérêt dans la vie et est capable de supporter toute fatigue (cf. 2 Tm 2,3-4).
6. - Un athlète qui lutte selon les règles établies (cf. 2 Tm 2, 5).
7. - Un serviteur ou ministre, soumis à l'autorité dans le but de servir avec humilité (cf. 1 Co 5, 3 ; 9, 19).
8. - Un coopérateur de Dieu qui travaille dans le même champ (cf. 1 Co 3,9).
9.- Un témoin qui a personnellement fait l'expérience de la résurrection du Christ-Jésus (cf. Ga 1, 12) et n'est donc pas l'écho des rapports de ses correspondants (cf. Ac 13, 31 ; 22, 15 ; 26, 16).
10. - Un docteur (cf. Ep 4, II ; 1 Tm 2, II) qui propage la lumière de la vérité (cf. Ga 2, 5) et enseigne par sa propre vie (cf. Ph 3, 17).
11. - Un architecte qui pose les fondements de l'édifice de la foi et en planifie la structure (cf. 1 Co 3, 10).
12. - Un héraut qui proclame les bonnes nouvelles (cf. 1 Tm 2, 7 ; 2 Tm 1, II ).
Paul souligne que, s'ils ont la gloire d'être considérés comme coopérateurs de Dieu ( cf. 2 Co 6, 1) ou ministres de la Nouvelle Alliance (cf. 2 Co 3, 6), si leurs noms sont inscrits au livre de vie (cf. Ph 4,3), ils ne doivent pas non plus oublier qu'ils sont de simples serviteurs du Christ (cf. 1 Co 4, 1) et des hommes (cf. 1 Co 3, 9), et que Dieu seul est capable de donner la vie (cf. 1 Co 3,6). L'objectif de son programme n' est pas de les former de façon pragmatique, comme on forme celui qui doit actionner une machine dans une usine, mais de leur donner un esprit d'évangélisateur et un cœur d'apôtre.
4. Méthode: une équipe d’évangélisateurs
Paul compte un groupe avec lequel il partage tout. Le livre des Actes des Apôtres nous décrit l'Apôtre voyageant en équipe'. Ils restent ensemble jusque dans la prison (cf. Ac 27,2 ; Co14, 10). Il a confiance en ses coopérateurs et les conseille à chaque pas, jusqu'au moment où il les confie à Dieu et à la Parole de sa grâce (cf. Ac 20, 32).
IV. Course contre la montre: former des formateurs
Paul sait qu'il court contre la montre et qu'il doit optimiser chaque seconde. Mais surtout, conscient de se trouver dans la dernière ligne droite, il doit capitaliser ses efforts au maximum en accélérant le pas pour gagner la course.
1. La qualité plus que la quantité
Pour capitaliser ses forces, il choisit alors un cercle plus restreint de coopérateurs: ceux qui seront chargés de produire des apôtres et des évangélisateurs. Parmi eux se distinguent notamment :
- Marc (cf. Col 4, 10), qui fut le premier à consigner la Bonne Nouvelle du Royaume, proclamant que Jésus est l'Évangile et en même temps le plus grand évangélisateur, qu'Il annonça une Parole sans égale accompagnée de nombreux prodiges et miracles.
- Luc, le cher médecin (cf. Co14, 14) et compagnon inséparable, qui élabora le meilleur manuel de l'évangélisa¬teur jamais conçu: le livre des Actes des Apôtres. Il consigna également les témoignages de Jésus dans son Évangile, afin d'étayer les enseignements reçus. Luc fut son seul compagnon dans les pires moments. Paul reconnaît la fidélité de ce chrétien: Seul Luc est avec moi (CF 2 Tm 4, Il ).
- L'auteur de l'Épître aux Hébreux qui, d'une certaine manière, hérita de la vision que l'Apôtre avait de Jésus, grand prêtre éternel.
2. Il fait école et crée une communauté apostolique
Par école il ne faut pas s'imaginer un local mais le milieu où l'on vit en tant que Corps du Christ, unis par un seul Esprit en mettant ses propres charismes et ministères au service des autres afin de construire le Corps du Christ ( cf. Ep 4, 10-13). Paul fit école parce qu'il consacra à ces personnes-clé plus de temps qu'à quiconque. JI pensait à eux jour et nuit (cf. 2 Tm 1, 3). JI leur écrivait personnellement des lettres (sans l'intermédiaire d'un secrétaire) et leur confiait des missions spéciales afin qu'ils croissent en responsabilité et en expérience pastorale. Dans ce groupe plus intime se trouvent Timothée, qu'il appelle son enfant bien-aimé (cf. I Co 4, 17) et Tite, son véritable enfant (cf. Tt 1,4), parce qu'il avait réussi à fonder une véritable famille avec eux. Ils n'étaient donc plus « ses » disciples ni « ses » coopérateurs mais les collaborateurs de Dieu dans l'ɬvangile (cf. 1 Th 3,2), et ses frères (cf. 2 Co 1, 1 ; 12, 18). Paul ne se considère pas comme le supérieur qui enseigne et dirige uniquement. Lui aussi a besoin de l'aide et de la force des autres: Tite, par exemple, le réconforta de sa présence en Macédoine lorsqu'ils étaient accablés d'épreuves, de tribulations et de crainte (cf. 2 Co 7, 5- 7). Quant à Justus, il fut une consolation inestimable pendant sa première captivité à Rome (cf. Co14, Il). Dans d'autres circonstances pénibles, Paul envoya chercher ses compagnons afin qu'ils le rejoignent là où il se trouvait (cf. Ac 17, 15), tout comme parfois il se plaignit de l'absence des autres (cf. 2 Tm 4, 10). Dans une communauté, tous ont besoin de tous. La communauté de Paul était apostolique, et l'oeuvre apostolique se faisait en communauté. Lui-même avait appartenu à celle d'Antioche, animée par la passion d'annoncer la Parole par-delà toute frontière (cf. Rm 15,20). Dans la dernière étape de sa course, l'essentiel n'est plus seulement d'évangéliser, mais d'évangéliser en communauté : J'arrivai donc à Troas pour l'Évangile du Christ, et bien qu'une porte me fût ouverte dans le Seigneur; mon esprit n'eut point de repos, parce que je ne trouvai pas Tite, mon frère. Je pris donc congé d'eux et partis pour la Macédoine (2 Co 2, 12-13). Paul prie et jeûne pour que les portes s'ouvrent et qu'il puisse annoncer le Nom et les promesses de Jésus. Il saisit immédiatement toute occasion qui se présente. Il arrive ainsi un jour à Troas, où l'opportunité qui se présente est loin d'être ordinaire, bien au contraire. Il s'agit d'une « porte dans le Seigneur ». Cependant, comme il ne peut trouver Tite, il perd tellement la paix qu'il quitte la ville pour aller chercher ce membre du Corps qui lui est si nécessaire. Pour Paul le plus important n'était pas d'évangéliser mais d'évangéliser en communauté.
X
LE TESTAMENT DE PAUL
Paul, à la fin de sa vie, résume son histoire et son ministère; il nous lègue un album contenant trois photographies.
I. Autoportrait de Paul. Le moment de mon départ est venu. J'ai combattu jusqu'au bout le bon combat, j'ai achevé ma course, j'ai gardé la foi (2 Tm 4,6-7).
Paul emploie trois images qui donnent différentes teintes à ce qu'il vit dans la prison Mamertine : le matelot, le pugiliste et l'athlète.
1. Paul, le matelot
J'ai déjà plié les voiles (2 Tm 4, 6).
Les marins expérimentés développent un sixième sens qui leur fait pressentir la terre proche. Saint Luc raconte qu'après cette terrible tempête qui les laissa quatorze jours à la dérive sans savoir où ils se trouvaient, les matelots pressentirent l'approche d'une terre (cf Ac 27,27). Paul a navigué tant de fois qu'il sait quand le navire approche du port. Alors il monte sur le pont avec la certitude que, d'un moment à l'autre, cette terre tant espérée apparaîtra à l'horizon. Il en va de même pour le voyage de sa vie. A Ephèse sa vie fut en grand danger. Il fit naufrage par trois fois. Il fut surpris une fois par un ouragan nommé Euraquilon. Il a été lapidé et laissé à moitié mort à Lystres. Une vipère venimeuse l'a mordu à Malte, mais jamais il ne pensa que sa vie finissait là. Le Seigneur l'a protégé dans toutes ces situations. Maintenant, c'est différent. Les gros nuages noirs de la tourmente lui font pressentir qu'il parvient au bout de son voyage et qu'il ne peut faire marche arrière. Paul, au lieu de résister ou de se rebeller contre le dessein divin, accepte le plan de Dieu et va vivre ce qu'il a prêché tant de fois : La Vie, c'est le Christ, et mourir représente un gain (Ph 1,21). Telle navire qui a défié les tempêtes et vaincu les tourmentes, il s'approche du port abrité pour s'y reposer. Il plie la voile d'artimon (cf. Ac 27,40), car la simple inertie lui fera toucher la terre ferme. Déjà les voiles sont rentrées, le vent et les bourrasques sont tombés et c'est le sirocco tiède venant d'Afrique qui souffle. Il a navigué dans la « mare nostrum » et les voies impériales lui sont familières. Les capitales et les petits hameaux, les chemins et les synagogues, les rivières et même les prisons ont été les chaires depuis lesquelles il a annoncé la Bonne Nouvelle du salut. Mais vient le temps de plier les voiles...
2. Paul, le pugiliste
J'ai combattu le bon combat (2 Tm 4, 7).
Paul compare sa vie à un combat dans lequel, pour vaincre, il ne faut pas frapper au hasard (cf. 1 Co 9, 26-27). Mais la cloche qui met fin au combat sonne déjà. La lutte a été continue. Il porte en sa chair les signes de la passion du Christ, et les cicatrices laissées par les coups de fouet sillonnent ses épaules. Cette lutte a parfois été si dure qu'il en est tombé à terre et a été réduit au silence dans les cachots, mais chaque fois il s'est relevé pour proclamer la victoire du Christ Jésus sur le péché et la mort. Finis les entraînements austères. Le combat a été difficile, mais tout ce qui commence a une fin. Il doit garder les armes défensives et offensives. Finis les efforts et les obstacles répétés. Finis les coups bas des faux frères qui l'ont trahi. Finis les ennemis qui l'attaquent dans chaque synagogue. Il attend uniquement la sentence du juste Juge. Elle ne dépend plus de ses forces ni de ses capacités mais seulement de la miséricorde de ce Dieu riche en amour qui l'a aimé, lui qui était mort à cause de la loi mais qu'Il a ressuscité, lui donnant une vie nouvelle dans le Christ-Jésus. Il est sûr de Celui en qui il a mis sa confiance et sait qu'il est le grand vainqueur, grâce à Celui qui est venu à sa rencontre sur le chemin de Damas.
3. Paul, l’athlète
J'ai achevé ma course (2 Tm 4,7).
La course touche à sa fin. Cette aventure qui avait commencé aux abords de Damas se termine. « J'ai dépensé toute mon énergie pour un long marathon, apportant la Bonne Nouvelle là où personne n'était encore venu. J'ai franchi la course d'obstacles. J'ai passé le relais à d'autres afin que courre et se propage le Message de Dieu, qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité ». Il lui reste seulement à franchir la ligne d'arrivée et à recevoir la couronne impérissable, non pas en vertu de ses propres mérites, car il a parfaitement compris qu'il n'est pas question de l'homme qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde (cf. Rm 9, 16). Il entend déjà les premiers accords des fanfares qui célèbrent son triomphe. Il aperçoit la récompense qui, pour cette course, n'est pas réservée uniquement à ceux qui arrivent en premier, mais à tous ceux qui, avec amour, ont préparé la venue glorieuse du juge des vivants et des morts.
II. le secret de Paul: 2 Tm 2, 2
Paul touche au but de sa course. Le temps du combat est déjà terminé, et il plie les voiles car tout est consommé. Cependant, il ne veut pas emporter dans la tombe le secret de son succès pastoral et écrit une lettre à son fidèle disciple Timothée. Après une vie tissée par les succès et les échecs, avalisée par les épreuves et les persécutions, après avoir risqué jusqu'à son existence, il confie l'essence de sa vision apostolique par une petite phrase : Toi donc, mon enfant, (...) ce que tu as appris de moi sur l'attestation de nombreux témoins, confie-le à des hommes sûrs, capables à leur tour d'en instruire d'autres (2 Tm 2, 2).
Ce secret comporte trois éléments :
1. Choisir la matière première :uniquement des hommes sûrs
Il recommande à son cher disciple Timothée: « Ne te donne pas à tous sans discrimination. Cherche et trouve ceux qui sont faits d'un matériau explosif, afin qu'ils rayonnent par-delà leurs propres limites. » Lorsque Michelangelo Buonarotti (1475-1564), célèbre artiste de la Renaissance, voulait sculpter une statue, il la concevait d'abord en pensée. Il se rendait ensuite dans la région de Carrare pour y trouver la pierre adéquate. Parfois il mettait des jours, voire des semaines, à trouver le marbre qui allait se transformer en oeuvre d'art. Le génie de Florence savait que manier le marteau et le burin n'était pas tout, qu'il fallait aussi avoir la matière première adéquate. Paul recommande instamment à son disciple de choisir soigneusement ceux à qui il transmettra le Message. Ils doivent être des « hommes sûrs », à savoir des hommes de foi qui croient en la puissance de la Parole et en l'efficacité de l'É-vangile, qui reconnaissent Jésus comme leur Seigneur et Sauveur, ont persévéré dans les épreuves et s'acheminent vers la sainteté. Ils doivent aussi être dignes de confiance et, réciproquement, avoir confiance en Timothée.
2. Communiquer des thèmes transmissibles
Paul recommande soigneusement: « Timothée, ce que je t'ai dit, communique-le à d'autres pour qu'ils le transmettent encore plus loin. » Là est donc le secret de la réaction en chaîne et du contenu du message: enseigner ce que d'autres, à leur tour, pourront transmettre. Certains messages sont tellement denses et difficiles que même le prédicateur ne peut les annoncer sans Les lire. Certaines doctrines sont si difficiles à comprendre qu'il faut les consigner par écrit dans un catéchisme. Aussi Paul propose-t-il à son disciple un concentré de son expérience: « Timothée, transmets des messages vraiment simples et clairs, afin que les autres puissent les répéter immédiatement sans avoir besoin d'une longue préparation intellectuelle et doctrinale. »
3. Le facteur exponentiel
Paul transmet ce qu'il a lui-même reçu (cf. 1 Co 15,3). Il le transmet à Timothée, pour que celui-ci le confie à ceux qui seront capables de l'enseigner à d'autres encore. C'est une chaîne englobant cinq générations :
1- ceux qui ont formé Paul,
2- Paul lui-même,
3- Timothée,
4- ceux qui ont été choisis par Timothée,
5- ceux qui ont été instruits par ces derniers.
Lorsque l'on apprend à jouer aux échecs, l'attention porte exclusivement sur le coup que l'on est en train de jouer, pour en mesurer uniquement les conséquences immédiates. Les bons joueurs peuvent planifier jusqu'à trois ou quatre coups d'avance et envisager toutes les variantes possibles, qui augmentent de façon exponentielle. Les véritables champions sont capables de prévoir jusqu'à sept coups. De même, un chef qui possède une vision voit beaucoup plus loin que les autres. Ce qui distingue un homme intelligent d'un sage, c'est que le premier sait diagnostiquer les situations du présent, alors que le second pénètre les secrets du futur. Paul appartient à cette race rare de ceux qui ont une vision intégrale de la réalité et se placent dedans. Le plus grand nombre que l'on puisse écrire avec seulement trois chiffres dépend de la manière dont il se présente : avec une addition, une multiplication ou une formule exponentielle. Ainsi, 999 est si inimaginable qu'il faut plus de 3 874 kilomètres pour écrire le résultat. Dans le domaine de l’évangélisation, il ne suffit pas à additionner ou de multiplier: il faut travailler avec le facteur exponentiel. Paul est l'un de ces génies dont la vision n'est pas limité~ dans le temps ni l'espace. Il a un regard télescopique et un esprit exponentiel. Il a su semer dans la conscience des siens que, tout comme l'évangélisateur n'est pas celui qui évangélise uniquement mais celui qui forme des évangélisateurs, l'apôtre est celui qui forme des formateurs d'apôtres. Lui même ne parcourt plus tous les aréopages et n'entre plus dans chaque ville et chaque synagogue pour y annoncer Jésus. Son rôle se limite à transmettre la vision et à maintenir l'orienta¬tion et le rythme.
III. Le cri de Paul entraîneur
Que la parole du Seigneur accomplisse sa course et soit glorifiée (2 Th 3, I). Paul, en bon stratège, a une formule qu'il transmet à son équipe d'apôtres: que la Parole du Seigneur accomplisse sa course !!! Ce n'est pas à vous de courir. Laissez courir la Parole. Il serait fou de propager la lumière par des flambeaux alors qu'elle se déplace à plus de 300 000 kilomètres par seconde, faisant plus de sept fois le tour de la terre. L'évangélisateur n'a pas besoin de parcourir le monde entier mais d'allumer la lumière de la Parole, qui court d'elle-même.
- XI -
PAR-DELA LE BUT
Dans les courses du stade, tous courent, mais un seul obtient le prix. Courez donc de manière à le remporter (1 Co 9, 24).
La course se termine lorsque le vainqueur atteint le but et reçoit la couronne de la victoire. Paul écrit donc à la fin de sa vie :
J'ai achevé ma course (..) et voici qu'est préparée pour moi la couronne de justice, qu'en retour le Seigneur me donnera en ce Jour-là, lui, le juste Juge (2 Tm 4, 7-8).
1. la crise de Paul
La prison Mamertine avait été creusée aux flancs du Capitole romain. Cette prison enfouie sous la terre se situait au début de la voie des forums impériaux et le prisonnier qui
y entrait savait qu'il n'en sortirait qu'une seule fois, le jour de son exécution. En face des fiers arcs commémorant les conquêtes de l'invincible armée de l'Empereur Auguste se trouvait cette prison haute sécurité gardant les prisonniers de la pire espèce. Parmi eux se distingue un homme taciturne. C'est Paul de Tarse, connu comme l'un des meneurs de la secte la plus dangereuse que le monde civilisé ait jamais connue. Assis, quasi prostré sur les pierres humides, il ressemble à un athlète fatigué qui a effectué une longue course d'obstacles. Les rides de la sagesse sillonnent son front, et il paraît plus vieux que son âge. Tandis que passent les longues heures dans la prison et qu'il contemple ses grosses chaînes, il pense et repense: La Parole de Dieu n'est pas enchaînée (cf2 Tm 2,9). « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et cela ne peut dépendre de rien ni de personne. Bien que je sois enchaîné à cause de l'Évangile, la lumière de la vérité possède une force d'expansion intrinsèque. »
1. Tous se sont détournés de moi, m'ont abandonné
Cet homme qui a fondé tant de communautés, qui a écrit des pages sublimes sur le Corps du Christ et compte une équipe de soixante-douze collaborateurs... est maintenant seul. Délaissé par les uns, oublié par les autres et même trahi par certains, il écrit les deux phrases les plus tristes de tous ses écrits :
Tous se sont détournés de moi (2 Tm 1, 15)'.
Quelle terrible solitude! La solitude, ce n'est pas uniquement être seul, c'est aussi l'absence d'êtres aimés, et ce vide pénètre jusqu'au plus profond de son cœur. Paul ne se plaint pas des naufrages et des flagellations. Il ne proteste pas contre les prisons et les jalousies. Il n'y a qu'une chose qu'il ne peut supporter: l'indifférence des siens. Certains eurent honte de ses chaînes et d'autres ne voulurent pas risquer d'être considérés comme les complices de ce condamné à mort. La première fois que j’ai eu à présenter ma défense, personne ne m 'a soutenu. Tous m 'ont abandonné! (2 Tm 4, 16)1. Se détourner de quelqu'un n'est pas pareil que de l'abandonner. Il s'agit là de ceux qui, à d'autres moments, l'avaient soutenu et qui, dans cette situation critique, ont retiré leur soutien. C'est bien plus douloureux. Il reste donc totalement seul, expérimentant la solitude profonde qui mène à l'individualité de la personne. Ce feu purificateur forge l'histoire de chacun et façonne le caractère unique et irremplaçable de la personne. Le mystère de l'indi¬vidualité est mieux fécondé dans la serre de la douleur.
2.. Un tunnel avec deux lumières
Le grand Paul, qui avait raffermi les faibles et relevé les déchus, s'enfonce dans la nuit de la détresse. Cependant, il sait parfaitement qu'il n'est pas enfermé dans une grotte, qu'il passe seulement par un tunnel. La grotte n'a pas de sortie. Plus on avance, plus on s'enfonce dans les entrailles de la terre et plus on s'éloigne de l'unique sortie. Le tunnel est différent. On y avance toujours dans l'attente de la lumière. L'homme de foi sait que, même si les problèmes se compliquent, le labyrinthe a une sortie.
Le tunnel de Paul a deux lumières. La première, c'est cette clarté resplendissante de Damas. La seconde, l'espérance que bientôt, une fois le voile de la foi levé, il verra face à face Celui qui a donné sa vie pour lui. Lorsqu'il sent la mort déjà proche, toutes les choses retrouvent leur place. Seul l'essentiel reste, et l'accidentel disparaît. Les choses temporaires sont laissées de côté et ne demeure que ce qui est transcendant. Les apparences n'importent plus. Les valeurs suprêmes prévalent sur le va-et-vient des vains honneurs et des succès de ce monde. Devant l'horizon de l'éternité, l'être humain fait l'expérience de sa petitesse et de ses limites.
II. Trois ordres urgents
Alors qu'il se consume déjà dans la prison car il a dépensé toute son énergie en prêchant, Paul saisit une vieille plume et, sur un bout de parchemin, écrit sa dernière lettre, considérée comme son « testament spirituel », dans laquelle il résume l'essentiel de sa longue course. Le Paul fort, autonome, athlète infatigable et gladiateur de mille combats s'avoue faible et dans le besoin. Ce coeur blessé par tant de trahisons qui, comme mécanisme de défense, s'était revêtu d'une cuirasse le faisant paraître insensible, âpre et sauvage, se met à nu et reconnaît ses besoins humains. Enchaîné dans la prison Mamertine, abandonné de tous et délaissé par ses amis, il écrit une lettre pressante à son disciple Timothée, le priant avec insistance d'avancer son voyage.
Hâte-toi de venir avant l'hiver (2 Tm 4,21).
Je vais te demander trois choses :
1. Mon manteau
Paul n'est pas un homme insensible. Ce visage austère qui a résisté aux lapidations et aux naufrages s'est adouci. Ses rides ne reflètent pas d'amertume. Elles sont comme les douces dunes de sable du désert de Syrie et montrent la sagesse du vieil homme qui est parvenu à synthétiser le mystère de
son existence. Il n'a pas honte de montrer ses faiblesses et ses besoins, comme celui d'un simple manteau. En venant, apporte le manteau que j'ai laissé à Troas chez Carpos (2 Tm 4, 12). II y a peu de choses qu'il considère comme siennes. Il se réfère toutefois ici à ce manteau comme son bien. Paul est vieux et plus sensible au froid. L'hiver rude approche, avec cette humidité qui pénètre jusqu'aux os. Les froides dalles de la prison Mamertine ne sont jamais chauffées par le soleil. Cependant, plus peut-être qu'un manteau bien matériel, Paul a besoin de l'amitié chaleureuse d 'Aquilas et de Priscille, eux aussi tisseurs de tentes. Ce manteau, cousu avec tant de soin, symbolise leur amitié; son tissage lui rappelle aussi sa mission: travailler pour l'unité du Corps du Christ, qui se réalise par les jointures et les ligaments (cf. Col 2, 19). Il ne demande pas un manteau neuf mais le sien, compagnon de tant de voyages et couverture pendant tant d'hivers. Il n'en veut pas d'autre, seulement celui qui a été témoin des prédications et des conversions, des miracles et des prodiges. Il s'est attaché à ce vieux manteau qui a amorti tant de lapidations. Ce doit être celui qu'il a laissé à Troas chez son ami Carpos, lorsqu'il fut subitement arrêté et n'eut pas le temps de rassembler ses objets les plus personnels. II a été habitué à vivre dans la pauvreté. Il dut subir la nudité à bien des moments, mais maintenant, il a besoin d'un simple manteau.
2. Prends Marc et amène-le avec toi
Dans le silence et l'ennui des heures de la prison, où le temps semble suspendu, Paul repasse en mémoire chaque épisode fondamental de sa vie. Il se rappelle surtout ses liens avec son ami Barnabé. Lui reviennent à l'esprit quelques épisodes des débuts de son ministère. Animés par l'Esprit ils avaient franchi les frontières du judaïsme pour annoncer l'Évangile aux païens. Jean, surnommé Marc, les accompagnait alors. Mais face aux difficultés que constituait la chaîne du Taurus, à savoir les pics escarpés, les menaces des brigands et les dangers constants, il avait préféré les abandonner en Pamphylie et retourner à Jérusalem avec Marie, sa mère. Des mois plus tard les deux amis revinrent en racontant toutes les merveilles réalisées, la conversion des gens, les miracles, et comment le Seigneur les avait délivrés de tous les dangers. Marc, honteux, les écoutait. Après quelques jours Paul prit l'initiative du deuxième voyage missionnaire et dit à Barnabé : « Retournons donc visiter les frères dans toutes les villes où nous avons annoncé la parole du Seigneur, pour voir où ils en sont.¨ » (cf. Ac 15,36). Pendant les préparatifs du voyage, Barnabé voulait emmener aussi Jean, surnommé Marc (cf Ac 15,37). Mais Paul ne pouvait oublier qu' il avait abandonné l'oeuvre évangélisatrice I à mi-chemin. « On s'échauffa... » car Barnabé était d'avis qu'il fallait donner une seconde chance au jeune Marc. Paul, en revanche, s'y opposait en prétendant qu'il l'avait déjà eue. Barnabé, comme toujours, essaya d'être conciliant. Paul avait un caractère intransigeant: Marc avait mis la main à la charrue puis regardé en arrière. Aussi n'était-il pas digne de faire partie de l'équipe missionnaire, dont la principale caractéristique était d'affronter les épreuves avec constance. Le disciple de Chypre, qui un jour était allé jusqu'à Tarse pour retrouver celui que tous rejetaient, n'était pas disposé à perdre Jean, surnommé Marc. Paul, quant à lui, avançait que Marc était inapte et le prouva par l'incident de Pamphylie. Le vieux Barnabé insistait sur le fait qu'une faute ne pouvait déterminer la vie d'une personne, mais Paul estimait que l'Évangile exigeait sérieux et responsabilité. Paul était si décidé qu'il posa un ultimatum à Barnabé : « Si tu veux que Marc évangélise, pars avec lui. Mais ne compte pas sur moi, je trouverai un homme courageux et décidé, qui ne craint pas les difficultés ni ne s'effraie devant les problèmes. » L'Apôtre des païens, qui n'acceptait pas Marc, le rejeta devant toute la communauté. Tous deux étaient certains de représenter l'esprit évangélique puisqu'ils finirent par se séparer (Ac 15, 39). Marc, le regard baissé et le cœur blessé, s'embarqua avec Barnabé pour la petite île de Chypre. Quant à Paul, il choisit comme compagnon le courageux Silas et partit dans la direction opposée.
Marc s'en allait, triste. Par sa faute, cette merveilleuse amitié et cette puissante paire apostolique avaient été brisées. Paul, devant toute l'assemblée, l'avait méprisé, le jugeant indigne de répandre la Parole de Dieu. Devant tous, il lui avait dit en face qu'il était incapable de servir l'Évangile. Depuis ce jour il traînait un point noir dans son « curriculum vitae » : avoir été rejeté par Paul. Pas par n'importe qui, mais par l'apôtre du discernement, qui connaissait toutes les voies de l'évangélisation. Une blessure est d'autant plus profonde qu'elle a été causée par celui que l'on admire. Marc se sentait méprisé par l'Apôtre des gentils, et sa blessure se cicatrisait difficilement. Bien que Pierre l'ait ensuite pris comme secrétaire personnel et qu'il ait écrit le premier récit de l'Évangile de Jésus Christ (Mc 1, 1), que son oeuvre fût louée partout, qu'il fût reconnu dans de nombreuses églises qui ne connaissaient pas Paul, il traînait une honte que personne ne pouvait effacer : l'Apôtre des païens l'avait expulsé de son équipe de travail. Il était reconnu et estimé dans les communautés, et cependant il y avait toujours un « mais ». Plus il essayait de l'oublier, plus l'image de Paul le poursuivait, tel un fantôme effrayant. Aucun autre ne pouvait être le baume qui soulagerait cette blessure. Même
l' ombre de Pierre, qui guérissait tant de malades (cf. Ac 5, 15), était incapable de guérir la blessure de Marc. Le seul qui pouvait apaiser ce souvenir douloureux était celui-là même qui l'avait causé... Paul est sur le point d'offrir sa vie en sacrifice et bientôt sa course dans ce monde sera terminée. Il décide alors de régler ses comptes avant d'arriver devant Celui qui lui a pardonné tous ses péchés et tous ses blasphèmes contre le Messie. Paul a une dette envers Marc, et il veut mourir en paix avec tous. Il ne peut se présenter devant Dieu avec une dette personnelle. Il supplie donc Timothée: Prends Marc et amène-Ie avec toi (2 Tm 4, Il).
Il utilise deux verbes juxtaposés pour souligner l'impor¬tance de sa demande: prends et amène, ce qui signifie tout d'abord « prends-Ie, saisis-le, ne le lâche pas », puis « amène le avec toi ». Ce n'est pas seulement l'amener mais le capturer, comme les soldats l'ont lui-même saisi de nuit pour le conduire à Antipatris (cf. Ac 23, 31 ). « Enchaîne-le », comme moi, je suis enchaîné. Tu ne peux pas venir s'il n'est avec toi, car c'est pour moi une question de vie ou de mort... Il faut que je me réconcilie avec lui. Ce tisseur de tentes expérimenté sait qu'il a déchiré un membre du Corps du Christ et qu'il doit réparer la déchirure avec le fil de la réconciliation. Il veut, sans explication, le regarder droit dans les yeux, le serrer dans ses bras, et surtout lui déclarer: (Tu m'es) précieux pour le ministère (cf2 Tm 4,11). Paul, qui avait dogmatiquement affirmé que Marc ne serait jamais capable de servir dans la vigne du Seigneur reconnaît maintenant qu'il est aussi précieux qu'irremplaçable. Le formateur d'apôtres, qui avait déclaré partout que Marc était un lâche, doit maintenant employer un adjectif fort pour affirmer radicalement le contraire: « Marc, tu m'es précieux pour l'ɬvangile... Je reconnais t'avoir jugé et étiqueté en pensant que tu ne changerais pas. Pardonne-moi, je me suis trompé. Moi, Paul, apôtre du Christ-Jésus par la volonté de Dieu, qui ai écrit tant de lettres inspirées par l'Esprit, j'ai parlé selon la chair lorsque je t'ai blessé au plus profond... J'ai failli faire échouer l'un des ministères les plus prophétiques de l'Église. Je reconnais aujourd'hui mon erreur et te demande pardon. » On dit que la plus belle page de Paul, et peut-être de toute la littérature, est le chapitre 13 de la première Épître aux Corinthiens, où il affirme : La charité est longanime ; la charité est serviable ,. elle n'est pas envieuse ," elle ne tient pas compte du mal,' elle ne s'irrite pas " elle excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout, La charité ne passe jamais (1 Co 13,4-8). Le plus beau chapitre de son existence, Paul ne l'a toutefois pas écrit avec de l'encre mais par sa propre vie lorsque, prisonnier, dans l'incapacité d'aller chercher son frère, il demande à Timothée d'amener Jean, surnommé Marc, pour se réconcilier avec lui et laver sa blessure, afin qu'elle ne souille pas le Corps du Christ.
3. Surtout les Parchemins (2 Tm 4, 13).
De toutes ses demandes, il y en a une qu'il formule de façon particulière : les saints Parchemins qui contiennent la Parole de Dieu. Paul a appris les saintes Écritures dès son plus jeune âge. Dans sa jeunesse, aux pieds du célèbre Rabbi Gamaliel, il a découvert les desseins divins renfermés dans les livres prophétiques. Pendant son apostolat, il s'est toujours appuyé sur la Parole de Dieu. Ses lettres sont remplies de passages de l'Ancien Testament, notamment l'Épître aux Romains. Paul garde la Parole de Dieu en mémoire et dans son cœur, mais cela ne lui suffit pas. Celui qui a toujours vécu avec l'Écritu¬re sainte entre les mains veut mourir éclairé par cette lumière. On pense que Paul souffrait de la vue, et de sérieuses raisons permettent de le supposer (cf. Ga 4, 15). Je préfère penser que sa mauvaise vue était dûe à ces longues veilles durant lesquelles il lisait les Manuscrits. Combien de bougies se consumèrent devant la Loi, l'Écriture et les Prophètes! Ses yeux ont certainement été affaiblis par ces lectures répétées des saints Manuscrits.
Paul dit: « Moi, je ne peux pas mourir sans la Parole de Dieu dans les mains... et s'il te plaît, Timothée, dépêche-toi parce que le temps presse. Ne viens pas après l'hiver parce que ces paroles sont une lampe pour mes pas, une lumière et une chaleur dans le cachot de ma prison. La seule chose qui donne un sens à ces chaînes et à cette solitude, c'est de découvrir le plan de Dieu... Timothée, j'ai besoin des Manuscrits racontant les merveilles de ce Dieu qui, des profondeurs des ténèbres, a fait briller la lumière. Je veux relire les récits de l'élection d'Israël, peuple qui n'a pas été élu parce que c'était le plus grand de tous mais afin de respecter la promesse faite à ses amis. Je poserai mes yeux sur la preuve que nous ne sommes pas sauvés en vertu de nos propres oeuvres, puisqu'Abraham a été justifié par sa foi, avant d'être circoncis, et cela quatre cent trente ans avant que la Loi du Sinaï fût donnée. Par l'image tragique d'Ismaël, né de la femme esclave, et d'Isaac, né de la promesse, je redirai que le plan du salut ne s'accomplit pas par nos efforts humains mais grâce à Dieu, fidèle à sa promesse. Conduit par les récits de la Torah, j'entrerai avec mon peuple dans l'histoire de sa longue captivité en Égypte et de sa merveilleuse libération. Je traverserai la mer Rouge, image de notre baptême, Guidé par la Parole, je marcherai pour la dernière fois dans le désert, avec ce rocher mystérieux qui suivait les Israélites pour leur donner de l'eau vive. Je m'arrêterai surtout sur la montagne du Sinaï où Dieu s'est uni à son peuple par la formule: Je serai ton Dieu et tu seras mon peuple. Tu n'auras pas d'autres dieux devant moi parce que Moi, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, et il n 'yen a pas d'autre. À la lumière de Damas je peux maintenant mieux comprendre ce passage de Moïse devant le buisson ardent qui ne se consumait pas. Je méditerai ces passages sur mon homonyme, le roi Saül qui, ayant un jour perdu les ânesses de son père, rencontra par pure grâce de Dieu le prophète Samuel et fut ainsi oint comme premier roi d'Israël. Cependant, quelle tragique fin que la sienne: il périt par sa propre épée dans la plaine de Guilboa, en même temps que son fils Jonathan. J'ai besoin de relire l'histoire de David, fils de Jessé et berger de Bethléem, sur lequel reposa l'Esprit du Seigneur et à qui il fut promis qu'un de ses descendants siégerait toujours sur le trône d'Israël. Le roi poète, accompagné de sa harpe, chantait: Oracle du Seigneur à mon Seigneur: "Siège à ma droite". Tu es mon fils, moi, aujourd'hui, je t'ai engendré. Sur sa musique je chanterai depuis la sombre vallée de ma prison : Le Seigneur est mon berger, rien ne me manque. Sur des prés d'herbe fraîche il me fait reposer. Vers les eaux du repos il me mène, il y refait mon âme.
Je ressentirai une grande douleur en mon cœur en contemplant dans Osée l'amour très tendre de Dieu trahi par son peuple: Je les menais avec des attaches humaines, j'étais pour eux comme ceux qui soulèvent un nourrisson tout contre leur joue. Cependant, ce même prophète décrit l'infidélité de son peuple: Mais plus je les appelais, plus ils s'écartaient de moi. Je pleurerai en lisant cette page d'Ezéchiel où il raconte la prostitution de mon peuple. Utilisant les présents de son époux, elle alla voir ses amants et mit sa confiance en eux, idoles muettes qui ont des yeux et ne voient pas, des oreilles et n'entendent pas, violant ainsi l'alliance avec son mari fidèle. Toi, tu sais, mon cher enfant, que je souhaiterais être moi ¬même anathème, séparé éternellement du Christ, pourvu que mes frères juifs reconnaissent Jésus comme le Messie libérateur. Aussi je veux lire ce passage où Dieu, à travers le prophète de l'intériorisation, promet une nouvelle alliance: Voici venir des jours - oracle du Seigneur - où je passerai avec la maison d'Israël et la maison de Juda une nouvelle alliance: je mettrai ma Loi dans leur être et sur leurs cœurs je l'écrirai, et Je serai leur Dieu et ils seront mon peuple... et de leurs péchés je ne me souviendrai plus. Timothée, à maintes reprises et sous maintes formes, Dieu a parlé jadis aux pères par les prophètes qui avaient deviné la plénitude des temps et défini le profil du Messie à naître dans une ville importante de Judée. Ils ont écrit qu'il serait berger et roi, comme David, son père. Je veux voir écrit en hébreu ses deux grands noms: « ImmanueI » (Emmanuel - Dieu avec nous) et « YHWH » (Dieu est notre salut). Je relirai surtout la promesse du Seigneur: Je serai avec toi. J'obéirai au prophète qui dit: Pousse des cris de joie, fille de Sion; réjouis-toi, triomphe de tout ton cœur, fille de Jérusalem. Alors je répéterai: Je mettrai ma joie dans la fidélité du vendangeur d'Israël. Je lirai jusqu'à ce que mes yeux s'éteignent le prophète Isaïe qui, préfigurant le Messie, prophétise: L'Esprit du Seigneur est sur moi, car Il m'a donné l'onction; Il m'a envoyé porter la nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs la libération et aux prisonniers la délivrance, rendre la vue aux aveugles et proclamer une année de grâce de la part du Seigneur.
Avec Amos, en passant par Sophonie, je méditerai sur « Le Jour du Seigneur » ; Jour grand et redoutable pour les uns, comme le décrit Nahum, mais pour tous les autres il sera l'oc¬casion d'instaurer la justice et la vérité dans ce monde. J'ai hâte de relire une fois encore la prophétie du berger de Teqoa qui s'est déjà accomplie: Voici venir des jours - oracle du Seigneur - où j'enverrai une faim dans le pays, non pas une faim de pain, non pas une soif d'eau, mais d'entendre la Parole du Seigneur. Je me réjouirai en lisant la page de Joël où Dieu promit l'effusion de l'Esprit sur toute chair: Vos fils et vos filles prophétiseront, vos vieillards auront des songes, vos jeunes gens des visions, sachant par ma propre expérience que l'amour de Dieu a déjà été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint qui nous a été donné. Ensuite je reverrai les exigences de Dieu données par la bouche du prophète Michée: On t'a fait savoir, homme, ce qui est bien: accomplis la justice, aime la bonté et marche humblement avec ton Dieu. Et aussi cet autre résumé que fait le prophète Isaïe: justice et louange. Je méditerai sur Zacharie, prophète réformateur à l'origine de la construction du Temple, lorsqu'il parle du Messie visitant la cité de David, monté sur un âne. Timothée, lorsque tu m'apporteras les Manuscrits, je ne m'arrêterai pas tant sur les prescriptions cultuelles et les sacrifices sur le keppora-propitiatoire, parce que le temps du nouveau propitiatoire est venu: Jésus ressuscité est devenu notre ilasteryon. Rentrant dans cette pâque des pains azymes en Égypte, je veux découvrir que le Christ-Jésus, notre Pâque, a été immolé.
Je veux relire différemment le terrible texte du Deutéronome qui fut mon étendard dans le judaïsme: Un pendu est une malédiction de Dieu, parce qu'à la lumière du chant du Serviteur j'ai découvert que ce sont nos souffrances qu'il portait et nos douleurs dont il était chargé. Le châtiment qui nous rend la paix est sur lui, et dans ses blessures nous trouvons la guérison, clouant ainsi sur la croix la cédule de nos dettes, qui nous était contraire. Je veux m'agenouiller devant ce Serviteur souffrant qui s'est fait obéissant jusqu'à la mort, et à la mort sur une croix; croix qui est scandale pour les juifs et folie pour les païens, mais qui s'est transformée en puissance de Dieu et en sagesse de Dieu. Avec mes compatriotes exilés à Babylone je répéterai depuis Rome: Que ma langue s'attache à mon palais si je perds ton souvenir, Jérusalem. Si je t'oublie, Jérusalem, que ma droite se dessèche ! Je ne peux manquer de relire Jonas, le prophète missionnaire, à qui je m'identifie tant: envoyé pour prêcher chez les païens qui vivaient dans le péché, son message de salut convertit les Ninivites, qui furent sauvés avec leurs enfants et leur bétail. Après avoir vu mon identité apostolique tant de fois niée, je veux répéter la réponse d'Amos au prêtre Amasias lorsque celui-ci remit en question son identité apostolique: Je ne suis pas prophète, je ne suis pas frère de prophète. Je suis bouvier. Mais le Seigneur m'a pris de derrière le troupeau, et Il m'a dit: Va, prophétise à mon peuple. Le lion a rugi, Amasias : qui ne craindrait ? Le Seigneur a parlé: qui ne prophétiserait ? M'appuyant sur la vérité de l'Écriture, je réaffirmerai ma vocation prophétique: Je t'ai appelé pour être la lumière des peuples et pour porter mon salut jusqu ' aux confins de la terre. Je t'ai établi prophète des nations. Ici, les pieds enchaînés à cause de l'Évangile, je veux répéter: Qu'ils sont beaux, sur les montagnes, les pieds du messager qui annonce de bonnes nouvelles. Et, enfin, je ferai miennes les paroles de Jérémie : Tu m'as séduit, Seigneur, et je me suis laissé séduire; tu m'as maîtrisé, tu as été le plus fort.
À nouveau j'ai besoin d'entendre la puissance de la Parole, qui est vivante et agissante: Ne crains pas, car je t'ai racheté, je t'ai appelé par ton nom: tu es à moi. Si tu traverses les eaux, je serai avec toi, et les rivières, elles ne te submergeront pas. Si tu passes par le feu, tu ne souffriras pas, et la flamme ne te brûlera pas. J'ai besoin de lire pour la dernière fois cette page inoubliable d'Habaquq dans laquelle un jour, par une révélation directe de Dieu, sans médiation d'aucun homme, il m'a été révélé que Le juste vivra par sa fidélité, et qu'ainsi l'homme n'est pas sauvé par les oeuvres de la loi mais par la foi, moyennant la grâce. Timothée, j'insiste, apporte-moi, s'il te plaît, mes Manuscrits, car je ne peux mourir sans eux, tout comme je n'ai pu vivre sans eux, afin que, lorsque mes yeux se fermeront, ils soient illuminés par la lumière resplendissante de la Parole de Dieu. À cet instant où mon Bien-Aimé pose sa main sur la poignée de ma porte, car Il vient déjà à ma rencontre, je veux avoir devant mes yeux le Cantique des Cantiques. Le dernier texte que je veux lire lentement et sans hâte: le credo d'Israël, récité dans la langue de mes ancêtres qui est la langue même que j'ai entendue aux abords de Damas: Shema Israël, Adonaï Elohenou, Adonaï ehad. Ve ahavta et Adonar, Elohekha be khollevavekha, ou vekhol nafsheha ou ve khol meodekha : Écoute Israël, le Seigneur notre Dieu, le Seigneur est Un. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout tes moyens. » Parmi les trois choses que Paul demande, il souligne « surtout » les Manuscrits. C'est-à-dire ce qui est le plus important. « Timothée, tu peux oublier quelque chose, mais surtout pas les Manuscrits. Si quelque chose doit se perdre ou être laissé, que ce soit le reste, mais pas les Manuscrits... » Il emploie un superlatif pour lui faire comprendre qu'il s'agit de l'ordre
principal et essentiel. Plutôt subir le froid ingrat sans son manteau, car il ne peut vivre sans la lumière de la Parole de Prophètes. Pour Paul, il est tellement important d'avoir les Manuscrits entre les mains et la Parole dans son cœur qu'il prie Timothée de venir avant l'hiver.
Ce n'est plus le moment de prêcher cette Parole de vie éternelle. Il est désormais temps de se remplir à nouveau et de s'alimenter du pain de la Parole, Parole vivante et agissante qui pénètre jusqu'aux tréfonds de l'âme et de l'esprit.Lorsque les alentours s'obscurcissent et que toutes les portes se ferment, lorsque l'on se trouve dans le pire des cachots, qu'il n'y a pas d'autre sortie que la mort, il n'y a qu'une seule lumière qui illumine le plus absurde et lui donne un sens: la Parole de Dieu.
Une expérience en France
En 1993 je prêchais une retraite au Centre Œcuménique de Gagnières, en France. Comme j'ai l'habitude de faire dans tous mes enseignements, j'avais enlevé ma montre pour l'avoir sous les yeux, de façon à ne pas dépasser le temps imparti. Ayant terminé, je retournai chez moi et me rendis compte que je n'avais pas ma montre. Je pensais l'avoir laissée sur l'ambon et partis la rechercher, en vain. L'animateur demanda si quelqu'un l'avait prise. Point de réponse. Le lendemain le directeur, aussi gêné que peiné, dit à tout le monde qu'un objet appartenant à autrui avait disparu et, plus gênant, que c'était à un prédicateur étranger. Dans un lourd silence teinté de malaise, je montai sur l'es¬trade pour ma conférence. Je saisis ma Bible, rangée dans un étui avec fermoir pour la protéger de l'usure constante. Devant toute l'assemblée j'ouvris le fermoir et la montre égarée tomba sur la table. Comme tout le monde s'était rendu compte que la montre était réapparue, je n'eus d'autre solution que de demander pardon pour cette erreur involontaire et expliquai que je l'avais laissée moi-même dans la Bible. Une jeune fille, qui était assise au premier rang, me cria depuis sa chaise: « Pepe, il faut chercher d'abord dans la Bible ». Si j'avais ouvert ma Bible avant, tous ces problèmes auraient été évités. Je saisis cette occasion pour dire aux retraitants : si quelque chose s'égare dans la vie, il faut chercher d'abord dans la Bible. Si l'on perd la foi ou l'espérance, la joie et la paix, il faut chercher d'abord dans la Bible. Si le foyer se désunit ou s'il est bassement calomnié, il faut chercher d'abord dans la Bible. Toujours, toujours il faut chercher d'abord dans la Bible. La Bible ne nous raconte pas le jour où Paul aperçut les silhouettes de Marc et de Timothée devant les grilles de la prison. Personne ne raconte ce qu'ils se dirent ou firent. Peut-¬être est-ce une omission intentionnelle pour que nous reconstituions nous-mêmes la scène.
III La couronne impérissable
Paul, pressentant le moment décisif déjà proche et la fin imminente, affirme : Quant à moi, je suis déjà répandu en libation (2 Tm 4, 6). Paul se livre en sacrifice volontaire. En même temps, comme prêtre et victime, il s'offre à Dieu. Sa course d'obs¬tacles, couronnée par son martyre, est une oblation sacrificielle que Paul unit au Christ par la foi. Sa vie porte le sceau des sacrifices. Son sang, comme celui de Jésus, a l'odeur douce des holocaustes, totalement offerts à Dieu. Voici qu'est préparée pour moi la couronne de justice... que me donnera le juste Juge (2 Tm 4, 8). À la fin de la course du stade, le vainqueur reçoit en récompense une couronne de laurier. Paul sait qu'il est en train de franchir la ligne et distingue déjà le podium des vainqueurs qui reçoivent un prix; dans ce cas-ci, point de couronne qui se fane, mais une couronne impérissable : Tout athlète se prive de tout mais eux, c'est pour obtenir une couronne périssable, nous une impérissable (I Co 9, 25). Regardant vers l'est, où les plages s'étendent à perte de vue, il voit venir le juste Juge, couronné de gloire et de puissance, qui tient dans ses mains une couronne. À partir de ce moment il prend part au triomphe du Christ-Jésus qui a vaincu la mort. Et ce prix n'est pas uniquement pour Paul; il est donné à tous ceux qui auront attendu avec amour son apparition (cf2 Tm 4,8). Tous ceux qui ont préparé le retour de notre Dieu et Sauveur, Jésus Christ, obtiennent la même récompense.
IV. « Tre Fontane »
Soudain arrive un quadrige de soldats portant épées et boucliers, heaumes et cuirasses, ceintures de cuir et chausses de combat. Le premier porte les emblèmes de l'empire. Ils sortent ce prisonnier taciturne qui tient des Rouleaux à la main et le conduisent de l'autre côté du Tibre. La tradition raconte que dans l'un de ces faubourgs de Rome, un bourreau dégaina son épée acérée et porta un seul coup, précis et mortel, au cou de l'homme dont la vie avait changé aux abords de Damas. La légende ajoute que, lorsque l'épée ôta la vie de l'Apôtre des païens, sa tête rebondit trois fois sur le sol, faisant naître trois sources. Depuis ce jour, ce lieu a toujours été connu sous le nom de « Tre Fontane » (les trois fontaines). La tradition a peut-être surpassé l'histoire mais ce qui est certain, c'est que la vie de Paul, comme sa mort, est un torrent d'eau qui vivifie ceux qui lisent ses épîtres et sa vie à l'ombre de la Croix de Jésus Christ, qui fut sa grande obsession.
V. Conclusion
Trente ans auparavant, aux abords de Jérusalem, Saul de Tarse avait déclaré la guerre à Jésus de Nazareth, qu'il considérait comme maudit parce qu'il avait été crucifié. Là commença une course fanatique pour l'atteindre mais, de façon surprenante, ce fut lui qui, soudain, fut saisi et jeté de cheval aux abords de Damas. Comme tout vaincu, il dut payer le prix des perdants : remettre sa vie entre les mains de celui qui l'avait vaincu. À partir de ce moment il consacra sa vie à une nouvelle course : faire connaître le salut gratuit de Dieu dans le Nom qui est au-dessus de tout nom. C'est ce qu'il fit, non pas contraint et à contre-coeur, mais animé par l'immense amour de Celui qui, en premier, avait donné sa vie pour lui et était mort à sa place sur le bois. Aux abords de Rome, l'ancien persécuteur du Christ offre l'holocauste total, répandant son sang pour Celui qui l'avait soudain séduit en ce midi. Ils vont à nouveau se rencontrer, face à face, maintenant que le voile de la foi est levé, et ensemble ils régneront pour l'éternité entière. En guise d'épitaphe, nous ne pouvons que répéter une phrase de Paul lui-même : Pour moi, mourir représente un gain (Ph 1, 21 ).
- XII -
365 SLOGANS DE PAUL
Un slogan est une phrase courte, facile à mémoriser et qui renferme un message complet. Il peut également exprimer un critère ou un programme de vie. Paul, comme Jésus, a utilisé cette méthode pédagogique pour transmettre un message d'éternité. Plus un slogan réunit les éléments suivants, plus il est efficace :
1. Bref; Il ne s'agit pas d'un long discours. De même que l'on sculpte une pierre pour en extraire une statue, il faut éliminer tous les éléments secondaires afin de faire ressortir le message central :
- Le juste vivra par la foi.
- Malheur à moi si je n'annonçais pas l'Évangile. Il n'est pas possible d'en dire plus avec moins de mots. Toute tentative visant à clarifier ce message ne ferait que le brouiller. Il dit ce qu'il faut et veut dire.
2. Idée complète: Il présente un concept intégral et sans ambiguïté: il est tellement clair qu'il ne nécessite aucune explication ni interprétation :
- La racine de tous les maux, c'est l'amour de l'argent.
- La Parole de Dieu n'est pas enchaînée.
- Que personne ne te méprise.
3. Rythmé: Comme les proverbes ou les dictons, le rythme et la rime des mots favorisent la diction et la mémorisation :
- Si quelqu'un est dans le Christ, c'est une création nouvelle.
- Ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi.
- Il y a plus de bonheur à donner qu'à recevoir.
4. Mémorisable : Le slogan est fait pour être mémorisé, puis répété, pendant l'homélie, l'évangélisation ou l'accom¬pagnement spirituel :
- Je puis tout en Celui qui me rend fort.
5. Dynamique: Il exprime une progression :
- Tout est à vous; mais vous êtes au Christ, et le Christ est à Dieu.
Il pousse à l'action ou présente un plan de vie :
- Conduisez-vous en enfants de lumière.
- Vérifiez tout; ce qui est bon, retenez-Ie.
6. Oppositions ou jeux de mots: Beaucoup de slogans opposent des éléments contraires (lumière-ténèbres, bien-mal, vie-mort, foi-oeuvres, etc.) :
- La lettre tue, mais l'Esprit vivifie.
- Tout est permis; mais tout n'est pas profitable.
Nous donnons maintenant 365 slogans de Paul. Un pour chaque jour de l'année. Si vous les gardez en mémoire, vous aurez un bagage inoubliable pour la prière, l'évangélisation et l'accompagnement pastoral. Pour ne pas faire une sélection subjective, nous avons consulté les citations de Paul apparaissant dans les principaux documents de l'Église.
-ROMAINS-
Paul, serviteur du Christ-Jésus, apôtre par vocation, mis à part pour annoncer l'Évangile de Dieu: 1,
1. Je me dois aux grecs comme aux barbares, aux savants comme aux ignorants: 1, 14.
L'Évangile est une force de Dieu pour le salut de tout homme qui croit: 1, 16.
Le juste vivra de la foi: 1, 17.
La bonté de Dieu te pousse au repentir: 2, 4.
Juifs et Grecs, tous sont soumis au péché: 3, 9.
Il n'est pas de juste, pas un seul: 3, 10.
Personne ne sera justifié devant Dieu par la pratique de la Loi: 3, 20
Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu: 3,23.
Dieu a exposé (le Christ Jésus), instrument de propitiation par son propre sang: 3,25.
L'homme est justifié par la foi sans la pratique de la Loi : 3,28.
(Jésus fut) livré pour nos fautes et ressuscité pour notre justification: 4, 25.
Ayant reçu notre justification de la foi, nous sommes en paix avec Dieu: 5, I.
L'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint qui nous fut donné: 5,5.
Si, par la faute d'un seul, la mort a régné, combien plus ceux qui reçoivent avec profusion la grâce règneront-ils dans la vie par le seul Jésus-Christ: 5, 17.
Où le péché s'est multiplié, la grâce a surabondé: 5,20.
Si nous sommes morts avec le Christ, nous vivrons aussi avec lui: 6, 8.
Considérez que vous êtes morts au péché et vivants à Dieu dans le Christ Jésus: 6, Il.
Le salaire du péché, c'est la mort : 6,23.
Le don gratuit de Dieu, c'est la vie éternelle dans le Christ Jésus: 6, 23.
Je ne fais pas le bien que je veux et commets le mal que je ne veux pas: 7, 19.
Malheureux homme que je suis! Qui me délivrera de ce corps qui me voue à la mort ? : 7, 24.
Il n 'y a plus maintenant de condamnation pour ceux qui sont dans le Christ-Jésus : 8, I.
La loi de l'Esprit t'a affranchi de la loi du péché et de la mort : 8, 2.
Qui n'a pas l'Esprit du Christ ne lui appartient pas: 8,9.
Nous sommes débiteurs, mais non point envers la chair pour devoir vivre selon la chair: 8, 12.
Tous ceux qu'anime l'Esprit de Dieu sont fils de Dieu: 8, 14.
Vous avez reçu un esprit de fils qui nous fait nous écrier : Abba ! Père! : 8, 15.
Vous n'avez pas reçu un esprit d'esclaves pour retomber dans la crainte: 8, 15.
Enfants, et donc héritiers; héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ: 8, 17.
Les souffrances du temps présent ne sont pas à comparer à la gloire qui doit se révéler: 8, 18.
Notre salut est objet d'espérance: 8, 24.
Voir ce qu'on espère, ce n'est plus l'espérer: 8,24.
Nous ne savons prier comme il faut; mais l'Esprit lui-même intercède pour nous en des gémissements ineffables: 8, 26.
Avec ceux qui l'aiment, Dieu collabore en tout: 8,28.
Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? : 8, 31.
Qui nous séparera de l'amour du Christ ? : 8, 35.
En tout cela nous sommes les grands vainqueurs par Celui qui nous a aimés: 8,37.
Rien ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu manifesté dans le Christ-Jésus : 8, 39.
Ce ne sont pas les enfants de la chair qui sont enfants de Dieu, seuls comptent les enfants de la promesse: 9, 8.
Je fais miséricorde à qui je fais miséricorde, et j'ai pitié de qui j'ai pitié: 9,15.
Il n'est pas question de l'homme qui veut ou qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde: 9, 16.
(Dieu) fait miséricorde à qui il veut: 9, 18.
Qui es-tu pour disputer avec Dieu ? : 9,20.
Qui croit en lui ne sera pas confondu: 9, 33.
Si tes lèvres confessent que Jésus est Seigneur et si ton coeur croit que Dieu l'a ressuscité des morts, tu seras sauvé: 10, 9.
La foi du coeur obtient la justice: 10, 10.
La confession des lèvres (obtient) le salut: 10, 10.
Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé: 10, 13.
La foi naît de la prédication, et la prédication se fait par la parole du Christ: 10, 17.
Si (le salut) est par la grâce, ce n'est plus en raison des oeuvres: 11,6.
Une partie d'Israël s'est endurcie jusqu'à ce que soit entrée la totalité des païens: 11,25.
Les dons et l'appel de Dieu sont sans repentance: Il,29.
Dieu a enfermé tous les hommes dans la désobéissance pour faire à tous miséricorde: II, 32.
Que ses décrets sont insondables et ses voies incompréhensibles! : 11,33.
Tout est de Lui et par Lui et pour Lui: Il, 35.
Je vous exhorte à offrir vos personnes en hostie vivante, sainte et agréable à Dieu: 12, I.
Que le renouvellement de votre intelligence vous transforme: 12,2.
Sois vainqueur du mal par le bien: 12, 21.
N'ayez de dettes envers personne, sinon celle de l'amour mutuel: 13, 8.
La charité est la Loi dans sa plénitude: 13, 10.
Le salut est maintenant plus près de nous qu'au temps où nous avons cru: 13, Il.
Revêtez-vous du Seigneur Jésus Christ: 13, 14.
Que chacun s'en tienne à son jugement : 14, 5.
Si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, et si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur: 14, 8.
Dans la vie comme dans la mort, nous appartenons au Seigneur: 14, 8.
Le Règne de Dieu est justice, paix et joie dans l'Esprit Saint: 14, 17.
Tout ce qui ne procède pas de la bonne foi est péché: 14, 23.
- 1 CORINTHIENS -
Le Christ ne m'a pas envoyé baptiser, mais annoncer l'Évangile: I, 17.
C'est par la folie du message qu'il a plu à Dieu de sauver les croyants: I, 21.
Nous proclamons un Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens: 1,23.
C'est le Christ, puissance de Dieu et sagesse de Dieu: 1,23-24.
Ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes: 1,25.
Ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes: 1,25.
Celui qui se glorifie, qu'il se glorifie dans le Seigneur: I, 31.
Je n'ai rien voulu savoir parmi vous, sinon Jésus Christ, et Jésus Christ crucifié: 2, 2.
C'est ce que l'reil n'a pas vu, ce que l'oreille n'a pas entendu, et ce qui n'est pas monté au coeur de l'homme, tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui l'aiment : 2, 9.
Nul ne connaît ce qui concerne Dieu, sinon l'Esprit de Dieu: 2, Il.
L'homme psychique n'accueille pas ce qui est de l'Esprit de Dieu: 2, 14.L'homme spirituel juge de tout: 2, 15.
Vous êtes un temple de Dieu, et l'Esprit de Dieu habite en vous: 3, 16.
Si quelqu'un détruit le temple de Dieu, celui-là, Dieu le détruira: 3, 17.
La sagesse de ce monde est folie auprès de Dieu: 3, 19.
Tout est à vous; mais vous êtes au Christ, et le Christ est à Dieu: 3, 22-23.
Ce qu'on demande à des intendants, c'est que chacun soit trouvé fidèle: 4, 2.
Qu'as-tu que tu n'aies reçu ? Et si tu l'as reçu, pourquoi te glorifier ? : 4,7.
Le Royaume de Dieu ne consiste pas en paroles, mais en puissance: 4, 20.
Purifiez-vous du vieux levain pour être une pâte nouvelle: 5, 7.Notre pâque, le Christ, a été immolée: 5, 7.
Fuyez la fornication! : 6, 18.
Vous avez été bel et bien achetés: 6, 20.
Chacun reçoit de Dieu un don particulier, celui-ci d'une manière, celui-là de l'autre: 7,7.
Elle passe, la figure de ce monde: 7, 31.
La science enfle; c'est la charité qui édifie: 8, I.
Ceux qui annoncent l'Évangile vivent de l'Évangile: 9, 14.
Malheur à moi si je n'annonçais pas l'Évangile! : 9, 16.
Je me suis fait tout à tous, afin d'en sauver à tout prix quelques-uns : 9, 22.
Dieu est fidèle; il ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces: 10, 13.
Vous ne pouvez boire à la fois la coupe du Seigneur et la coupe des démons: 10,21.
Tout est permis; mais tout n'édifie pas: 10,23.
Tout est permis; mais tout n'est pas profitable: 10,23.
Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, faites tout pour la gloire de Dieu: 10, 31.
Montrez-vous mes imitateurs, comme je le suis moi-même du Christ: 11, I.
Le chef de tout homme, c'est le Christ; le chef de la femme, c'est l'homme; et le chef du Christ, c'est Dieu: 11,3.
Chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne: 11,26.
Celui qui mange et boit, mange et boit sa propre condamnation, s'il ne discerne pas le Corps: Il, 29.
Personne ne dit: « Jésus est Seigneur », s'il n'est avec l'Esprit Saint: 12, 3.
Il y a diversité de dons spirituels, mais c'est le même Esprit: 12,4.
Aussi est-ce en un seul Esprit que nous avons tous été baptisés en un seul corps: 12, 13.
Vous êtes le corps du Christ: 12,27.
Aspirez aux dons supérieurs: 12, 31.
Si je n'ai pas la charité, je ne suis rien: 13,2.
La charité est longanime, la charité est serviable: 13, 4.
(La charité) n'est pas envieuse, la charité ne fanfaronne pas, ne se gonfle pas : 13,4.
(La charité) ne tient pas compte du mal: 13,5.
(La charité) met sa joie dans la vérité: 13,6.
(La charité) excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout: 13,7.
La charité ne passe jamais : 13,8.
Maintenant demeurent foi, espérance, charité, mais la plus grande d'entre elles, c'est la charité: 13, 13.
Soyez des petits enfants pour la malice, soit, mais pour le jugement soyez des hommes faits: 14, 20.
Que tout se passe de manière à édifier: 14, 26.
Les esprits des prophètes sont soumis aux prophètes: 14, 32.
Dieu n'est pas un Dieu de désordre, mais de paix: 14,33.
Le Christ est mort pour nos péchés, il a été mis au tombeau, il est ressuscité selon les Écritures: 15,3-4.
C'est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis: 15, 10.
La grâce de Dieu à mon égard n'a pas été stérile: 15, 10.
Si le Christ n'est pas ressuscité, vide alors est notre message, vide aussi votre foi: 15, 14.
Que Dieu soit tout en tous: 15,28.
Si les morts ne ressuscitent pas, mangeons et buvons, car demain nous mourrons: 15,32.
De même que nous avons porté l' image du terrestre, nous porterons aussi l'image du céleste: 15,49.
Où est-elle, ô mort, ta victoire ? Où est-il, ô mort, ton aiguillon ? : 15,55.
L'aiguillon de la mort, c'est le péché: 15,56.
La force du péché, c'est la Loi: 15,56.
Dieu nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus Christ: 15, 57.
Votre labeur n'est pas vain dans le Seigneur: 15,58.
Demeurez fermes dans la foi: 16, 13.
Que tout se passe chez vous dans la charité: 16, 14.
Si quelqu'un n'aime pas le Seigneur, qu'il soit anathème : 16,22.
- 2 CORINTHIENS -
Apprenons à ne pas mettre notre confiance en nous-mêmes mais en Dieu qui ressuscite les morts: 1,9.
Toutes les promesses de Dieu ont en effet leur oui en Jésus Christ: 1,20.
Dieu nous a aussi marqués d'un sceau et a mis dans nos cœurs les arrhes de l'Esprit: 1,22.
Vous êtes une lettre du Christ remise à nos soins: 3,3.
La lettre tue, l'Esprit vivifie: 3, 6.
Où est l'Esprit du Seigneur, là est la liberté: 3, 17.
Ce trésor, nous le portons en des vases d'argile: 4, 7.
J'ai cru, c'est pourquoi j'ai parlé: 4,13.
Celui qui a ressuscité le Seigneur Jésus nous ressuscitera, nous aussi, avec Jésus: 4, 14.
La légère tribulation d'un instant nous prépare une masse éternelle de gloire: 4, 17.
Les choses visibles n'ont qu'un temps, les invisibles sont éternelles: 4, 18.
C'est Dieu qui nous a donné les arrhes de l'Esprit: 5, 5.
L'amour du Christ nous presse: 5, 14.
Les vivants vivent pour celui qui est mort et ressuscité pour eux: 5, 15.
Si quelqu'un est dans le Christ, c'est une création nouvelle: 5, 17.
Nous sommes en ambassade pour le Christ: 5,20.
Celui qui n'avait pas connu le péché, (Dieu) l'a fait péché pour nous: 5,21.
(Nous vivons comme des) gens qui n'ont rien, nous qui possédons tout: 6, 10.
Nous sommes le temple du Dieu vivant: 6, 16.
La tristesse selon Dieu produit un repentir salutaire qu'on ne regrette pas: 7, 10.
La tristesse du monde, elle, produit la mort : 7, 10.
Je me réjouis de pouvoir en tout compter sur vous: 7, 16.
Jésus Christ, pour vous, s'est fait pauvre, de riche qu'il était, afin de vous enrichir par sa pauvreté: 8, 9.
Celui qui avait beaucoup recueilli n'eut rien de trop, et celui qui avait peu recueilli ne manqua de rien: 8, 15.
Qui sème chichement moissonnera aussi chichement: 9, 6.
Qui sème largement moissonnera aussi largement: 9, 6.
Dieu aime celui qui donne avec joie: 9, 7.
Dieu est assez puissant pour vous combler de toutes sortes de libéralités: 9, 8.
Nous vivons dans la chair, évidemment, mais nous ne combattons pas selon la chair: 10,3.
J'éprouve à votre égard une jalousie divine: 11,2.
Satan lui-même se déguise bien en ange de lumière: II, 14.
S'il faut se glorifier, c'est de mes faiblesses que je me glorifierai : II, 30.
Ma grâce te suffit: 12, 9.
Lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort : 12, 10.
Je dépenserai et me dépenserai moi-même tout entier pour vos âmes: 12, 15.
Nous n'avons aucun pouvoir contre la vérité; nous n'en avons que pour la vérité: 13, 8.
La grâce du Seigneur Jésus Christ, l'amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit soient avec vous tous: 13, 13.
- GALATES -
Si un ange venu du ciel vous annonçait un évangile différent de celui que nous vous avons prêché, qu'il soit anathème! : 1, 8.
Si je voulais encore plaire à des hommes, je ne serais plus le serviteur de Christ: 1, 10.
Annoncer Jésus Christ: 1, 16.
Le persécuteur de naguère annonçait maintenant la foi: 1,23.
Si toi qui es juif, tu vis comme les païens, comment peux tu contraindre les païens à judaïser ? : 2, 14.
L'homme ne s ' est pas justifié par la pratique de la loi, mais seulement par la foi en Jésus Christ: 2, 16.
Par la pratique de la loi personne ne sera justifié: 2, 16.
Je suis crucifié avec le Christ: 2, 19.
Ce n'est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi: 2,20.
Si la justice vient de la loi, c'est donc que Christ est mort pour rien: 2,21.
Tous ceux qui se réclament de la pratique de la loi encourent une malédiction: 3, 10.
La loi ne justifie personne, puisque le juste vivra par la foi: 3, II.
La loi ne procède pas de la foi: 3, 12.
Le Christ nous a rachetés de cette malédiction de la loi, devenu lui-même malédiction pour nous: 3, 13.
Par la foi, nous recevons l'Esprit de la promesse: 3, 14.
L'Écriture a tout enfermé sous le péché afin que la promesse, par la foi en Jésus Christ, fût accordée à ceux qui croient: 3, 22.
Vous êtes tous fils de Dieu, par la foi dans le Christ Jésus : 3,28
Vous tous, baptisés dans le Christ, vous avez revêtu I, Christ: 3, 27.
Tous, vous ne faites qu'un dans le Christ Jésus: 3, 28.
Dieu envoya son fils, né d'une femme, né sujet de la loi afin de racheter les sujets de la loi: 4, 4-5.
La preuve que vous êtes des fils, c'est que Dieu a envoyé ans nos cours l'Esprit de son Fils qui crie: Abba, Père! : 4,6
Maintenant vous avez connu Dieu, ou plutôt il vous a connus: 4, 9.
Devenez semblables à moi, puisque je me suis fait semblable à vous: 4, 12.
Mes petits enfants, vous que j'enfante à nouveau dans la douleur jusqu'à ce que le Christ soit formé en vous: 4, 19.
Vous êtes enfants de la promesse: 4, 28.
Nous ne sommes pas enfants d'une servante mais de la femme libre: 4, 31.
C'est pour que nous restions libres que le Christ nous a libérés: 5,1.
Vous avez rompu avec le Christ, vous qui cherchez la justice dans la loi: 5, 4.
La foi opère par la charité: 5, 6.
Qu'ils aillent jusqu'à la mutilation, ceux qui bouleversent vos âmes! : 5, 12.
Vous avez été appelés à la liberté: 5, 13.
Que cette liberté ne se tourne pas en prétexte pour la chair! : 5, 13.
Par la charité, mettez-vous au service les uns des autres: 5, 13.
Une seule formule contient toute la loi en sa plénitude: Tu aimeras ton prochain comme toi-même : 5, 14.
Laissez-vous mener par l'Esprit, et vous ne risquerez pas de satisfaire la convoitise charnelle: 5, 16.
La chair convoite contre l'esprit et l'esprit contre la chair : 5,17.
Si l'Esprit vous anime, vous n' êtes pas sous la loi: 5, 18.
Le fruit de l'Esprit est charité: 5, 22.
Ceux qui appartiennent au Christ-Jésus ont crucifié la chair avec ses passions: 5, 24.
Puisque l'Esprit est notre vie, que l'Esprit nous fasse aussi agir: 5, 25.
Si quelqu'un estime être quelque chose, il se fait illusion: 6,3.
Que le disciple fasse part de toute sorte de biens à celui qui lui enseigne la parole: 6, 6.
Ne vous y trompez pas ; on ne se moque pas de Dieu: 6, 7.
Ce que l'on sème, on le récolte: 6,7.
Qui sème dans sa chair, récoltera de la chair la corruption: 6, 8.
Qui sème dans l'esprit, récoltera de l'esprit la vie éternelle: 6, 8.
Pratiquons-le bien à l'égard de tous et surtout de nos frères dans la foi: 6, 10.
Pour moi, que jamais je ne me glorifie sinon dans la croix de notre Seigneur Jésus Christ: 6, 14.
La croix a fait du monde un crucifié pour moi et de moi un crucifié pour le monde: 6, 14.
Que personne ne me suscite d'ennuis: je porte dans mon corps les marques de Jésus: 6, 17.
- EPHESIENS -
Il nous a élus en lui pour être saints et immaculés en sa présence, dans l'amour: 1,4.
Ramener toutes choses sous un seul Chef, le Christ: I, IO
Vous avez été marqués d'un sceau par l'Esprit de la promesse: I, 13.
Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont Il nous a aimés, alors que nous étions morts par suite de nos fautes, nous a fait revivre avec le Christ: 2,4-5.
C'est par grâce que vous êtes sauvés! : 2,5.
Avec lui Il nous a ressuscités et fait asseoir aux cieux, dans le Christ-Jésus : 2, 6.
C'est par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi: 2,8.
Vous qui jadis étiez loin, vous êtes devenus proches, grâce au sang du Christ: 2, 13.
C'est lui qui est notre paix: 2, 14.
Paix pour vous qui étiez loin et paix pour ceux qui étaient proches: 2, 17.
Par (Jésus) nous avons, tous deux en un seul Esprit, libre accès auprès du Père: 2, 18.
La construction que vous êtes a pour fondations les apôtres et prophètes: 2,20.
L'amour du Christ surpasse toute connaissance: 3, 19.
(Dieu) dont la puissance agissant en nous est capable de faire bien au-delà, infiniment au-delà de tout ce que nous pouvons demander ou concevoir: 3, 20.
Menez une vie digne de l'appel que vous avez reçu: 4, 1.
Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, par tous et en tous: 4, 5-6.
C'est lui encore qui a donné aux uns d'être apôtres, à d'autres d'être prophètes, ou encore évangélistes, ou bien pasteurs et docteurs: 4, 11.
Nous grandirons de toutes manières vers Celui qui est la Tête, le Christ: 4, 15.
(Il vous faut) revêtir l'Homme Nouveau, qui a été créé selon Dieu: 4, 24.
Que le soleil ne se couche pas sur votre colère: 4, 26.
Ne contristez pas l'Esprit Saint de Dieu: 4,30.
Conduisez-vous en enfants de lumière: 5, 8.
Discernez ce qui plaît au Seigneur: 5, 10.
Ne vous enivrez pas de vin: 5, 18.
Cherchez dans l'Esprit votre plénitude: 5, 18.
Que les femmes soient soumises à leurs maris comme au Seigneur: 5,22.
Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l'Église: 5,25.
Que chacun aime sa femme comme soi-même : 5, 33.
Rendez-vous puissants dans le Seigneur et dans la vigueur de sa force: 6, 10.
Revêtez l' armure de Dieu: 6, 11.
Ce n'est pas contre des adversaires de chair et de sang que nous avons à lutter, mais contre les Principautés, contre les Puissances: 6, 12.
- PHILIPPIENS -
Pour moi, la Vie, c'est le Christ, et mourir représente un gain: I, 21.
Menez une vie digne de l'Évangile du Christ: 1,27.
Tenez ferme dans un même esprit, luttant de concert et d'un coeur unanime pour la foi de l'Évangile: 1,27.
Ayez le même amour, une seule âme, un seul sentiment: 2, 2.
Ayez entre vous les mêmes sentiments qui sont dans le Christ-Jésus : 2, 5.
(Jésus) s'humilia plus encore, obéissant jusqu'à la mort, et à la mort sur une croix! : 2, 8.
Que tout, au nom de Jésus, s'agenouille: 2, 10.
Que toute langue proclame, de Jésus Christ, qu'il est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père: 2, Il.
Dieu est là qui opère en vous à la fois le vouloir et l'opé¬ration même, au profit de ses bienveillants desseins: 2, 13.
Agissez en tout sans murmures ni contestations: 2, 14.
Tous recherchent leurs propres intérêts, non ceux de Jésus Christ: 2,21.
C'est nous qui sommes les circoncis, nous qui offrons le culte selon l'Esprit de Dieu: 3,3.
Tous ces avantages dont j'étais pourvu, je les ai considérés comme un désavantage, à cause du Christ: 3, 7.
Je considère tout comme désavantageux à cause de la supériorité de la connaissance du Christ-Jésus, mon Seigneur: 3, 8.
Je poursuis ma course pour tâcher de saisir, ayant été saisi moi-même par le Christ-Jésus : 3, 12.
Réjouissez-vous sans cesse dans le Seigneur, je le dis encore, réjouissez-vous : 4, 4.
La paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, prendra sous sa garde vos cœurs et vos pensées, dans le Christ-Jésus : 4, 7.
Tout ce qu'il y a de vrai, de noble, de juste, de pur, d'ai¬mable, voilà ce qui doit vous préoccuper: 4, 8.
Je puis tout en Celui qui me rend fort : 4, 13.
Mon Dieu comblera tous vos besoins, avec magnificence : 4, 19.
- COLOSSIENS -
Je trouve ma joie dans les souffrances que j'endure pour vous: 1, 24.
Je complète en ma chair ce qui manque aux détresses du Christ: 1,24.
Christ est l'espérance de la gloire! : 1,27
Le mystère de Dieu: Christ, dans lequel se trouvent, cachés, tous les trésors de la sagesse et de la connaissance: 2,2-3.
En lui (Jésus) habite toute la plénitude de la Divinité: 2,9.
Ensevelis avec lui lors du baptême, vous en êtes aussi ressuscités avec lui: 2, 12.
Dieu vous a fait revivre avec lui! Il nous a pardonné toutes nos fautes: 2, 13.
Il a effacé la cédule de nos dettes en la clouant à la croix: 2, 14.
La réalité, c'est le corps du Christ: 2,17.
Du moment que vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les choses d ' en-haut, là où se trouve le Christ: 3, 1.
Songez aux choses d'en-haut, non à celles de la terre: 3,2.
Vous vous êtes dépouillés du vieil homme, et vous avez revêtu le nouveau: 3, 9.
Par-dessus tout, (revêtez) la charité, en laquelle se noue la perfection: 3, 14.
Que la paix du Christ règne en vos cœurs : 3, 15.
Que la Parole du Christ réside chez vous en abondance: 3, 16.
Quoi que vous puissiez dire ou faire, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus: 3, 17.
- 1 THESSALONICIENS -
Notre Évangile ne s'est pas présenté à vous en paroles seulement, mais en puissance, dans l'action de l'Esprit Saint, en surabondance: 1, 5.
Nous cherchons à plaire non pas aux hommes mais à Dieu qui éprouve nos cœurs : 2, 4.
C'est bien vous qui êtes notre gloire et notre joie: 2, 20.
La volonté de Dieu, c'est votre sanctification: 4,3.
Dieu ne nous a pas appelés à l'impureté mais à la sanctification: 4,7.
Dieu ne nous a pas réservés pour sa colère, mais pour entrer en possession du salut: 5, 9.
Priez sans cesse: 5, 17.
N'éteignez pas l'Esprit: 5, 19.
Vérifiez tout: ce qui est bon, retenez-le : 5, 21.
Il est fidèle, celui qui vous appelle: c'est encore lui qui fera cela: 5, 24.
- 2 Thessaloniciens -
Dieu vous a choisis pour être sauvés: 2, 13.
C'est à quoi il vous a appelés, pour que vous entriez en
possession de la gloire de notre Seigneur Jésus Christ: 2, 14.
Que la parole du Seigneur accomplisse sa course: 3, 1.
La foi n'est pas donnée à tous: 3,2.
Le Seigneur est fidèle : 3, 3
(Le Seigneur) vous affermira et vos gardera du Mauvais: 3, 3.
Que le Seigneur dirige vos cœurs vers l'amour de Dieu et la constance du Christ: 3, 5.
Si quelqu'un ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus! : 3, 10.
Ne vous lassez pas de faire le bien: 3, 13.
- 1 TIMOTHEE -
Le Christ-Jésus, notre espérance: 1, 1.
La grâce de notre Seigneur a surabondé: 1, 14.
Le Christ-Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs dont je suis, moi, le premier: 1, 15.
Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité: 2, 4.
Dieu est unique, unique aussi le médiateur, le Christ Jésus: 2, 5.
Si nous peinons et combattons, c'est que nous avons mis notre espérance dans le Dieu vivant: 4, 10.
Que personne ne méprise ton jeune âge: 4, 12.
Ne néglige pas le don spirituel qui est en toi: 4, 14.
L'ouvrier mérite son salaire: 5, 18.
Nous n'avons rien apporté dans le monde, et de même nous n'en pouvons rien emporter: 6, 7.
La racine de tous les maux, c'est l'amour de l'argent: 6, 10. Combats le bon combat de la foi: 6, 12.
- 2 TIMOTHEE -
Je t'invite à raviver le don spirituel que Dieu a déposé en toi: 1,6.
Ce n'est pas un esprit de crainte que Dieu nous a donné, mais un Esprit de force, d'amour et de maîtrise de soi: 1, 7.
Je sais en qui j'ai mis ma foi: 1,12.
Ce que tu as appris de moi, confie-le à des hommes sûrs, capables à leur tour d'en instruire d'autres: 2,2.
Prends ta part de souffrance en bon soldat du Christ Jésus: 2,3.
Souviens-toi de Jésus Christ, ressuscité d'entre les morts : 2,8.
La parole de Dieu n'est pas enchaînée! : 2,9.
Si nous sommes infidèles, lui reste fidèle: 2, 13.
Qu'il évite l'iniquité, celui qui prononce le nom du Seigneur: 2, 19.
Le Seigneur connaît les siens: 2, 19.
Tous ceux qui veulent vivre dans le Christ seront persécutés: 3, 12.
Quant aux pécheurs et aux charlatans, ils feront toujours plus de progrès dans le mal, à la fois trompeurs et trompés: 3, 13.
Les saintes Lettres sont à même de te procurer la sagesse qui conduit au salut par la foi dans le Christ-Jésus : 3, 15.
Toute Écriture est inspirée de Dieu: 3, 16.
Toute Écriture est utile pour enseigner, réfuter, redresser: 3, 16.
Proclame la parole à temps et à contretemps: 4, 2.
Tous m'ont abandonné! : 4, 16.
Le Seigneur me délivrera de toute entreprise perverse: 4, 18. À lui la gloire dans tous les siècles! Amen: 4, 18.
- TITE -
Dieu ne ment pas: 1,2.
Tout est pur pour les purs. Mais pour ceux qui sont souillés et qui n'ont pas la foi, rien n'est pur: I, 15.
Ils font profession de connaître Dieu, mais, par leur conduite, ils le renient: I, 16.
Enseigne ce qui est conforme à la sainte doctrine: 2, I.
La grâce de Dieu, source de salut pour tous les hommes, s'est manifestée: 2, Il.
Notre grand Dieu et Sauveur, le Christ-Jésus : 2, 13.
Que personne ne te méprise: 2, 15.
- ACTES DES APÔTRES -
L'entière justification, c'est par lui que quiconque croit l'obtient: 13,38-39.
Il nous faut passer par bien des tribulations pour entrer dans le Royaume de Dieu: 14, 22.
Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé, toi et les tiens: 16, 31.
C'est Jésus que je vous annonce: 17,3.
C'est en lui que nous avons la vie, le mouvement et l'être: 17,28.
Avez-vous reçu l'Esprit Saint quand vous avez embrassé la foi ? : 19, 2.
Repentez-vous envers Dieu et croyez en Jésus, notre Seigneur: 20, 21.
Rendre témoignage à l'Evangile de la grâce de Dieu: 20, 24.
Je ne me suis pas dérobé quand il fallait vous annoncer toute la volonté de Dieu: 20, 27.
Soyez attentifs à tout le troupeau dont I 'Esprit Saint vous a établis gardiens: 20, 28.
La parole de Dieu a le pouvoir de bâtir l'édifice: 20,32.
Il y a plus de bonheur à donner qu'à recevoir: 20,35.
Je suis prêt à mourir pour le nom du Seigneur Jésus: 21,13.
Que dois-je faire, Seigneur ? : 22, 10.
C'est à cause de l'espérance d'Israël que je porte les chaînes que voici: 28, 20.
C'est aux païens qu'a été envoyé ce salut de Dieu: 28,28.
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"I stand at the door and knock. If anyone hears my voice and opens the door, I will come in."
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